Title: La guirlande de Julie: augmentée de documents nouveaux
Editor: Octave Uzanne
Contributor: duc de Charles de Sainte-Maure Montausier
Release date: July 23, 2016 [eBook #52629]
Language: French
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LA
GUIRLANDE DE JULIE
Augmentée de Documents nouveaux
PUBLIÉE AVEC NOTICE, NOTES ET VARIANTES
PAR OCTAVE UZANNE
ET ORNÉE D'UN
PORTRAIT INÉDIT DE JULIE D'ANGENNES
PARIS
LIBRAIRIE DES BIBLIOPHILES
Rue Saint-Honoré, 338
M DCCC LXXV
IVLIE LVCINE D'ANGENNES
DAMOISELLE DE RAMBOVILLET
MONSIEUR,
Je viens, disciple fidèle, placer cette édition
de la Guirlande de Julie sous votre haute
protection, rendre humblement hommage
à votre vaste savoir, et atténuer, s'il est possible, ma
dette de reconnaissance envers vous.
C'est non-seulement au maître, au docte bibliophile, au grand lettré de ce siècle, que je dédie cette réimpression, II c'est plus encore à l'homme bienveillant, au savant d'intimité, prodigue, comme les vraiment riches, de ses immenses trésors bibliographiques, de son expérience et de ses conseils.
N'est-ce pas, en effet, sous l'influence de vos généreux encouragements que j'ai pu concevoir ma tâche, préparer et mûrir la réhabilitation des poëtes de ruelles du XVIIe siècle?
Aux quelques beaux esprits que je me proposais d'exhumer, à Sarasin, Voiture, Colletet, Malleville, Brébeuf et Scudéry, n'avez-vous pas ajouté, avec l'enthousiasme juvénile de votre ardente érudition, les noms de Chapelle, Montreuil, Charleval, Lainez, Ferrand, et autres poëtes, hélas! oubliés, jadis oracles dans le temple du beau langage, talents originaux, précieusement étoffés de couleur locale, au milieu de la grandiose universalité littéraire du siècle de Louis le Grand?
Vous avez particulièrement daigné sourire à l'illustre galanterie du marquis de Montausier, éclose dans ce pays de la conversation, ou Julie d'Angennes était reine et idole, et j'ai eu l'inappréciable bonheur de contempler III dans votre cabinet de travail, radieuse dans son auréole de fleurs, la ravissante Guirlandeuse, dont le portrait si recherché, et jusqu'alors ignoré, embellit, grâce à vous, cette nouvelle édition.
Ne sont-ce pas là, monsieur, des titres à mon entier dévouement, et ne dois-je pas m'estimer fier et heureux d'avoir su rencontrer, au début du chemin, le guide sûr et charmant qui a bien voulu faire quelques pas sur ma route?
C'est donc sous votre inspiration que paraît aujourd'hui la Guirlande de Julie, et que renaîtront tour à tour tous ces rimeurs galants, favoris des Parnassides, troupe légère d'avant-garde des Corneille et des Molière, qui, en dépit de la verte férule du régent Boileau, sut si agréablement faire l'école buissonnière et butiner dans les sentiers de la double colline.
Grâces vous soient rendues, monsieur, si je puis mener à bonne fin l'entreprise que je conçois, et offrir aux lettrés, dans une gracieuse rénovation, ces délicates victimes de l'oubli.
Quoi qu'il en soit, heureux ou non dans l'avenir, IV ayant votre exemple comme guide et votre mérite comme but, je marcherai fièrement en avant, prenant la devise que les anciens, dans leur erreur, plaçaient sous le disque solaire:
Fit cursu clarior.
Avec l'assurance de ma plus vive reconnaissance et de ma sincère amitié, veuillez me croire,
MONSIEUR,
Le plus fervent et le plus dévoué
de vos admirateurs.
OCTAVE UZANNE.
Paris, le 10 décembre 1875.
Quand les dieux eurent fait
Le chef-d'œuvre parfait
Que Julie on appelle,
Minerve qui la vit
En pleura de dépit,
Et se trouva moins belle.
Voiture.
Après Helene, il n'y a gueres eu de personne dont
la beauté ayt esté plus generalement chantée.
TALLEMANT DES RÉAUX.
La princesse Aminte, fille de la Déesse d'Athènes, avoit un esprit de pacification, et portoit la paix partout où elle alloit. C'étoit une personne aimable et aimée de tout le monde, qui n'a jamais fait que du bien, et qui a toujours empêché le mal autant qu'elle a pû. Elle avoit des charmes dans l'esprit qui se faisoient connoître VI à tous ceux qui l'approchoient, mais qui ne se peuvent exprimer. Jamais personne n'a mieux sçû qu'elle conserver l'affection de ceux qui étoient le plus mal ensemble, ni être si bien venuë chez les ennemis des gens qu'elle venoit de quitter. Rien n'étoit beau sans elle: les maisons qu'elle ne vouloit pas honorer de ses visites étoient désertes et décriées; enfin son approbation seule faisoit valoir ceux qu'elle en jugeoit dignes, et pour bien débuter dans le monde, il falloit avoir l'honneur d'être connu d'elle.»
Ainsi parle Mademoiselle dans la Princesse de Paphlagonie [1], et si nous commençons cette Notice par un début digne des Perrault et des Galland, c'est que Julie-Lucine d'Angennes de Rambouillet fut une fée, bonne, gracieuse, spirituelle et presque divine, à laquelle les poëtes ses contemporains prodiguèrent avec justice les plus éclatants hommages dus à sa féminine puissance.
Ces éloges enthousiastes dont elle fut l'objet, ces pompeuses métamorphoses dans lesquelles on se plut à transformer ses différents mérites comme pour mieux VII les fixer, ces bouquets de madrigaux qui enguirlandent encore sa mémoire après avoir animé son exquise beauté, toute cette gamme de louanges enfin peut paraître à première vue excessive et fanatique, mais l'étude sérieuse de sa personne et de sa vie justifie pleinement à nos yeux l'ardente admiration qu'elle sut inspirer.
Julie d'Angennes fut un esprit rare, digne de tenir un illustre rang dans l'histoire littéraire des femmes françaises, par sa grâce, ses vertus, sa remarquable intelligence, et le doux éclat poétique qu'elle semble jeter sur la société polie de son époque.
Le XVIIe siècle naissait à peine, que la poésie des Ronsard, des Baïf et des Du Bellay changeait brusquement sa manière rude, quoique mignarde, au sein même de l'hôtel de Rambouillet. La Muse vigoureuse et féconde du XVIe siècle, introduite par Malherbe dans la maison de la vertueuse Arthenice, y abandonna son allure négligée. Initiée peu à peu à de nouvelles doctrines, elle sut se façonner à l'étiquette du bel esprit, et, mettant tous ses soins à enjoliver son style, à gazer son langage, à modifier son ton, elle fut tour à tour coquette sans être prude, spirituelle avec malice, frivole avec enjouement. De forte fille populaire à l'accent net et franc, elle devint damoiselle affétée, usa de métaphores, sut jouer de l'éventail et étaler ses falbalas. Elle eut peut-être moins de verve gauloise; VIII mais elle acquit à coup sûr plus de politesse française. La Muse avait pris rang de qualité.
Julie ne contribua pas médiocrement à cette transformation poétique, conçue et opérée sous ses auspices; à la protection qu'accordait madame de Rambouillet aux littérateurs en renom, elle ajouta les charmes de sa pétulante conversation et de son vivace entrain, et fut surtout, par sa seule présence, la reine des madrigaux, le bon génie inspirateur, la vivante idole, et comme le palpable idéal des poëtes qui l'entouraient [2].
Autour de cette déité se forma une cour brillante et courtisanesque, nourrie de l'Astrée et des pastorales à la mode, esprits délicats, talents gradués, génies naissants, qui tous se hasardaient avec savoir sur les gracieux confins du Païs de Tendre [3], en se proclamant heureux de se mourir pour la dame de leurs pensées et de payer la dîme à sa beauté.
IX Dans ce temple du beau parler, la recherche était de bon goût, le vulgaire à l'index, et tous les efforts incombaient à proscrire le malsonnant, à chasser le banal, et à revêtir d'honnêtes circonlocutions la brutalité de certains mots, trop court vêtus jusqu'alors.
Il fallait être passé maître dans l'art du bien dire, et superbement connaître tout le bel air des choses, pour posséder ses grandes et petites entrées dans cette immortelle réunion; un novice eût-il laissé échapper une expression triviale, une tournure de phrase basse ou grossière, qu'aussitôt environné de mignonnes toux sèches, de cris étouffés, et du mouvement accéléré des zéphirs [4], il fût resté pétrifié devant les visages froidement dédaigneux et l'attitude visiblement outragée de la noble assemblée. Aussi, quel langage chastement imagé il se parlait dans ce sanctuaire d'euphonie et de pudeur! Que d'audacieux néologismes, que d'habiles périphrases, que de brillantes et solides épithètes qui vinrent enrichir notre langue pour demeurer aujourd'hui parmi nous, et sans qu'on y songe, de l'emploi le plus familier!
C'est sur cette société d'élus, où sa spirituelle beauté s'épanouissait, que l'illustre Julie régnait sans égale. Elle était l'arbitre souverain des belles choses, le point de mire des saillies vives et élégantes. Toutes X les fusées d'esprit étaient tirées en son honneur, et une œuvre badine ou sérieuse n'aurait pu se passer de son assentiment.
N'est-ce pas pour elle que Voiture écrivait ses lettres les plus galantes et ciselait ses vers les plus enjoués; que le vénérable Godeau, abandonnant ses paraphrases bibliques, se faisait rimeur de ruelles, et que le grave Chapelain, infidèle à sa Pucelle, contraignait son bon sens à madrigaliser? N'est-ce pas encore pour cette douce enchanteresse que Colletet, Malleville, Gombaud, Scudéry, Habert, Desmarests et tant d'autres luttaient de talent et de finesse, et que Pierre Corneille, amoureux lui-même, dictait à sa muse émue les petits vers musqués qu'il parafait de son grand nom?
Il n'y a jamais eu une dame qui ait si bien entendu la galanterie, ni si mal entendu les galants, pensait spirituellement le malicieux Voiture [5]. En effet, au milieu de tous ces mourants, Julie d'Angennes demeurait d'une humeur toujours libre et aimable, savante sans orgueil, modeste sans contrainte; elle vivait dans ce monde galant, comme la salamandre parmi les flammes, sans que le moindre soupçon ait pu l'atteindre; sa vertu toujours souriante brillait dans toute sa pureté, et elle semblait enfin soutenir de son exemple XI cette admirable mais trop souvent dangereuse maxime de madame de Sablé: «Que les femmes, ornements de la terre, sont faites pour être adorées et répandre autour d'elles tous les grands sentiments, en accordant comme une assez digne récompense leur estime et leur amitié.»
C'est de sa mère, la marquise de Rambouillet, s'écrie Fléchier dans sa remarquable oraison funèbre [6], que «l'admirable Julie tenoit cette grandeur d'âme, cette bonté singulière, cette prudence consommée, cet esprit sublime et cette parfaite connoissance des choses qui rendirent sa vie si éclatante. Vous dirai-je, poursuit l'harmonieux orateur, qu'elle pénétroit dès son enfance les défauts les plus cachés des ouvrages d'esprit et qu'elle en discernoit les traits les plus délicats? que personne ne savoit mieux estimer les choses louables, ni mieux louer ce qu'elle estimoit? qu'on gardoit ses lettres comme un modèle de pensées raisonnables et de la pureté de notre langue... et que, tout enfant qu'elle étoit, elle se fit admirer de ceux qui étoient eux-mêmes l'ornement et l'admiration de leur siècle?»
Telle était l'incomparable fille d'Arthenice, qui, à ces belles qualités, joignait un dévouement héroïque XII et un philosophique mépris de la mort [7], et si l'on envisage cet éclatant ensemble de perfections, qui s'élevait modestement au milieu d'une civilisation avide de trouver la femme forte pour la diviniser, on comprendra que tout ce que Paris comptait alors de personnes illustres et distinguées, se soit empressé autour de cet astre, pour lui décerner de justes honneurs et de sincères adulations.
Lorsque le baron de Sainte-Maure parut à l'hôtel de Rambouillet, il tomba aussitôt sous le charme de Julie d'Angennes, et par ses manières courtoises, ses multiples attentions et ses franches coquetteries, il essaya de donner l'éveil au cœur de cette sirène, dont il se déclara vivement l'amant le plus passionné et le prétendant le plus tendre [8].
XIII Montausier n'était à cette époque que le brillant officier de Casal [9]; il avait l'air noble et grand, la taille bien prise, les yeux vifs et pleins de feu, et sur la mâle beauté de son visage se peignait une expression de téméraire franchise qui semblait défier l'hypocrisie; à cet extérieur aimable et sympathique, le futur gouverneur du Dauphin ajoutait un esprit cultivé, une farouche bravoure et cette scrupuleuse honnêteté à remplir ses devoirs qui fit dire plus tard à Montesquieu: «Le caractère de Montausier a quelque chose des anciens philosophes et de cet excès de leur raison.»
Le nouveau venu reçut l'accueil le plus chaleureux dans le palais d'honneur des Rambouillet; ce n'était pas encore l'austère Alceste qu'il fut dans la suite, mais le gentilhomme dans toute sa magnificence, l'ami des plaisirs et des agréables entretiens, le poëte improvisateur et le chansonnier habile, le plaisant moraliste enfin, qui savait rire des vices de son époque et les censurer gaîment. A ces différents titres, il eut vite conquis tous les suffrages et toutes les sympathies dans le cercle spirituel d'Arthenice, où il prenait à partie Balzac ou Sarasin, Ménage ou Voiture, Charleval ou l'abbé Cotin, et surtout Conrart et le formaliste Chapelain. Mais il ne pouvait consacrer à ces XIV aimables récréations que les pacifiques entr'actes de sa jeunesse active: la guerre ou la politique venaient trop tôt le rappeler en province ou à l'étranger, et le soupirant de Julie devait faire voyager sa passion que ces absences forcées ne faisaient qu'allumer davantage. Cependant, hâtons-nous de le dire, absent ou présent, M. de Sainte-Maure occupa toujours une place importante dans la société de la marquise de Rambouillet. Il s'était lié assez intimement avec Chapelain, dont il fut sans cesse le fidèle ami, et avait entrepris avec le père de la Pucelle une correspondance familière et suivie, à laquelle participaient quelquefois la marquise et sa fille, et tous les beaux esprits de l'endroit [10].
Montausier était-il à l'armée, la docte assemblée ne parlait que de sa bravoure et de ses actions d'éclat dans les campagnes auxquelles il prenait part; chacun se plaisait à vanter l'universel mérite de l'absent regretté, et l'après-dînée se passait le plus souvent à commenter sa dernière missive ou son nouveau sonnet.
De son côté, le pauvre exilé trouvait un grand adoucissement à sa tristesse dans les épîtres qui lui étaient adressées. C'étaient de longs et curieux bavardages, XV remplis des bruits du jour, des scandales à la mode, des ouvrages nouveaux, parmi lesquels le tendre amant savait si bien retrouver tous les coq-à-l'âne de la conversation de l'hôtel, qu'il parvenait à assister de loin aux agréables devis de la ruelle d'Arthenice.
Néanmoins, l'impatient jeune homme désirait vivement assurer les liens sacrés qui l'unirent par la suite à Julie d'Angennes. Cette dernière hésitait à contracter ce mariage: elle comprenait peu qu'on se donnât de sang-froid un maître, et répétait souvent qu'elle renoncerait le plus tard possible à sa chère liberté, qu'elle ne devait abandonner, en effet, dans les mains du marquis de Montausier, que quatorze ans plus tard.
Les choses en étaient là vers 1641, lorsque Montausier, dans ses loisirs justement acquis, réunit et fit écrire par Jarry les madrigaux de sa fameuse Guirlande, qu'il avait conçue et préparée bien avant que d'en couronner sa charmante fiancée.
Quoiqu'il existât déjà plusieurs recueils de poésies italiennes sous le nom de Guirlande [11], le galant baron sut donner à sa fantaisie un cachet de nouveauté et XVI d'originalité, qui surpassa les dons les plus merveilleux que l'amour ait pu faire éclore dans l'imagination des amants.
Ce manuscrit... Mais laissons, pour un instant, la parole à M. de Gaignères, l'auteur principal d'une Notice que la tradition a consacrée [12]. Charles Nodier, dans l'édition qu'il a donnée de la Guirlande, prétend qu'il y aurait quelque pédantisme à la remplacer par une autre; nous nous rangeons à l'avis de ce maître, et bien que la Notice en question soit assez confusément rédigée, nous nous contenterons de l'annoter et d'y ajouter les éclaircissements que nous croyons nécessaires.
XVII Nous reproduisons donc ici cette Notice sans en changer l'orthographe et dans toute son intégrité [13]:
LE dessein de cet ouvrage est un des plus ingénieux et des plus galants qu'on pût imaginer en ce genre. M. Huet l'a appelé le chef-d'œuvre de la galanterie et a vanté la magnificence de son exécution [14]. On peut dire qu'elle n'a été en rien inférieure au projet.
Il a pour auteur feu M. le duc de Montausier [15] qui l'envoya, le jour de la fête de Julie-Lucine [16] d'Angennes XVIII de Rambouillet [17], à cette charmante personne dont il devint l'époux après en avoir été longtemps l'amant [18].
Comme cette fête arrivoit dans un temps où la terre ne produit pas assez de fleurs au gré des amants [19], celui-ci suppléa à la stérilité de la saison par cette guirlande.
Ce manuscrit commence par huit feuillets. XIX
Les trois premiers sont en blanc. On lit au haut du recto du second le billet que l'abbé de Rothelin [20] écrivoit de sa main à M. de Boze [21], en lui faisant présent de ce beau livre:
Je prie M. de Boze de vouloir bien accepter le présent livre, et le placer dans son magnifique cabinet, comme une marque de ma tendre amitié.
L'abbé de Rothelin.
Le quatrième feuillet contient le titre.
Sur le cinquième est peinte une guirlande superbe, au milieu de laquelle on lit ces mots:
LA
GVIRLANDE
DE
IVLIE
Le sixième est encore en blanc.
Il y a sur le septième une miniature où l'on voit XX Zéphire entouré d'un nuage et représenté du côté gauche au côté droit du spectateur [22]. Il tient dans sa main droite une rose, et dans sa gauche la guirlande de fleurs [23], au nombre de vingt-neuf, qu'il souffle légèrement sur la terre pour qu'on puisse les reconnoître aisément [24].
Le huitième contient un madrigal intitulé: Zéphire à Ivlie.
Le corps de l'ouvrage vient ensuite; il est de quatre-vingt-dix feuillets, dont le premier est coté 6, et le dernier 95.
De ces quatre-vingt-dix feuillets, il y en a vingt-neuf qui contiennent chacun une fleur, et soixante et un qui contiennent chacun un madrigal [25].
XXI Ce volume est terminé par une table alphabétique qui n'est point du tout commode. Elle est dressée selon l'ordre des premières lettres de chaque madrigal, de là vient que le nom de la même fleur y est répété plusieurs fois, et qu'on n'y voit pas d'un seul coup d'œil toutes les pièces qui ont été faites sur elle [26].
Nous avons corrigé ce défaut en substituant à cette table défectueuse celle donnée par l'abbé Rive [27].
Sans vouloir enrichir le passé aux dépens du présent, il faut avouer qu'il seroit difficile aujourd'hui d'assembler un aussi grand nombre de beaux esprits et de poëtes célèbres qu'il s'en trouva alors pour immortaliser le nom de Julie.
La table qui contient les noms de tous ces poëtes, et que nous avons ajoutée à celle de l'abbé Rive, ne présente que les illustres fondateurs de l'Académie françoise, qui s'élevoit alors à l'hôtel de Rambouillet, en attendant XXII qu'elle reçût et sa forme et sa gloire du cardinal de Richelieu.
Mais quand on n'auroit pas appris par là qui sont ceux qui aidèrent à M. de Montausier à célébrer mademoiselle de Rambouillet, il seroit toujours facile de juger, par tant de poésies diverses et ingénieuses, que des esprits d'un ordre supérieur y ont eu part.
Ces poésies ou madrigaux ont été imprimés à Paris, en 1729 [28], à la suite de la Vie de M. de Montausier, rédigée par Nicolas Petit, jésuite, qu'on a confondu avec d'autres auteurs du même nom, dont les ouvrages sont annoncés dans la France littéraire, t. Ier, p. 361; t. II, p. 92, et Supplément, part. Ire, p. 167. L'on vient de réimprimer tout récemment [29] ces madrigaux avec la Vie de M. le duc de Montausier.
L'on apercevra aisément à la table des noms des auteurs, que M. de Montausier, comme amant, a composé un très-grand nombre de ces madrigaux. On ignore XXIII les raisons pour lesquelles il s'est caché quelquefois sous ces lettres: M. le M. de M. [30], ainsi que le marquis de Racan par celles de M. le M. de R. [31]; M. Conrart, que l'on peut appeler le père de l'Académie françoise, n'y est désigné que par M. C. [32].
Comme la baronnie de Montausier ne fut érigée en marquisat qu'en 1644 [33], trois ans après que la Guirlande de Julie fut présentée à mademoiselle de Rambouillet, XXIV l'on sera sans doute étonné que M. de Montausier ait pris le nom de marquis avant de l'être effectivement; mais on ne doit pas ignorer qu'il étoit très-commun que les gens de qualité prissent dans le monde le titre de marquis avant que la terre de leur nom fût érigée en marquisat [34]. Le frère aîné de M. le duc de Montausier, qui mourut en 1633 [35], avoit aussi porté le titre de marquis de Montausier.
Chapelain, fameux par l'attente de la Pucelle qui avoit par avance un nom qu'elle n'a pu soutenir quand elle a été au grand jour [36], fut un de ceux qui brilla le XXV plus en cette occasion. La fleur impériale dont il fit choix donna lieu à une allégorie fort spirituelle, sur laquelle roule toute la finesse de son madrigal [37].
En voici l'explication en deux mots:
Le grand Gustave étoit alors au plus haut période de sa gloire, et il en jouissoit sans rivaux, puisque personne ne pouvoit lui disputer celle d'être le plus fameux conquérant de son siècle. Mademoiselle de Rambouillet, juge très-capable du vrai mérite, ne parloit d'ordinaire de ce prince qu'avec éloge; elle avoit même son portrait dans sa chambre, et disoit toujours qu'elle ne vouloit point d'autre amant que ce héros [38].
Cela donna lieu à Chapelain de choisir pour sujet de son madrigal la fleur qu'on nomme impériale, qu'il suppose être Gustave ainsi métamorphosé qui vient lui rendre hommage et lui offrir de la couronner. Voiture, à qui cette fiction avoit sans doute paru très-noble, y fait allusion dans la lettre qu'il écrivit à mademoiselle de Rambouillet [39], au nom du roi de Suède, et qui commence: Voicy le lion du Nord, etc.
XXVI On a cru devoir cette explication en particulier à ceux qui verront ce livre, sans entrer dans le détail du reste, qui s'entend facilement, et l'on se contentera d'ajouter ici que Robert [40], célèbre peintre d'alors, fut chargé de peindre les fleurs dont il est enrichi, et que Nicolas Jarry [41], le plus fameux maître d'écriture de son temps, a XXVII écrit de sa main et les madrigaux et la table des auteurs.
Afin que rien ne manquât à embellir cet ouvrage, il fut relié par le Gascon, qui n'avoit pas d'égal en son art, et enrichi par le dehors et le dedans des chiffres de Julie-Lucine, afin que l'on sût d'abord à qui il étoit [42].
Tant que madame de Montausier a vécu, elle a conservé précieusement ce gage de la politesse et de l'amour de son mari pour elle. Étant morte, M. de Montausier en devint le dépositaire et le montroit avec plaisir à ses amis. De ses mains, il passa en celles de madame la duchesse d'Uzès, sa fille [43], qui savoit trop ce qu'il valoit pour ne pas le garder avec soin. Aussi ce ne fut qu'après sa mort que ce livre fut vendu par ses héritiers, comme une pièce qui ne méritoit pas leur attention. Un particulier l'acheta à l'intention de M. Moreau, premier valet de chambre de monseigneur le duc de Bourgogne, si XXVIII connu par son mérite et son bon goût, qui lui paya quinze louis d'or, valant alors deux cents livres; et depuis il a eu l'honnêteté de m'en faire un présent et de m'obliger à le prendre, croyant, avec raison, enrichir par là mon cabinet [44].
Nicolas Jarry, écrivain inimitable du dernier siècle, fit trois manuscrits de la Guirlande de Julie dans la même année 1641, savoir: un in-folio, un in-quarto et un in-octavo.
Le premier [45], annoncé dans le Catalogue des livres de M. le président Crozat de Tugny, Paris, 1751, p. 119, no 1316, n'étoit pas imprimé. C'est une erreur de ne pas l'avoir annoncé manuscrit. Il est de la propre main de Jarry, sur papier in-quarto, à longues lignes, et contient cinquante-trois feuillets très-bien écrits, en lettres bâtardes. Il paraît avoir été l'esquisse et le modèle de l'in-folio présenté à mademoiselle de Rambouillet. M. le marquis de Courtanvaux en a été ensuite possesseur. XXIX Il est passé, à sa vente, entre les mains de P. F. Didot, imprimeur de Monsieur [46].
Le second [47], très-précieux, sur vélin in-folio, qui a donné lieu à cette Notice, est supérieurement écrit en lettres rondes; les figures de toutes les fleurs, peintes par le fameux Robert, et la reliure magnifique, en maroquin rouge, de ce livre, orné, en dehors et en dedans, du chiffre entrelacé de J. L., ajoutent au très-grand mérite de cet ouvrage unique en son genre.
Il paraît qu'après M. de Gaignières, ce manuscrit passa entre les mains du chevalier de B***; il fut acheté, en 1726, à la vente de ses livres [48], par M. l'abbé de Rothelin, qui, comme on l'a vu plus haut, en fit présent quelque temps après à M. de Boze. M. de Cotte [49] l'acheta des héritiers de M. de Boze, avec une partie de sa bibliothèque, et le céda à M. Gaignat, à la vente XXX duquel il fut acheté par M. le duc de La Vallière [50]. M. Peyne, libraire de Londres, l'a payé, à la vente de ce dernier [51], quatorze mille cinq cent dix livres. Nous ignorons entre les mains de qui il est passé [52].
Le troisième et dernier manuscrit de la Guirlande [53] contient quarante feuillets sur vélin in-octavo, écrits en lettres bâtardes. Il ne renferme que les madrigaux XXXI seuls, sans aucune peinture. La reliure est la même que celle du manuscrit précédent (1641), parce qu'ils furent présentés, tous les deux en même temps, à mademoiselle de Rambouillet, par M. le duc de Montausier. L'on ignore absolument comment il est passé dans la bibliothèque de M. le duc de La Vallière [54]. M. G. Debure fils aîné, chargé de la vente de cette bibliothèque, l'a payé quatre cent six livres, et en est actuellement le possesseur [55] (1784).
Ce manuscrit peut être regardé comme le chef-d'œuvre de M. Jarry, parce qu'il excelloit encore plus dans les lettres bâtardes que dans les lettres rondes.
Nous croyons ne pouvoir mieux finir cette Notice XXXII qu'en rapportant le sonnet de Gilles Ménage, imprimé dans ses Miscellanea, Parisiis, 1652, in-4o, p. 124.
Sous ces ombrages verds la nymphe que j'adore,
Ce miracle d'amour, ce chef-d'œuvre des Dieux,
Avecque tant d'éclat vient d'ébloüyr nos yeux,
Que Zephire amoureux l'auroit prise pour Flore.
Son teint estoit plus beau que le teint de l'Aurore,
Ses yeux estoient plus vifs que le flambeau des Cieux,
Et sous ses nobles pas on voyoit en tous lieux
Les roses, les jasmins et les œillets éclore.
Vous qui, pour sa Gvirlande, allez cueillant des fleurs,
Nourrissons d'Apollon, favoris des neuf sœurs,
Ne les épargnez point pour un si bel ouvrage.
Venez de mille fleurs sa teste couronner:
Sous les pieds de Ivlie il en naît davantage
Que vos savantes mains n'en peuvent moissonner.
XXXIII Nous avons donné audience à M. de Gaignères pour la contexture et l'histoire des trois manuscrits de Jarry; complétons sa Notice par l'analyse succincte et aussi complète que possible des diverses copies et éditions de la Guirlande de Julie.
C'est le Recueil de Maurepas que nous citerons en premier lieu: Le volume I de ce Recueil manuscrit [57] contient une copie prise très-fidèlement, le 24 octobre 1715, sur le texte de l'in-8° de Jarry, appartenant alors à M. le duc d'Uzès.
En second lieu, dans un des manuscrits de Conrart [58] indépendant des deux collections connues de la bibliothèque de l'Arsenal, nous voyons une version très-incomplète des madrigaux de la Guirlande, parmi lesquels plusieurs pièces aussi anonymes qu'inédites se trouvent mêlées.
Ces deux copies manuscrites sont les seules dont nous ayons eu connaissance.
XXXIV Le recueil de Sercy [59] eut la gloire de mettre au jour les madrigaux imprimés de l'illustre Guirlande, mais c'est à l'édition de la Vie du duc de Montausier, parue en 1729 [60], que revient l'honneur d'une première impression conforme au texte de l'in-folio manuscrit.
Voici maintenant les éditions intégrales et successives de la Guirlande de Julie:
1° La Guirlande de Julie, offerte à Mlle de Rambouillet, Julie-Lucine d'Angènes, par M. le Marquis de Montausier. Paris, de l'Imprimerie de Monsieur, 1784, in-8° de 82 pages [61].
2° La Guirlande de Julie, offerte à Mlle de Rambouillet, Julie-Lucine d'Angènes, par M. le Marquis de Montausier, ornée de trente gravures dessinées et peintes par Mme Legendre. A Paris, chez XXXV Mlle Adèle Prudhomme, rue des Marais, no 18.—H. Nicole et Pelicier.—Imprimerie de Didot le jeune, 1818, in-18 carré, frontispice gravé, avec vignette [62].
3°La Guirlande de Julie, expliquée par de nouvelles annotations sur les madrigaux et sur les fleurs peintes qui la composent, par M. Amoreux, Dr Mn. Gabon et Cie, Montpellier et Paris, 1824, in-8° [63].
4° La Guirlande de Julie, offerte à Mlle de Rambouillet par M. de Montausier. Paris, N. Delangle, éditeur, 1826 (collection des Petits Classiques françois) [64].
XXXVI 5° La Guirlande de Julie pour Mlle de Rambouillet, Julie-Lucine d'Angennes. (Appendice de Précieux et Précieuses, par Ch. L. Livet. Paris, Didier et Cie, in-8o, 1859; 2e édition, in-12, 1870 [65]).]
La bibliographie de ce livre aussi recherché que curieux se termine ici; nous croyons avoir noté aussi consciencieusement que possible les faits les plus saillants qui ont rapport à cet ouvrage; nous avons parlé de ses manuscrits, de ses copies et de ses différentes réimpressions; revenons donc à son parrain et aux poëtes qui dans cette fête des madrigaux prirent part, sur le Parnasse, à la nombreuse cueillette des fleurs qui composèrent l'immortelle couronne.
Pendant son séjour à Paris, M. de Sainte-Maure, assidu à l'hôtel de Rambouillet, vivait dans la plus XXXVII parfaite intelligence avec les familiers de la marquise. C'étaient chaque jour assauts de sonnets, de rimes équivoques, d'épigrammes ou de rondeaux. Dans cette épicurienne demeure des Muses, l'esprit sans cesse était en sentinelle et l'impromptu sur le qui-vive, prêts à saisir la plus petite allusion ou le moindre prétexte pour lancer un bon mot, une espièglerie, un rien adorable. Aussi, lorsque l'occasion s'offrit à tous ces poëtes de faire leur cour à la princesse Julie, ce fut par un enthousiasme général et une pluie de fleurs qu'ils s'empressèrent d'y répondre.
L'ingénieuse conception de Montausier rallia vers un but unique les talents les plus opposés; les flèches du madrigal furent mises en commun dans le même carquois, la coquetterie de chacun fit trêve pendant quelque temps pour laisser paraître la galanterie d'un seul. Enfin, il se forma pour ce plan d'amour une association généreuse et spontanée, une union fidèle, une fraternelle solidarité.
Les jardins d'Apollon furent dévalisés. C'était à qui apporterait les plus belles fleurs ou en plus grand nombre [66], et Montausier vit venir à lui, tous animés du même zèle, Arnauld d'Andilly père et fils, Arnauld de Corbeville, Arnauld de Briotte, marquis de Pomponne; XXXVIII Chapelain, Colletet, Corneille, Desmarests de Saint-Sorlin, Godeau, Gombaud, Habert de Montmor; Habert, abbé de Cérisy; Habert, commissaire d'artillerie; Malleville, Martin de Pinchesne, Scudéry, Tallemant des Réaux, et jusqu'au vieux marquis de Rambouillet qui voulut, comme les autres, attacher son petit madrigal à la Guirlande de sa fille Julie.
Voiture seul manquait à l'appel: poëte trop grand seigneur, et amoureux pour son propre compte, il ne voulait pas être comparé. Il est vrai, à ce que dit Tallemant, «que les chiens de M. de Montausier et les siens n'ont jamais trop chassé ensemble [67]»; mais il est juste aussi d'ajouter que le grand épistolier voyageait alors en Espagne [68], et qu'il prit fièrement sa revanche plus tard par ses lettres et poésies à l'adresse de Mlle de Rambouillet et sa riche métamorphose de Julie en Diamant [69].
M. de Montausier composa seize madrigaux pour sa chère cruelle: l'amant, comme on le voit, avait fait au poëte la part du lion; mais la muse Erato XXXIX n'inspira pas toujours le poëte comme elle l'aurait dû, et, bien qu'il ait lutté sans trop de désavantage avec ses illustres émules, nous ne pouvons disconvenir que quelques-unes de ses fleurs manquent de coloris et paraissent maussades. L'Alceste de l'hôtel de Rambouillet ne fut pas toujours exempt de cet esprit alambiqué qui fit jaillir la pure critique de l'Alceste de Molière, et, de l'avis de Charles Nodier, l'Oronte de la comédie aurait trouvé place dans la Guirlande [70].
Claude de Malleville vient après Montausier par le nombre de madrigaux. L'heureux poëte de la Belle Matineuse, qui remporta le prix sur tous ses concurrents pour ce célèbre sonnet proposé au mérite [71], travailla sur treize fleurs de la Guirlande, dont neuf furent insérées dans le manuscrit original [72]; ses vers, galamment tournés, remplis de délicatesse et de douceur, sont dignes assurément de ses autres poésies.
Georges de Scudéry vient ensuite avec un bouquet XL de douze fleurs brillantes et diaprées, parmi lesquelles cinq seulement furent prises et conservées par Montausier. Ces pièces, du fécond auteur d'Alaric, sont empreintes d'une légère affectation, mais le sentiment qui les a dictées est sincère [73], et l'on reconnaît vite d'ailleurs, sous l'aimable tournure de ses madrigaux, le faire original du Poëte guerrier. Scudéry rima souvent pour la marquise de Rambouillet et la charmante Julie. Nous trouvons dans ses poésies, outre de longues stances à Arthenice [74], le sixain suivant sur le portrait de Mme de Montausier, peinte sur marbre en habillement de Pallas, par Stella [75]:
Cette taille, ce port et cette majesté,
Mieux que l'habillement, montrent la vérité
De ce que le pinceau nous a voulu dépeindre.
L'art icy n'a point voulu feindre,
Et sans doute, ayant tant d'appas,
Ou c'est IVLIE ou c'est PALLAS.
Après Scudéry, Pierre Corneille apparaît, modestement dissimulé derrière l'initiale C, et porteur de six XLI fleurs qu'on attribua faussement à Conrart [76]. Habitué de l'hôtel de Rambouillet, où de sa voix lente et monotone il donnait la première lecture de ses tragédies [77], et digne admirateur des vertus de Julie, l'auteur du Cid ne pouvait rester inactif dans ce tournoi galant: il abaissa donc mignardement son vers ample et sonore au ton madrigalesque, son style fier et élevé devint doucereux et fleuri, bref le grand tragique daigna changer sa manière et laissa gracieusement coqueter sa plume pour le chef-d'œuvre de Montausier.
Guillaume Colletet [78], au contraire, poëte bon vivant et madrigalier par tempérament, semble mal à l'aise et un peu guindé dans les quatre pièces qu'il écrivit pour la Guirlande. Sa muse, comme celle de Villon, s'abandonnait au débraillé, aux chansons à boire et aux sonnets grivois, et l'époux de Claudine, qui prenait XLII d'habitude ses divinités en bas lieu, dut se trouver cérémonieusement intimidé lorsqu'il eut à chanter la chaste beauté de Julie.
Philippe Habert, le commissaire de l'artillerie et l'auteur du Temple de la mort [79], attacha trois fleurs à la couronne poétique offerte à Julie: le Narcisse et deux Soucis. Ses madrigaux sont d'une finesse et d'une élégance remarquable, le troisième surtout, le plus connu après celui de Desmarests, est poussé dans le dernier galant:
Ne pouvant vous donner ni SCEPTRE, ni COURONNE,
Ni ce qui peut flatter les cœurs ambitieux,
Recevez ce SOUCY, qu'aujourd'huy je vous donne
Pour ceux que tous les jours me donnent vos beaux yeux.
Ce joli quatrain n'est-il pas d'un tour spirituel et d'une grâce parfaite!
Simon Arnauld, marquis de Pomponne [80], choisit XLIII avec délicatesse le Muguet, la Fleur de grenade et la Perce-Neige. Il traita avec goût ces trois sujets, qu'il signa du nom de De Briotte, sorte de pseudonyme dont le futur grand ministre ornait volontiers les productions poétiques de sa jeunesse.
D'Andilly le fils se décida pour le Soucy (sous le nom de Clytie) et la fleur de Thym; il se fit l'avocat de ces deux fleurs d'une manière si correctement adulatrice, que Julie d'Angennes dut prendre souvent plaisir à regarder le feuillet de vélin où elles s'épanouissaient dans leur élégance raffinée.
Desmarests, sieur de Saint-Sorlin [81], qu'on nommait le plus fou de tous les poëtes, et le meilleur poëte qui fût entre les fous, prouva, à l'occasion de la Guirlande, que s'il savait composer de longs et innombrables XLIV poëmes, il pouvait faire également de petits et délicieux madrigaux.—Il se présenta avec deux quatrains: l'un sur les Lys, l'autre sur la Violette; le premier d'un charme agréable, mais peut-être équivoque; le second tendrement expressif et d'un mouvement si emblématiquement vrai, qu'il l'emporte en franche beauté sur tous les autres madrigaux du recueil de Montausier. Il est impossible d'exprimer une prétention plus noble sous une forme aussi humblement séduisante. La Violette de Desmarests a conservé sa fraîcheur et son parfum délicat. Elle brille encore aujourd'hui dans tout son éclat, et la coquette petite fleur demeurera assurément immortelle dans notre poésie comme un parangon symbolique de grâce modeste et de timide hardiesse.
Le père Le Moyne [82], auteur du poëme héroïque de XLV Saint Louis, fit par la suite une si ingénieuse Métamorphose de la Violette, que nous n'hésitons pas à la citer comme une charmante paraphrase du quatrain de Desmarests.
La voici:
L'humble et timide violette
Craint de montrer aux yeux du jour
L'infortune de son amour,
Depuis la faute qu'elle a faite.
Sans ajustement et sans fard,
Elle n'emprunte rien de l'art:
Son habit est simple et modeste,
Et son visage sans couleur,
Dans le repentir qui lui reste,
En fait un voile à sa douleur.
Sans avoir l'attrait ni la forme succincte du madrigal de Desmarests, l'œuvre du père Le Moyne est assez gracieuse pour figurer à sa suite.
Habert, l'abbé de Cérisy [83], celui-là même qui sut traiter avec un goût achevé un poëme d'environ 700 vers sur la métamorphose des yeux de Philis en Astres, pouvait d'autant plus aisément se faire l'interprète de la Rose et du Narcisse en faveur de Julie.—Il XLVI prêta à ces deux fleurs un langage de piquante courtoisie, qui, dans son exquise politesse, laisse percevoir le genre d'esprit de cet excellent écrivain.
La majesté des Lys tenta par deux fois Martin, sieur de Pinchesne [84], qui fit deux madrigaux sur ces fleurs royales.—Ce poëte ne fut pas divinement inspiré en cette occurrence, mais on ne saurait le juger sur cette œuvre de civilité: les Muses ne répondent pas toutes les fois qu'on les appelle, et le neveu de Voiture déploya assez de talent par la suite pour qu'on puisse le considérer comme le plus injustement négligé parmi les oubliés du XVIIe siècle.—De Pinchesne fut un des chantres les plus fidèles des beautés de Julie, et après la mort de Madame de Montausier il gravait encore sur son tombeau le sonnet suivant:
Tout ce qui peut rester d'une brillante vie,
Quand la mort en a mis la dépouille au tombeau,
Reste encore de Julie en un estat si beau
Qui d'honneurs immortels rend sa perte suivie.
Son âme, aux lois du temps cessant d'être asservie,
Ne se ferme aux rayons du céleste flambeau
Que pour s'ouvrir au jour d'un autre tout nouveau,
Dont elle est dans la gloire heureusement ravie.
Tandis que ses beaux ans furent en leur esté,
Jamais tant de vertu, d'esprit et de clarté
N'ont rendu parmi nous un mérite célèbre.
Ses beaux ans ne sont plus, mais son nom vit toujours,
Et la nuit ny l'oubli de l'empire funèbre
Jamais sous le soleil n'en borneront le cours.
Il nous reste à noter les huit poëtes qui, bornant leur ambition à un seul madrigal, choisirent avec recherche, sur les fertiles coteaux de l'Hélicon, la fleur unique dont ils devaient orner le front de Julie.
Commençons par Chapelain [85] et son altière Couronne Impériale, qui fut si goûtée à l'hôtel de Rambouillet. M. de Gaignères parle assez longuement dans XLVIII sa Notice du sujet allégorique traité dans ce madrigal; nous ne jugerons donc que l'œuvre en elle-même.—Chapelain s'était si puissamment imposé à son époque, avant la pénible apparition de son poëme, que de fait il ne pouvait être médiocre. Les quelques pièces qu'il donnait en à-compte sur son colossal chef-d'œuvre, étaient saisies, admirées, exaltées avec une telle passion, que c'eût été un crime de ne pas s'extasier.—Aujourd'hui nous pouvons considérer la Couronne Impériale avec un sens plus rassis et exempt de ce prisme d'enthousiasme qui fit regarder le créateur de la Pucelle comme le premier poëte du monde, et, à l'avouer franchement, le madrigal de Chapelain nous semble légèrement boursouflé et d'une allure un peu trop majestueuse pour l'harmonie générale et l'ensemble bien caractérisé de la Guirlande.
Godeau [86], par contre, trouva pour sa Tulipe une forme fraîche et idyllique; il donna à son vers l'élégance et le tour agréable de la pastorale, et le madrigal du Nain de la princesse Julie est si honnêtement XLIX troussé et d'une physionomie si colorée que l'on s'étonne, en le regrettant, que M. de Vence ait presque exclusivement consacré son talent à rimer des psaumes et à versifier des méditations chrétiennes et des églogues sacrées.
D'Andilly le père [87] drapa royalement ses Lys, sous son inspiration. Ils dressent noblement la tête et donnent à Julie, dans un langage pompeux, les marques de la plus haute courtoisie.
Le vieux Gombaud [88], en vétéran du madrigal, paya d'un fier et magistral quatrain sur l'Amaranthe, les bontés et les douces attentions que les Rambouillet lui prodiguaient dans sa fortune adverse.
L'auteur des Historiettes, le calomniographe Tallemant des Réaux [89], montra un échantillon de son savoir-faire galant dans un madrigal sur les Lys, et il L s'en tira assez délicatement pour recevoir tous les éloges.
Arnauld de Corbeville [90] emprunta le pinceau de Flore pour donner le plus vif coloris et les tons les plus fins à la fleur qu'il cueillit; sa Tulipe, superbe d'éclat, reste l'emblème du plus parfait amour sous la forme la plus élégante.
Habert de Montmor [91] eut le choix original; il rima sur une robuste mais modeste petite fleur: La blanche Perce-Neige prêta à l'imaginative de l'auteur une grâce et un esprit qui font de son madrigal un des plus réussis de la Guirlande.
Le marquis de Rambouillet [92] enfin, qui n'était assurément pas le courtisan ordinaire des Muses, essaya, pour la première fois peut-être, de les invoquer, afin de couronner son admirable fille. A travers la métamorphose de l'Hyacinthe qu'il choisit, il trouva matière à LI un aimable sixain, assez agréablement tourné pour faire honneur à un poëte de profession.
Avec le père de la princesse Aminte se termine notre étude sur la Guirlande. Nous aurions pu étendre cette Notice, l'augmenter de nombreuses pièces, y joindre des poésies à la louange de Julie, et faire ressortir davantage la flore de chaque madrigal; mais nous avons craint d'alourdir de trop de plomb le fragile canevas sur lequel se joue, en légères arabesques, la délicatesse des plus doux madrigaux.
Nous avons reproduit avec une grande exactitude, l'orthographe de la Guirlande de Julie, extrêmement surannée même pour l'époque où elle fut calligraphiée par le célèbre Jarry. Après avoir revu sur tous les textes connus le texte original de l'œuvre de Montausier, nous en avons minutieusement recueilli les variantes pour les placer à la fin de ce volume, et, sans vouloir parler du luxe typographique dont nous entourons cette réimpression, nous croyons, grâce aux sérieuses études auxquelles nous nous sommes livré, donner une édition justement recommandable par sa clarté, ses annotations, ses documents inédits et les soins scrupuleux que nous avons apportés dans les plus petits détails.
La Guirlande de Julie devait figurer dans notre collection des Poëtes de ruelles au XVIIe siècle.—Le concours de tant de brillants esprits, réunis pour une LII œuvre si fameuse qu'elle est, en quelque sorte devenue classique, est d'un vif attrait pour la savante curiosité des lettrés.—Nous ne prétendons pas cependant présenter au public un chef-d'œuvre littéraire: ces petites pièces de poésie, ainsi que nous le fait remarquer un bibliographe judicieux, ont un mérite assez mince quand on les considère séparées des peintures pour lesquelles elles ont été faites, et privées d'une circonstance unique dans l'histoire de la galanterie; mais, en souvenir et pour le respect que nous portons à Mlle de Rambouillet, la Guirlande de la princesse Julie restera toujours le livre de l'imagination la plus française, l'Anthologie galante la plus précieuse de notre littérature, et comme un monument d'illustre courtoisie, à cette époque admirable et de suprême politesse où le talent tenait à honneur de couronner dignement et de fleurs immortelles la vertu, le mérite et la beauté.
OCTAVE UZANNE.
LA
GVIRLANDE
DE
IVLIE,
pour
Mademoiselle de Rambouillet,
IVLIE-LVCINE
D'ANGENNES.
Escript par N. Jarry.
1641
ZEPHIRE A IVLIE [1].
Madrigal.
RECEVEZ, ô Nymphe adorable,
Dont les cœurs reçoiuent les loix,
Cette Covronne, plus durable
Que celle que l'on met sur la teste des Roys.
Les Fleurs dont ma main la compose
Font honte à ces Fleurs d'or qu'on voit au Firmament;
L'eau dont Permesse les arrose
Leur donne vne fraîcheur qui dure jncessamment:
Et tous les jours ma belle Flore,
Qui me chérit et que i'adore,
Me reproche, auecque courroux,
Que mes soupirs iamais pour elle
N'ont fait naistre de Fleur si belle
Que i'en ay fait naistre pour vous.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
I E suis ce Prince glorieux
De qui le bras victorieux
A terracé l'orgueil d'vn redoutable Empire.
Au plus froid des climats je me sentis brusler
Par vn nouueau Soleil que l'vniuers admire,
Et que celuy des Cieux ne sçauroit égaler.
Du riuage inconnu de l'aspre Corélie,
Où la mer sous la glace est toute enseuelie,
Le flambeau de l'Amour mes voiles conduisant,
Ie vins pour rendre hommage à l'auguste Ivlie;
Mais, iugeant ma Couronne vn indigne présent,
Ie voulus conquérir le riche Diadême
Dont iadis les Cæsars en leur pompe suprême
Eurent le front si reluisant.
Au comble d'vn succés qui les peuples étonne,
Vainqueur des ennemis et vaincu du malheur,
Ie rencontray la mort dans le champ de Bellonne.
L'Amour vid mon désastre, et, flattant ma douleur,
Me conuertit en vne illustre Fleur
Que de l'Empire il nomma la Covronne.
Ainsi ie fus le prix que cherchoit ma valeur,
Ainsi par mon trépas i'acheuay ma conqueste.
En cet état, Ivlie, accorde ma requeste,
Sois pitoyable à ma langueur;
Et si ie n'ay place en ton cœur,
Que ie l'aye au moins sur ta teste.
De M. CHAPELAIN.
7
LA COVRONNE IMPERIALE.
Madrigal.
BIEN que de la Rose et du Lys
Deux Roys, d'éternelle mémoire,
Facent voir leurs fronts embellis,
Ces Fleurs sont moindres que ta gloire;
Il faut vn plus riche ornement
Pour récompenser dignement
Vne vertu plus que Royale;
Et si l'on se veut acquitter,
On ne peut moins te présenter
Qu'vne Covronne imperiale.
De M. DE MALLEVILLE.
8
LA COVRONNE IMPERIALE[3].
Madrigal.
QVELQVE diuersité que le parterre étale,
Ie me treuve sans effroy:
La Covronne imperiale
Est seule digne de toy.
Tant de Fleurs que la nature
Esmaille de sa peinture
N'ont rien qu'on doiue estimer.
Voy l'éclat qui m'enuironne:
Moy seule fais la Covronne
Que tant d'autres ensemble ont peine de former.
De M. DE Scudery.
ALORS que ie me voy si belle et si brillante,
Dans ce teint dont l'éclat fait naistre tant de vœux
L'excés de ma beauté moy-même me tourmente;
Ie languis pour moy-même, et brusle de mes feux,
Et ie crains qu'aujourd'huy la Rose ne finisse
Par ce qui fit iadis commencer le Narcisse.
De M. CHABERT, abbé de CÉRISY.
DEVANT ce teint d'vn beau sang animé,
Ie ne parois que pour ne plus paroistre;
Ie n'ay plus rien de ce lustre enflamé
Que de Vénus le sang auoit fait naistre.
Le vif éclat de ce teint nompareil
Me fait paslir, accuser le Soleil,
Seicher d'enuie et languir de tristesse.
O sort bizarre! ô rigoureux effet!
Ce qu'a produit le sang d'vne Déesse,
Le sang d'vne autre aujourd'huy le défait.
De M. DE MALLEVILLE.
ASSISE en majesté sur vn Throsne d'épines,
Ie porte le Sceptre des Fleurs,
Qui cédent à l'éclat de mes grâces diuines,
Quand l'Aurore au matin m'arrose de ses pleurs;
Mais, beauté que le monde adore,
Et qui sçais doucement rauir,
I'estime beaucoup plus l'honneur de vous seruir
Que celuy de régner dans l'Empire de Flore.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
SI vous n'auiez banny l'ardeur démesurée
Qui du cœur des mortels fait triompher l'Amour,
Ma beauté prés de vous seroit mal assurée:
Aux chaleurs de l'esté ie ne dure qu'vn jour.
Mais vn sort plus heureux en ce lieu m'enuironne:
Le temps, dont le pouuoir de toute chose ordonne,
Par vos charmes puissans se trouue surmonté;
I'ay de vous obtenu la faueur desirée,
Et sur vostre visage, où règne la beauté,
Ie suis d'éternelle durée.
De M. COLLETET.
QVOY que la Fable nous raconte,
Iamais la Reine d'Amathonte
Ne changea ma couleur ni mon lustre ancien.
Si quelque trait de flame à ma neige s'allie,
C'est de honte que i'ay que le teint de Ivlie
Est estimé plus frais et plus beau que le mien.
De M. C OLLETET.
I E consacre, Ivlie, vn Narcisse à ta gloire;
Luy-mesme des beautez te céde la victoire.
Estant iadis touché d'vn amour sans pareil,
Pour voir dedans l'eau son image,
Il baissoit toujours son visage,
Qu'il estimoit plus beau que celuy du Soleil.
Ce n'est plus ce dessein qui tient sa teste basse;
C'est qu'en te regardant, il a honte de voir
Que les Dieux ont eu le pouuoir
De faire vne beauté qui la sienne surpasse.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
I E suis ce Narcisse fameux
Pour qui iadis Echo répandit tant de larmes,
Et de qui les appas ne cédent qu'à vos charmes,
Qui viens pour vous offrir mes vœux.
Qu'on m'accuse, belle Ivlie,
D'auoir en ce dessein plus de temerité
Que ie n'eus iamais de folie
Adorant ma propre beauté,
Ie ne puis m'empescher de commettre ce crime,
Ie le trouue trop glorieux.
Oyez donc ce discours que ma pasleur exprime,
Et qui ne s'entend que des yeux:
Si vous me voyez le teint blesme,
Ce n'est plus moi, c'est vous que i'ayme.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
E PRIS de l'amour de moy-même,
De Berger que i'estois ie deuins vne Fleur;
Faites proffit de mon malheur,
Vous que le Ciel orna d'vne beauté suprême;
Et pour en euiter les coups,
Puisqu'il faut que tout ayme, aymez d'autres que vous.
De M. HABERT, cap. de l'artillerie.
QVAND ie voy vos beaux yeux si brillans et si doux,
Qui n'ont plus desormais rien à prendre que vous,
Leur éclat m'est suspect, et pour vous i'appréhende.
Souuent ce riche don est chérement vendu:
Je sçay que ma beauté ne fut jamais si grande,
Et pourtant chacun sçait comme elle m'a perdu.
De M. CHABERT, abbé de CÉRISY.
IE suis la Fleur d'Amour, qu'Amaranthe on appelle,
Et qui viens de Ivlie adorer les beaux yeux.
Roses, retirez-vous, i'ay le nom d'Immortelle!
Il n'appartient qu'à moy de couronner les Dieux.
De M. DE GOMBAUD.
RECEVEZ mon service, adorable Ivlie,
Seule que la nature a fait naistre accomplie.
Ah! que i'estimeray mon destin glorieux,
Si vôtre belle main sur vos cheueux m'applique!
Ie suis fauorite des Cieux,
Ie porte le nom d'Angeliqve;
Mais ie n'ignore pas qu'au jugement de tous,
Ie la suis beaucoup moins que vous.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
QVAND toutes les Fleurs prennent place
Sur l'yuoire de vôtre front,
Il faut par raison que ie face
Ce que par audace elles font;
Et certes, si la voix publique
Me nomme par-tout Angeliqve,
Et me donne tant de renom,
Ie répons mal à ses louanges,
Et ne mérite plus mon nom,
Si ie ne couronne les Anges.
De M. DE MALLEVILLE.
BIEN que dans l'Empire des Fleurs
I'espere emporter la Couronne
Dessus toutes mes autres sœurs,
Au moins si la beauté la donne,
Deuant ton teint vif et vermeil,
De qui l'effet, plus grand que celuy du Soleil,
Des cœurs les plus gelez fond la plus dure glace,
Mon éclat se ternit et mon lustre s'efface;
Mais dessus tes cheueux ie reprens ma beauté,
Et i'emprunte de toy ce que tu m'as osté.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
SANS beauté, sans grandeur, sans éclat et sans grace,
Ie nays, par un arrest de mon jniuste sort,
Incapable d'vn bel effort
Pour acquérir l'illustre place
Où mon ambition m'ose faire aspirer.
Toutesfois, ô belle Ivlie,
Si de tes doux regards tu daignes m'éclairer,
Ie renaistray par eux de tant d'attraits remplie
Que i'auray suiet d'espérer
De rendre ta Covronne et ma gloire accomplie.
Sois donc fauorable à mes vœux,
Embellis ma laideur, releue ma bassesse,
Des Destins montre-toy maîtresse,
Metz-moy, malgré leur haine, en vn état heureux.
La Nature, pour moy non moins barbare qu'eux,
En vain t'oppose ses obstacles;
Tes beaux yeux chaque iour font de plus grans miracles.
De M. D'ANDILLY le filz.
CAVSE de tant de feux, source de tant de pleurs,
Ivlie, accorde ma requeste;
Comme à toutes ces autres Fleurs,
Donne-moy place sur ta teste:
Deuant le lustre de mon teint
L'éclat des plus beaux Lys s'éteint;
Par tout ailleurs ie leur fais honte;
Seulement dans ton sein leur blancheur me surmonte.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
IE m'offre à vous, belle Ivlie,
Mais ne refusez pas mes vœux;
La Covronne qu'on met dessus vos beaux cheueux
Sans moy ne peut estre accomplie.
Ie dois entre les Fleurs tenir le premier rang;
On ne sçauroit cueillir que parmy les épines
Cette Fleur que Vénus fit naistre de son sang,
Et ie n'en mesle point à mes beautez diuines;
Mais l'éclat de votre beauté
M'accuse de temerité,
Ie céderai toujours aux Roses,
Tandis qu'elles seront sur vôtre teint écloses.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
FRANCHE d'ambition, ie me cache sous l'herbe,
Modeste en ma couleur, modeste en mon séiour;
Mais si sur vostre front ie me puis voir vn jour,
La plus humble des Fleurs sera la plus superbe.
De M. DES MARESTZ.
DE tant de Fleurs par qui la France
Peut les yeux et l'ame rauir,
Vne seule ne me deuance
Au juste soin de te seruir.
Que si la Rose en son partage
Fait gloire de quelque auantage
Que le Ciel daigne luy donner,
Elle a tort d'en estre plus fiére,
I'ay l'honneur d'estre la premiére
Qui naisse pour te couronner.
De M. DE MALLEVILLE.
MERVEILLE de nos jours, dont les charmes vainqueurs
Rauissent les esprits et regnent dans les cœurs,
Rare present du Ciel, adorable Ivlie;
Lors que toutes les Fleurs d'vn email precieux
Viennent rendre à l'enuy ta Covronne embellie,
C'est sur moy que tu dois arrester tes beaux yeux.
De la Reyne de l'air ie suis la fleur diuine,
Ma blancheur de son lait tire son origine,
Il se fait voir encor sur mon teint sans pareil;
Et le Dieu dont les loix forment la destinée
Veut que le plus grand Roy qu'éclaire le Soleil
Ayt de moy seulement la teste couronnée.
Au temple de Thémis ie preside auec luy;
Son Throsne glorieux est mon illustre appuy;
La valeur de ce Mars fait pour moy des miracles,
Et ie dois espérer que par son bras puissant
S'accompliront bien-tôt les celebres oracles
Qui me promettent place au dessus du Croissant.
Mais parmy ces grandeurs, le bruit de ton merite
A me donner à toy si fortement m'jnuite,
Que ie veux de ma gloire enrichir ta beauté.
En vain toutes les Fleurs, dans leur pompe suprême
Se vantent de t'orner d'vn Royal Diadême,
Leur plus superbe éclat n'a point de majesté.
Nulle autre que le Lys sans audace n'aspire
A te rendre vn honneur qui soit digne de toy:
Elles parent ton front, et ie t'offre vn Empire,
Puis qu'en te couronnant, ie t'égale à mon Roy.
De M. D' ANDILLY.
LE plus ardent de tous mes vœux
Est de couronner tes cheueux,
Et ie croy, si ie ne me flatte,
Que ie puis aspirer à cet honneur nouueau;
Car par moy ton visage est beau,
Et par moy de nos Roys le Diadême éclatte:
Mais i'ay plus de gloire cent fois,
Et ie tire plus d'auantage
D'éclatter dessus ton visage
Que dessus la teste des Roys.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
REÇOY les Lys que ie te donne,
Pour en former vne Couronne
Par qui ton pouuoir soit dépeint;
C'est l'ornement que ie t'apreste:
Pour rendre ce qu'on doit aux Lys de ton beau teint,
Il t'en faut mettre sur la teste.
De M. DE MALLEVILLE.
DEVANT vous je pers la victoire
Que ma blancheur me fit donner,
Et ne preten plus d'autre gloire
Que celle de vous couronner.
Le Ciel, par vn honneur insigne,
Fit choix de moy seul autres fois,
Comme de la Fleur la plus digne
Pour faire vn present à nos Roys.
Mais si i'obtenois ma requeste,
Mon sort seroit plus glorieux
D'estre monté sur vôtre teste
Que d'estre descendu des Cieux.
De M. DES REAUX-TALLEMANT.
IE puis mettre, entre les louanges
Qui me rendent si glorieux,
D'auoir fleury dedans les Cieux,
Cultiué de la main des Anges;
Mais, certes, c'est y retourner
Que de vous pouuoir couronner.
De M. MARTIN.
QVE i'ay de gloire à cette fois,
Que j'ombrage ces belles tresses!
Ie ne couronnois que les Roys,
Et ie couronne les Déesses.
De M. MARTIN.
VN diuin oracle, autres fois,
A dit que ma pompe et ma gloire
Sur celle du plus grand des Roys
Pouuoit emporter la victoire;
Mais si i'obtiens, selon mes vœux,
De pouuoir parer vos cheueux,
Ie dois, ô Ivlie adorable,
Toute autre gloire abandonner,
Car nul honneur n'est comparable
A celuy de vous couronner.
De M. C... (?)
BELLE, ces Lys que ie vous donne,
Auront plus d'honneur mille fois
De seruir à vôtre Covronne
Que d'estre couronnez aux armes de nos Roys.
De M. DES MARETZ.
IE fus vn Berger, autres fois,
Qui, poussé d'vne belle audace,
Alla cueillir dessus Parnasse
Des lauriers plus fameux que les lauriers des Roys.
Ce genereux desir d'vne éternelle gloire
Ne m'empécha pas de seruir
Auec les Filles de Mémoire
Les mortelles beautez qui me sceurent rauir.
Mais mon âme fut si volage,
A tant d'obiets diuers elle rendit hommage,
Et les bergeres si souuent,
En me reprochant leurs caresses,
Se plaignirent que mes promesses
Se perdoient parmy l'air dessus l'aile du vent,
Qu'Amour vint d'vne main puissante
Me transformer en cette Fleur,
Qui, comme i'eus l'ame inconstante,
Est inconstante en sa couleur.
Miracle de nos iours, si mes yeux t'eussent veuë
Avec tous ces appas dont le Ciel t'a pourueuë,
Mon cœur n'eut point esté leger;
Mais mon sort me console, et pour ma gloire ordonne,
Depuis que i'ay l'honneur d'embellir ta Covronne,
Que mes viues couleurs ne pourront plus changer.
De M. GODEAU.
IE suis le plus brillant ouurage
Dont le pinceau de Flore embellit les estez,
Et sur les autres Fleurs i'ay le même auantage
Qu'a le feu de tes yeux sur les autres clartez.
Mais dans l'éclat qui m'enuironne,
Et qui de cent couleurs reléue mes beautez,
La gloire que le Ciel me donne,
D'estre vne fleur de ta Covronne,
A pour moy de si doux appas,
Que, bien que de ma mort ma gloire soit suiuie,
Pour mourir d'vn si beau trépas,
J'ayme mieux la mort que la vie.
De M. ARNAUD DE CORBEVILLE.
BEL Astre à qui je dois mon estre et ma beauté,
Ajoûte l'jmmortalité
A l'éclat nompareil dont ie suis embellie;
Empêche que le temps n'efface mes couleurs:
Pour Throsne donne-moy le beau front de Ivlie;
Et si cet heureux sort à ma gloire s'allie,
Ie seray la Reyne des Fleurs.
De M. C. (CORNEILLE.)
PERMETTEZ-MOY, belle Ivlie,
De mesler mes viues couleurs
A celles de ces rares Fleurs,
Dont vôtre teste est embellie:
Ie porte le nom glorieux
Qu'on doit donner à vos beaux yeux.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
DANS la Fable, ni dans l'Histoire
Il ne se parle point de moy;
Je ne me puis vanter de posséder la gloire
De descendre du sang ni d'vn Dieu ni d'vn Roy:
Mais la passion véritable
Que vous témoigne ma couleur,
Plus qu'vne plus illustre Fleur
Me doit rendre recommandable.
O beauté qu'on doit adorer!
Permettez-moy de vous parer,
Et ie m'estimeray cent fois plus glorieuse
Que celle dont l'histoire est cent fois plus fameuse.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
IE n'ay plus de regret à ces armes fameuses
Dont l'jniuste refus précipita mon sort;
Si ie n'ai possedé ces marques glorieuses,
Vn destin plus heureux m'accompagne à la mort;
Le sang que i'ay versé d'vne illustre folie
A fait naistre vne Fleur qui couronne Ivlie.
De M. le M. DE R. (marquis DE RAMBOUILLET).
DEPVIS mon changement, tout l'Vniuers remarque
Que d'vn triste et muet discours
Ie me plains qu'en mes plus beaux jours
I'ai ressenti la rigueur de la Parque;
Mais ie cesse de murmurer;
Car l'extrême plaisir que i'ai de te parer
Efface maintenant la plainte
Que mes feuilles portoient empreinte.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
D 'VN éternel bon-heur ma disgrace est suiuie;
Ie n'ai plus rien en moy qui marque mon ennuy,
Autres fois vn Soleil me fit perdre la vie;
Mais vn autre Soleil me la rend aujourd'huy.
De M. C. (?)
A ce coup, les Destins ont exaucé mes vœux;
Leur bonté me permet de parer les cheueux
De l'jncomparable Ivlie;
Pour elle, Apollon, ie t'oublie,
Ie n'adore plus que ses yeux.
C'est auecque leurs traits qu'Amour me fait la guerre;
Ie quitte le Soleil des Cieux,
Pour suiure celuy de la terre.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
SI l'on vous donne vn Lys, vn Œillet, vne Rose,
Ie vous veux présenter aussy
Vn triste et languissant Sovcy:
Le sort ne me laisse autre chose.
Ie souffre vne telle douleur
De vous offrir la moindre Fleur,
Qu'on verra dans vôtre Covronne
Que ie deuiens ce que ie donne.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
FAVT-IL donc que la Rose ait sur moy l'auantage
D'étaler ses beautez dessus vôtre visage,
D'y charmer tous les cœurs et d'y donner des loix?
Luisez, Astre viuant, dessus ma dernière heure,
Vne jalouse ardeur ordonne que ie meure,
Pour vn second Soleil, vne seconde fois.
De M. HABERT, C... de l'artillerie.
NE pouuant vous donner ni Sceptre, ni Couronne,
Ni ce qui peut flatter les cœurs ambitieux,
Receuez ce Sovcy, qu'aujourd'huy ie vous donne,
Pour ceux que tous les jours me donnent vos beaux yeux.
De M. HABERT, C... de l'artillerie.
QVOY que tu sois pourueu d'vn éclat nompareil,
Ce n'est pas de ton feu que ie suis embellie;
Si ie suis la Fleur du Soleil,
C'est du Soleil qui luit dans les yeux de Ivlie.
De M. COLLETET.
IADIS les rigueurs du Soleil
Me coûtérent la vie;
I'attens vn accident pareil
A cause que i'ai même enuie;
Mais il m'importe peu qu'elle me soit rauie,
Puis-que, même après le trépas,
Ie sçay l'art de suiure ses pas.
De M. DE SCUDERY.
MORTELS, qu'on ne m'accuse pas
D'estre jnfidéle, ni volage,
Bien qu'vn miracle de cet âge
Ait pris mon âme en ses appas;
Ie puis sans crime, et sans folie,
Cherir cet objet nompareil;
Aymer Apollon, ou Ivlie,
C'est toujours aymer le Soleil.
De M. DE MALLEVILLE.
IE suis l'Amante, et l'Image
De l'Astre étincellant qui regne dans les Cieux,
Et ie puis sans orgueil prétendre l'auantage
De parer son front glorieux;
Mes riualles ont eu l'audace,
Dans leur plus superbe appareil,
De t'oser demander ma place;
Mais, jncomparable Soleil,
Plus digne de mes vœux que celuy qu'on adore
Nulle dans l'Empire de Flore
Ne me peut disputer cet honneur sans pareil.
Ie n'exalte point ma naissance,
Ie ne vante point mes appas;
Pour conceuoir cette espérance,
I'ay ce que les autres n'ont pas:
De rayons éclattans ie suis enuironnée;
Telle est ma destinée,
Que tu ne peux qu'à moy cette gloire donner:
Qui pourroit, qu'vn Soleil, vn Soleil Couronner?
De M. D'ANDILLY le filz.
VOVS qui suiuez l'Amour, dont le feu vous égare,
Ne jettez point les yeux sur vn obiet si rare;
C'est auecque respect qu'il en faut approcher:
Quoy que de ses beautez vôtre âme soit blessée,
Apprenez que les mains n'ont pas droit d'y toucher,
Et que cet heur n'est deu qu'à la seule Pensée.
De M. COLLETET.
LORS que, pressé de mon deuoir,
Ie veux t'offrir vne Gvirlande,
Ta beauté m'oste le pouuoir
D'accomplir ce qu'il me commande;
Ce qui te la fait mériter
Empesche que tu ne l'obtiennes:
Ton beau teint ne peut supporter
D'autres merueilles que les siennes;
Par luy la Rose est sans couleur,
Les Œillets ont perdu la leur,
Les Tulipes sont effacées,
Les Lys n'ont plus de pureté;
Et pour toy rien ne m'est resté
Que des Sovcys et des Pensées.
De M. DE MALLEVILLE.
DV palais d'emeraude où la riche Nature
M'a fait naistre et regner auecque maiesté,
Ie viens pour adorer la diuine beauté
Dont le Soleil n'est rien qu'vne foible peinture.
Si ie n'ay point l'éclat ni les viues couleurs
Qui font l'orgueil des autres Fleurs,
Par mes douces odeurs ie suis plus accomplie,
Et par ma pureté plus digne de Ivlie.
Ie ne suis point suiette au fragile destin
De ces belles infortunées
Qui meurent dès qu'elles sont nées,
Et de qui les appas ne durent qu'vn matin;
Mon sort est plus heureux, et le ciel fauorable
Conserue ma fraîcheur et la rend plus durable.
Ainsi, charmant objet, rare présent des Cieux,
Pour mériter l'honneur de plaire à vos beaux yeux,
I'ai la pompe de ma naissance,
Ie suis en bonne odeur, en tout temps, en tous lieux,
Mes beautez ont de la constance,
Et ma pure blancheur marque mon jnnocence;
I'ose donc me vanter, en vous offrant mes vœux,
De vous faire moy seule vne riche Couronne,
Bien plus digne de vos cheueux
Que les plus belles Fleurs que Zéphire vous donne.
Mais si vous m'accusez de trop d'ambition,
Et d'aspirer plus haut que ie ne deurois faire,
Condamnez ma présomption,
Et me traittez en temeraire;
Punissez, i'y consens, mon superbe dessein
Par une seuére défense,
De m'éleuer plus haut que iusqu'à vôtre sein,
Et ma punition sera ma récompense.
De M. C. (Corneille).
IE viens m'offrir à vous pour parer vos cheueux,
Diuin obiet de mille vœux,
Par qui toute ame est enflammée;
La Nature, Mere des Fleurs,
Pour me distinguer de mes sœurs,
De langues m'a toute formée;
Mais, aymable Ivlie, il le faut auouër,
Ie n'en ay pas encore assez pour vous louër.
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
IE ne croy pas que ces Gvirlandes,
Dont chacun vous fait des offrandes,
Conseruent toutes leurs couleurs;
Si votre bel œil les éclaire,
Ie m'attens bien de luy voir faire
Des Flambes de toutes les Fleurs.
De M. DE MALLEVILLE.
PARMY toutes ces autres Fleurs,
Receuez cette Flambe, ô Ivlie adorable!
C'est le viuant portrait des mortelles douleurs
Que cause dans mon sein vne playe jncurable;
Pour vous montrer l'état de mon cœur consumé,
Ie ne pouuois choisir qu'vn obiet enflammé!
De M. le marquis DE MONTAUSIER.
I'ABANDONNE les bois, dont les feüillages sombres,
Malgré l'Astre bruslant qui répand les clartez,
Conseruant ma fraicheur sous leurs épaisses ombres,
Pour venir rendre hommage à tes rares beautez.
Mais ie crains, en voyant l'éclat qui t'enuironne,
Que ton feu sans pareil,
Ne me soit plus fatal que celuy du Soleil.
N'jmporte, toutes fois, quoy que le Ciel ordonne,
Ou i'embelliray ta Covronne,
Ou, mourant au feu de tes yeux,
Mon sort égalera le sort des demy-Dieux.
De M. DE BRIOTTE.
DANS l'Empire fameux de Flore et de Pomone,
Mon pere a mille enfans qui portent la Couronne;
Mais, préférant mon sort au leur,
I'ay mieux aymé demeurer Fleur,
Auec le vif éclat dont ie suis embellie,
Afin de m'offrir Vierge à la chaste Ivlie.
O perte fauorable! ô change précieux!
Ie quitte vne gloire mortelle,
Pour l'jmmortel honneur de parer cette belle,
Et le destin des Roys pour le destin des Dieux.
De M. C... (?)
D'vn pinceau lumineux l'Astre de la lumiere
Anime mes viues couleurs,
Et regnant sur l'Olympe en sa vaste carriere,
Il me fait regner sur les Fleurs;
Ma pourpre est l'ornement de l'empire de Flore;
Autres fois ie brillay sur la teste des Roys,
Et le riuage More
Fut suiet à mes loix;
Mais, méprisant l'éclat dont ie suis embellie,
Ie renonce au Flambeau des Cieux,
Et viens, ô diuine Ivlie!
Adorer tes beaux yeux,
Pour viure par le feu d'vne plus noble vie,
Ie viens par vne belle ardeur,
A la honte du Ciel, acheuer ta grandeur;
Il te deuoit vne Couronne,
Et moy ie te la donne.
De M. DE BRIOTTE.
SI quelque soin vous tient de vous rendre jmmortelle,
Et de voir vôtre nom par le monde semé,
Rendez-vous à l'Amour, ne soyez plus rebelle;
Si ie fleuris encor, c'est pour auoir aymé.
De M. DE MALLEVILLE.
FILLE du bel Astre du jour,
Ie nays de sa seule lumiere,
Alors que sans chaleur, à son nouueau retour,
Des mois il ouure la Carriere.
Ie vis pure, et dans la froideur;
Et mon teint, qui la Neige efface,
Conserue son éclat dans l'extréme rigueur
De l'hyver couronné de glace.
Fleurs peintes d'vn riche dessein
Que le chaud du Soleil fait naistre,
Et qui, peu chastement, ouurez votre beau sein
Au Pere qui vous donna l'estre;
Vous qui sans pudeur aux Zéphirs
Souffrez découurir vos richesses,
Et vous laissant toucher à leurs foibles soupirs,
Ployez sous leurs molles caresses;
Osez-vous, peu modestes Fleurs,
Prétendre Couronner cette beauté séuère?
Et ne craignez-vous point les cruelles froideurs
Dont elle sait punir vne ame temeraire?
N'ayez plus cette vanité,
Puis que seule ie dois obtenir l'auantage
D'orner de son beau chef l'auguste maiesté,
Lors que de tous les cœurs elle reçoit l'hommage,
Au Throsne de la pureté.
De M. DE MONTMOR-HABERT.
SOVS vn voile d'argent la Terre enseuelie
Me produit, malgré sa fraicheur;
La Neige conserue ma vie,
Et, me donnant son nom, me donne sa blancheur;
Mais celle de ton sein, nompareille Ivlie,
Me fait perdre aujourd'huy le prix
Que ie ne cede pas au Lys.
De M. DE BRIOTTE.
ACCORDEZ-MOY le priuilége
D'approcher de ce front de nége;
Et si ie suis placé (comme il est à propos)
Auprès de ces Soleils que le Soleil seconde,
Ie leur donneray le repos
Qu'ils dérobbent à tout le monde.
De M. DE SCUDERY.
FOIBLES Fleurs, à qui le destin
Ne donne jamais qu'vn matin,
Reconnoissez vôtre folie;
Moy seule dois prétendre à couronner Ivlie.
Digne objet des plus dignes vœux,
Placez-moi dessus vos cheueux;
I'aspire à cet honneur, faites que ie l'obtienne;
Ainsi puisse le Ciel vous combler de plaisirs,
Faire que tout succéde à vos justes desirs,
Et que vôtre beauté dure autant que la mienne!
De M. DE SCUDERY.
DONNEZ-MOY vos couleurs, Tulipes, Anémones;
Œillets, Roses, Iasmins, donnez-moy vos odeurs:
Des contraires saisons le froid, ni les ardeurs,
Ne respectent que les Couronnes
Que l'on compose de mes Fleurs;
Ne vous vantez donc point d'estre aymables ni belles;
On ne peut nommer beau ce qu'efface le Temps,
Pour couronner les beautez éternelles,
Et pour rendre leurs yeux contens,
Il ne faut point estre mortelles.
Si vous voulez affranchir du trépas
Vos brillans, mais frêles appas,
Souffrez que i'en sois embellie;
Et si ie leur fais part de mon éternité,
Ie les rendray pareils aux appas de Ivlie,
Et dignes de parer sa diuine beauté.
De M. C. (CORNEILLE).
I E vay finir pour Ivlie:
O que Mon destin est beau!
La glorieuse folie!
Dieux! le superbe tombeau!
Ie suis Fleur, et fus jadis Homme;
Mon sort vne autre fois se trouue au même point,
Car un feu secret me consomme,
Qui me brusle et ne paroist point.
De M. DE SCUDERY.
MADRIGAUX
DESTINÉS
A LA GUIRLANDE DE JULIE
Il avoit cueilli sur le Parnasse toutes les plus belles fleurs qui composoient cette fameuse Guirlande, dont les Muses françoises couronnèrent à l'envie l'illustre Julie.
NICOLAS PETIT, Vie de Montausier.
Le baron de Sainte-Maure s'occupait depuis
longtemps de la composition de sa Couronne
poétique, avant que Jarry ne se mît à
l'œuvre, et l'idée de la Guirlande fut au moins conçue,
selon nous, dans le courant de l'année 1632 [93].
Plus guerrier que poëte, et par conséquent moins souvent 76 à Paris qu'au delà du Rhin, l'amant discret de Julie d'Angennes, ne pouvant donner à son œuvre que ses rares moments de loisir, dut convier par avance tous les poëtes à l'illustre galanterie qu'il a su perpétuer.
Les fleurs affluèrent en gerbes, briguant l'honneur d'être nouées à la Guirlande, qui, certes, se fût de beaucoup augmentée si M. de Montausier, forcé de choisir, n'eût fait l'anthologie manuscrite que nous réimprimons.
Le Dignus intrare ne fut donc pas prononcé pour toutes les fleurs, et nombre de pauvres madrigaux durent rester à la porte, honteux et confus de ne pas orner le front de Julie.
Les poëtes de l'époque étaient inconstants, et dans le 77 monde précieux qui fréquentait le Bureau d'esprit, un madrigal ne pouvait rester longtemps inoccupé; il serait donc plausible qu'une partie des fleurs primitivement destinées à la Guirlande, légèrement retouchées et fardées par la suite, fussent passées comme simples bluettes dans les mains de beautés inconnues.
Par un heureux contraste, des fidèles comme Malleville et Scudéry, des madrigaliers modestes comme les anonymes du manuscrit de Conrart, déposèrent intacts dans différents recueils leurs madrigaux rejetés de la Guirlande comme un hommage dévoué que nous devons respecter.
Nous ne saurions, à la suite de notre réimpression, refuser l'hospitalité à ces courageux madrigaux, depuis trop de temps vagabonds; M. Ch. L. Livet, dans la parfaite et sérieuse édition qu'il a donnée de la Guirlande [94], a déjà restitué à leur véritable place les anonymes du manuscrit de Conrart et les pièces de Malleville qui ne figurent pas dans le texte original.
Nous suivons cette excellente voie, et ajoutons à notre nouvelle édition sept madrigaux, jusqu'alors inédits, conservés dans les poésies de Scudéry.
78 En ramassant en quelque sorte les fleurs tombées en dehors de la Guirlande manuscrite, et en les groupant de nouveau, nous faisons plus qu'une restitution, nous adhérons pieusement aux vœux des poëtes qui voulurent payer à la belle Julie leur tribut d'estime et d'admiration.
O. U.
SUR LA FLAMBE
GUSTAVE A JULIE
DIVINE cause de mes pleurs,
Object dont la gloire m'estonne,
Adjouste à tant de belles fleurs
Ceste Flambe que je te donne.
Tes yeux peuvent bien approuver
Ce présent d'un cœur tributaire;
La Flambe qui te va trouver
Est un feu qui tend à sa sphere.
Jette ton regard curieux
Sur les merveilles qu'elle enserre;
Ce qu'est Iris dedans les Cieux,
La Flambe l'est dessus la terre.
Ou sois favorable à mes vœux,
Ou tu seras digne de blasme;
Je ne mets que sur tes Cheveux
Ce que tu mets dedans mon âme.
Il faut que son feu nompareil
Cherche un object à qui tout cede,
Et que ce qui vient du Soleil
Un autre Soleil le possede.
A peine luit-elle en ces lieux,
Où l'amour veut que je l'envoye,
Que, paroissant devant tes yeux,
Elle s'espanouit de joye.
Tes yeux en cest heureux séjour
Raniment sa grâce premiere,
Et c'est moins de l'Astre du jour
Que d'eux qu'elle tient sa lumiere.
L'Arc-en-Ciel n'a point de couleur
Que le Soleil rende si belle
Que le lustre de cette fleur
Quand tes yeux rayonnent sur elle.
A l'esclat du feu vehement
Dont toutes ses feuilles sont pleines,
Tu pourras juger aysement
Celuy qui brusle dans mes veynes.
Ces feuilles qui dans ce beau lieu
N'ont rien que de vif et de rare,
Sont autant de langues de feu
Par qui mon amour se déclare.
Je ne puis en la vive ardeur
Que me cause ta renommée
Exprimer l'estat de mon cœur
Que par une chose enflammée.
Certes, mon courage est atteint
D'autant de peines violentes
Que l'émail dont elle se peint
Brille de couleurs differentes.
Face l'Astre qui luit aux Roys,
Pour adoucir mon amertume,
Que la Flambe que tu reçois
Passe en ton cœur et te consume [96]!
ANONYME
CURIEUX Enfants d'espérance,
Belle troupe de mes Amans,
Ne vivez plus dans l'ignorance
Du suject de mes changemens.
Je cherche à me rendre embellie
D'un si grand nombre de couleurs
Qu'il ne faille que de mes fleurs
Pour la Guirlande de Julie.
ANONYME.
QUELL' est cette beauté que tout le monde adore?
A voir son front orné de tant de vives fleurs,
Et son teint surmonter l'esclat de leurs couleurs,
On la prendroit pour la Déesse Flore.
Mais non, Flore s'esmeut au doux vent des Zephirs,
Et celle-cy resiste au vent de noz souspirs.
ANONYME.
LORSQUE la Nymphe Écho fut réduitte en servage,
Et ressentit les traicts de ma vaine beauté,
Si de Julie elle eust eu le visage,
J'eusse banny de moy l'insensibilité.
Jamais une fontaine en son cristal mobile
Ne m'eust charmé les yeux d'un object decevant,
Un autre plus divin m'eust pris auparavant
Et la Nymphe eust trouvé ma conqueste facile.
Je ne serois pas fleur; mais, ô doux changement,
Mémorable destin d'un bienheureux Amant!
Agréable folie!
Je triomphe en ma perte et deviens glorieux
De pouvoir vivre ainsy jusqu'au temps de Julie,
D'embellir sa Guirlande et de plaire à ses yeux.
ANONYME.
LA blancheur de ta main m'est un trosne d'yvoire,
Et, bien que par ton teint le mien soit surmonté,
Je suis soubz ton Empire au comble de la gloire,
Et j'emprunte de toy ma plus grande beauté.
ANONYME.
DE tant de fleurs que l'on vous donne
Pour composer cette Couronne,
Celle que je vous viens offrir
Vous sera la plus chere.
Le Ciel qui cognoissoit qu'elle vous devoit plaire,
D'un Amour non commun a daigné la chérir;
A ce que vous aymez ses dons il communique,
Et vous aymez surtout la celeste Angelique [102].
ANONYME.
P AR la loy d'un nouveau Destin,
Ma pourpre, qui jadis ne vivoit qu'un matin,
Conserve son esclat dans ta riche Guirlande.
Je naquis du beau sang de la Mere d'Amour;
Mais c'est une grace plus grande
De conserver que de donner le jour.
ANONYME.
VÉNUS qui veoid les Cieux [105], ainsi que les Mortelz,
Implorer sa clemence au pied de ses autelz,
Se repent que son sang m'ayt donné la naissance,
Et croit recevoir un affront
Me voyant couronner le front
De celle dont le cœur se rit de sa puissance.
ANONYME.
RIEN n'est esgal à ma douleur;
Bien que je ne sois qu'une fleur,
J'ayme la fille d'Artenice [107],
Aux flammes de ses yeux je me laisse esblouyr;
Mais je suis sans espoir, car le sort de Narcisse
Est d'aymer les objets dont il ne peut jouir.
ANONYME.
ANONYME.
PERFIDE Amant, je te declare
Que mon cœur n'est plus ton captif;
C'est trop chercher un fugitif
Et trop reclamer un barbare.
Un plus admirable flambeau,
Un Astre plus doux et plus beau
Me vient guerir de ma folie.
J'adore son feu nompareil,
Et ne cognois plus de Soleil
Que dans les beaux yeux de Julie [110].
MOY qui pouvois passer pour la Reyne des Fleurs,
Je seiche, je languis, je flestris et je meurs
Quand je voy ces beaux yeux, dont l'esclat me surmonte;
Mon teint n'a plus ce feu qui brilloit vivement,
Et s'il rougit encore, il rougit seulement
De depit et de honte [111].
JE suis si fragile en mon estre
Que je ne puis longtemps fleurir;
Le vent qui les Roses fait naistre
Est si fort qu'il me fait mourir.
Je dépens du moindre Zephyre,
Et dès le moment qu'il souspire
Je tombe à terre et ne vis plus:
Mais si je suis sur vostre teste,
Ne seray-je pas au-dessus
Et des vents et de la tempeste [113]?
TOVS les bons esprits de la Cour, ayans trauaillé à la Guirlande de cette excellente personne à qui i'offre ce liure, pour y contribuer quelque chose, j'ay voulu cueillir ces fleurs au pied du Parnasse, où je n'ay pas le droict de monter comme eux.—Leur forme, leur couleur, leur nature, ou les Fables qui s'en voyent, m'ont fourny les pensées sur 93 ce sujet; et je croy que c'estoit ainsy que je le deuois traitter: Sois en iuge comme du reste de mes ouvrages.
DE SCVDERY.
Suivent douze fleurs destinées à la Guirlande de Julie, parmi lesquelles les sept madrigaux que nous publions [115], et qui ne font pas partie du texte original, ni des éditions de la Guirlande données jusqu'alors.
I'ESTEIN mes flames insensées,
Ie reste aux termes du devoir,
Iugeant que vous voulez avoir
De plus hautes pensées;
Je cède vostre front à l'orgueil du Iasmin,
Et suffira pour moy de parer le chemin
(Sans pleurs et sans melancholie)
Que fouleront les pas de la belle Ivlie.
SI i'approche de vous avec le moindre orgueil,
Celle qui me nourrit devienne mon cercueil,
Que le froid Aquilon me déclare la guerre,
Que ma feuille se seiche et tombe sous vos pas,
Et qu'on chasse de l'air, ainsi que du parterre,
(Afin de vanger vos appas)
L'Iris du Ciel et de la terre.
ENFIN ie le confesse, auprès d'un œil si dous,
Et dont le pouvoir (est) extreme,
Ie suis plus amoureux de vous
Que ie ne le fus de moy-mesme.
LE bel œil qui me surmonta,
Ne voit rien qu'il ne dompte:
Et celle qui m'ensanglanta,
Rougira comme moy de despit et de honte.
SI parmy tant de fleurs, ie puis estre choisie [116],
I'auray bien de l'amour et de la jalousie:
Mais pour rendre vos maux et les miens adoucis
Escartez loing de vous tous les autres Soucis.
SI pour vous couronner on me croit inutile,
Souffrez qu'en pleurs ie me distile,
Mes larmes vous plairont; et peut estre vos yeux,
En auront par pitié, qui plairont beaucoup mieux:
Ainsy nous ferons un meslange,
De l'eau de Nasse et de l'eau d'Ange.
DIVIN object tousjours vainqueur,
Il faut que ie t'approche, il faut que ie te cueilles:
Deusse-ie ressentir plus de pointes au cœur
Qu'on n'en voit à mes feuilles.
[1].—Dans l'original, tous les vers, de quelque nombre de syllabes qu'ils soient, commencent à égale distance de la marge.—Nous ne poussons pas le scrupule jusqu'à reproduire dans notre édition cet arrangement disgracieux, tout au plus admissible dans un manuscrit.
Zéphire à Julie est le seul madrigal du marquis de Montausier qui ne soit pas signé dans l'original.
2.—La Couronne Impériale, de Chapelain, fut regardée, à l'hôtel de Rambouillet, comme l'un des plus beaux madrigaux de la Guirlande.—Julie professait la plus grande admiration pour le roi de Suède, Gustave-Adolphe, tué à la bataille de Lutzen, qu'il gagna; Chapelain suppose que ce héros ayant voulu conquérir une couronne impériale pour l'offrir à son admiratrice, fut métamorphosé en la fleur à laquelle cet événement fit donner le nom de Couronne Impériale.
Voiture, dans ses Lettres, nomme Chapelain père de la Pucelle et ouvrier de la Couronne Impériale, et ce madrigal, alors si fameux, fut inséré dans le Huétiana (page 105, chap. XLIV) 98 Huet, le vénérable évêque d'Avranches, bien qu'un des plus violents défenseurs de Chapelain, lors de l'apparition de la Pucelle, fait remarquer avec justesse le contre sens des vers suivants:
«Du rivage inconnu de l'aspre Corélie,
Où la mer sous la glace est toute ensevelie,
Le flambeau de l'Amour mes voiles conduisant,
Je vins pour rendre hommage à l'auguste Julie.»
Comment, s'écrie le prélat, des vaisseaux pouvaient-ils avancer sur une mer toute ensevelie sous la glace?
L'honnête Chapelain, pour se justifier, eût peut-être répondu que le «flambeau de l'Amour, qui conduisait les voiles de Gustave-Adolphe, était assez incandescent pour fondre toute la glace de l'aspre Corélie!»
Le Recueil de Conrart (in-fo, Belles-Lettres 145, bibl. de l'Arsenal), page 1087, donne ce madrigal avec le sous-titre: A la Princesse Julie. L'orthographe de ce manuscrit est de beaucoup plus surannée que celle de l'original.
3.—Au second vers de ce madrigal, le mot treuve, qui est écrit ainsi que nous le donnons, dans le texte original et dans la copie de Maurepas, subit la variante de trouve dans les éditions Nodier, Didot, et dans les œuvres de Scudéry, qui portent:«Je me trouve sans effroy.»
4.—...«Je n'ay plus rien de ce lustre enflammé
Que de Vénus le sang avait fait naistre.»
Quelques auteurs ont fait sortir la Rose d'une piqûre de Vénus, image gracieuse, mais fable peu consacrée.
Voiture fit également une métamorphose en prose de la Rose pour Me de Rambouillet.
5.—Les derniers vers de la Rose, de M. de Montausier, se trouvent très-maltraités dans le recueil de Sercy, qui termine ainsi ce madrigal:
«Mais beauté que le monde adore,
«J'estime celuy de règner dans l'empire de Flore.
Il faut attribuer à une faute d'impression ce non-sens et ce vers faux.
6.—Le même Recueil de Sercy fait débuter ainsi la Seconde Rose, de M. Colletet:
«Quoyque la fable nous raconte
Jamais la Royne d'Amaronte,» etc.
7.—La version manuscrite de Conrart donne ces légères variantes à ce premier madrigal du Narcisse: au troisième vers, jadis estant au lieu de estant jadis, et au sixième vers:
Il baissoit toujours son visage,
Qu'il estimoit plus beau que le soleil;
au lieu de:
Qu'il estimoit plus beau que celui du soleil.
8.—Le manuscrit de Conrart, page 1105, donne cette énorme variante; après le troisième vers, le madrigal continue ainsi:
Je viens pour vous offrir mes vœux,
Unique beauté que j'estime,
Escoutez ce discours que ma pasleur exprime:
Vous pour qui souffrent mille amans
Un nombre infini de tourments,
Si vous me voyez le teint blesme,
Ce n'est plus moy, c'est vous que j'ayme.
100 9.—Le Recueil de Sercy nous fournit cette variante pour la fin du Narcisse de M. Habert:
Et pour éviter son courroux,
Julie, aimez d'autres que vous.
A propos de cet Habert auquel les éditions Didot et Nodier décernent à tort le titre de capitaine, nous rectifions, ainsi que l'a fait M. Ch. L. Livet, cette grosse erreur. Habert était commissaire et non capitaine de l'artillerie. Nous signons donc, ainsi que le manuscrit original et le recueil de Maurepas, les madrigaux de cet auteur: M. Habert, C. de l'artillerie.
Nota. C'est par suite d'une faute de correcteur que le mot cap. subsiste dans la signature de ce madrigal.
10.—Dans la copie manuscrite de Maurepas, le Narcisse, du commissaire de l'artillerie est placé ainsi que nous le donnons. L'édition Nodier, au contraire, place le Narcisse de l'abbé de Cerisy auparavant.
Au sujet de celui-ci, les textes de Didot et Nodier portent cette variante au dernier vers:
«Chacun sçait toutefois comme elle m'a perdu.
11.—Jean Ogier de Combaud est auteur d'une pastorale également nommée Amaranthe (in-8, 1631). L'allusion qu'il fait dans son quatrain, à l'immortalité de l'amarante, est appuyée par toute l'antiquité.
Homère nous apprend qu'aux funérailles d'Achille, les Thessaliens étaient couronnés d'amarantes, et Malherbe dit, dans une ode à Henri IV (Sur l'heureux succès du voyage de Sedan):
«La louange dans mes vers,
D'amarante couronnée,
N'aura sa fin terminée
Qu'en celle de l'Univers.»
L'amarante d'or était le prix de l'ode dans les jeux floraux.
101 12.—L'Angélique, de M. de Malleville, ne se trouve pas dans ses madrigaux (Paris, A. Courbé, 1649). Ce fait est d'autant plus curieux que c'est le seul madrigal de ce poëte qui manque à l'appel dans ses poésies imprimées.
13.—Le mot THIN est ainsi écrit dans le manuscrit original; nous faisons cette remarque d'après l'abbé Rive.
14.—Ce fameux madrigal de la Violette n'a jamais été attribué qu'à Desmarest; dans l'original il est signé avec cette orthographe: M. Des Marestz; dans la copie de Maurepas, signé: De.....
L'édition de 1729, à la suite de la vie de Montausier, du père N. Petit, porte: «Anonyme», et donne cette très-intéressante variante, dont on n'a pas encore fait mention jusqu'ici:
«Fleur sans ambition, je me cache sous l'herbe.»
15.—Au troisième vers du Lys de M. de Montausier, la copie de Maurepas donne, en supprimant la particule négative:
«Et je crois si je me flatte.»
16.—Dans les poésies de Malleville (1649), il se trouve la variante suivante:
«Reçoy les lys que je te donne
Pour en former une couronne
Par qui de ta beauté le lustre soit dépeint.»
17.—Le manuscrit de Maurepas donne à ce madrigal le début suivant:
«Que j'ay d'honneur à cette fois.»
Cette variante est intéressante, car la copie de Maurepas suit assez fidèlement le texte original.
18.—Cette pièce est seulement signée des initiales M. C. 102 dans l'original et la copie de Maurepas; les textes imprimés de Didot et de Nodier signent: «Conrart», sans motifs connus. Il est vrai que l'abbé Goujet, dans sa Bibliothèque Françoise (tome XVII, page 401, et tome XVIII, page 444) met à l'actif de Conrart quelques-uns des madrigaux de la Guirlande. Mais est-ce là une autorité suffisante? L'éditeur de 1729, plus circonspect, ne garde de Conrart que le silence prudent et signe «M. C.» M. Taschereau, dans son Histoire de la vie et des ouvrages de Corneille (Paris, Jannet, 1855, page 318), revendique pour l'auteur du Cid les six pièces signées «M. C.»
19.—Ce dernier madrigal sur les Lys est signé Desmaretz dans le recueil manuscrit de Maurepas. L'édition de 1729 le porte anonyme.
20.—Dans la Tulipe, de M. de Vence, la version manuscrite de Conrart remplace ce vers:
«Miracle de nos jours si mes yeux t'eussent vue»,
par:
«Julie si je t'eusse vue».
21.—La Tulipe signée M. C., dans l'original et dans la copie de Maurepas, est une des trois pièces attribuées à Corneille. Le Recueil de Sercy, si avare cependant de signatures intégrales, signe ce madrigal: «Corneille», et l'abbé Granet, éditeur des œuvres diverses du grand tragique, a inséré dans son édition (Paris, Gissey, 1738, in-12) la Tulipe, ainsi que la Fleur d'Orange et l'Immortelle blanche, de même signées «Corneille» dans le Recueil de Sercy.—Madame de Genlis, dans sa Botanique historique et littéraire (Paris, 1810, p. 91), donne également à Corneille la paternité de ces trois madrigaux, et dans la Bibliographie Cornélienne, qui vient de paraître (Paris, Fontaine, 1875), les éditeurs attachent une assez grande importance à ces trois madrigaux, qu'ils attribuent à Corneille, car, page 198 et suivantes, ils ont dressé fort consciencieusement la 103 liste des trois manuscrits et des différentes éditions de la Guirlande de Julie.
Les éditions Didot et Nodier signent: «Conrart».
22.—La Jonquille était une fleur rarissime et très-chère en 1641. Mme de Sévigné, en parlant d'une superbe fête, raconte, comme une chose extraordinaire, qu'on y avait prodigué les jonquilles.
23.—Le Recueil de Sercy, au deuxième vers de ce madrigal, donne, au lieu de:
«Dont l'injuste refus précipita mon sort»,
cette variante:
«Dont mon juste repos précipita mon sort».
Dans l'original, la copie de Maurepas et l'édition de 1729, ce sixain paraît signé des initiales: «de M. le M. de R.»—Les textes de Didot et de Nodier, ennemis des initiales, signent à tort: «M. le marquis de Racan.»—Le poëte des Bergeries n'est aucunement l'auteur de ce madrigal, généralement attribué, et avec raison, au marquis de Rambouillet, père de Julie.
Tallemant est là, du reste, pour appuyer notre assertion: «Elle remercia, dit-il (en parlant de Julie d'Angennes), tous ceux qui avoient fait des vers pour elle. Il n'y eut pas jusqu'à M. le marquis de Rambouillet qui n'en fist, on y voit un madrigal de sa façon.»—Tallemant (historiette de Montauzier).
24.—Ce quatrain de l'Hyacinthe est signé: «M. C.» dans l'original, le manuscrit de Maurepas et l'édition de 1729. Les éditions Nodier et Didot, logiques dans leurs hypothèses, portent: «M. Conrart.»
25.—Ce madrigal n'est pas inséré dans l'édition de 1729, mais il se trouve dans celle de 1784.
26.—A la page 1094 de la version manuscrite de Conrart, 104 nous trouvons, au quatrième vers de ce huitain, cette petite variante:
Au lieu de:
«Ait pris mon âme en ses appas»,
Il y a:
«Ayt pris âme en ses appas».
Le texte imprimé des poésies de Malleville (Courbé, 1649) donne cette autre variante pour les deux derniers vers:
«Aymer la divine Julie
N'est-ce pas aymer le Soleil?»
27.—La Fleur d'Orange est la seconde fleur de la Guirlande, qu'on attribue à Corneille; Sercy la signe en toutes lettres «Corneille» dans son Recueil, et l'abbé Granet l'inséra dans son édition des œuvres diverses de ce poëte.
L'original, la copie de Maurepas et l'édition de 1729 signent de «M. C.». Les textes Didot et Nodier, conséquents dans leur erreur, signent: «M. Conrart».
28.—Le manuscrit de Maurepas écrit ainsi le pseudonyme du marquis de Pomponne: «M. de Briotte». L'édition Livet: «M. Briote». Nous adoptons l'orthographe du Recueil de Maurepas.
29.—Ce madrigal, signé avec constance «Conrart» dans les textes de Didot et Nodier, ne porte dans l'original et le Recueil de Sercy que les initiales M. C.—Au sujet de cette fleur, on avait donné cette devise à la reine Anne d'Autriche: Une grenade, avec ces mots: Mon prix n'est pas dans ma couronne.
30.—Dans les poésies de Malleville (1649, p. 269), ce madrigal subit cette variante au second vers:
«Et de voir votre nom sur la terre estimé.»
Le manuscrit de Conrart donne, page 1095, ce madrigal conforme à l'original, et, page 1097, le même avec la variante de Malleville que nous venons de citer.
105 31.—Mme de Genlis, dans sa Botanique historique et littéraire (Paris, 1810, page 189), s'exprime ainsi sur ce madrigal:«Le Perce-Neige fut encore une fleur de la guirlande de Julie; Benserade en fit les vers que voici:»
Suit le madrigal avec cette curieuse variante qu'il nous procure pour les derniers vers:
«Mais celle de ton sein, adorable Julie,
Me fait perdre aux yeux éblouis
La gloire désormais ternie
Que je ne cédois pas aux lys.»
Nous laissons à Mme de Genlis la responsabilité de son affirmation, et nous ne chercherons pas comment Benserade pourrait être auteur d'un madrigal signé «de Briotte» dans l'original.
32.—L'Immortelle devient l'Amarante au titre de ce madrigal, dans les poésies de Scudéry, à la suite du Vassal généreux (Paris, Courbé, 1636). Nous devions signaler cette synonymie.
33.—L'Immortelle blanche est le troisième madrigal signé «M. C.» pour lequel le Recueil de Sercy ait donné, avec sa puissante autorité, la signature de «Corneille». Avec la Tulipe et la Fleur d'Orange, il fait partie des œuvres diverses de notre grand poëte, publiées par l'abbé Granet.
L'original, la copie manuscrite de Maurepas et l'édition de 1729 signent «M. C.»; Conrart est la signature que donnent les éditions Didot et Nodier.
34.—Ce madrigal, qui est le dernier du volume, occupe dans le manuscrit original le feuillet 95. (Les feuillets ne sont paginés qu'au recto.)
Pages | |
ANDILLY (M. d'). | |
---|---|
Merveille de nos jours, dont les charmes vainqueurs | 27 |
ANDILLY (M. d') le filz. | |
Sans beauté, sans grandeur, sans éclat et sans grace | 22 |
Je suis et l'Amante et l'Image | 52 |
BRIOTTE (M. de). | |
J'abandonne les bois dont les feuillages sombres | 61 |
D'un pinceau lumineux l'Astre de la lumiere | 63 |
Sous un voile d'argent la terre ensevelie | 67 |
CHAPELAIN (M.). | |
Je suis ce Prince glorieux | 5 108 |
COLLETET (M.). | |
Si vous n'aviez banny l'ardeur démesurée | 12 |
Quoy que la Fable nous raconte | 13 |
Quoique tu sois pourveu d'un éclat nompareil | 49 |
Vous qui suivez l'Amour dont le feu vous égare | 54 |
M. C. (?). | |
Un divin oracle autresfois | 34 |
Bel Astre à qui je dois mon estre et ma beauté [Corneille] | 39 |
D'un éternel bonheur ma disgrâce est suivie | 44 |
Du palais d'émeraude, où la riche Nature [Corneille] | 56 |
Dans l'Empire fameux de Flore et de Pomone | 62 |
Donnez-moi vos couleurs, Tulipes, Anémones [Corneille] | 70 |
CORBEVILLE (Arnaud de). | |
Je suis le plus brillant ouvrage | 38 |
DES MARESTZ (M.). | |
Franche d'ambition, je me cache sous l'herbe | 25 |
Belle, ces Lys que je vous donne | 35 |
GODEAU (M.). | |
Je fus un Berger autrefois | 36 |
GOMBAUD (M. de). | |
Je suis la fleur d'Amour qu'Amarante on appelle | 18 |
HABERT (M.), abbé de Cérisy. | |
Alors que je me voy si belle et si brillante | 9 |
Quand je voy vos beaux yeux si brillans et si doux | 17 |
HABERT (M.), commissaire de l'artillerie. | |
Epris de l'Amour de moy-même | 16 |
Faut-il donc que la Rose ait sur moi l'avantage | 47 |
Ne pouvant vous donner ni Sceptre ni Couronne | 48 109 |
MALLEVILLE (M. de). | |
Bien que de la Rose et du Lys | 7 |
Devant ce teint d'un beau sang animé | 10 |
Quand toutes les Fleurs prennent place | 20 |
De tant de Fleurs par qui la France | 26 |
Reçois les Lys que je te donne | 30 |
Mortels, qu'on ne m'accuse pas | 51 |
Lorsque pressé de mon devoir | 55 |
Je ne croy pas que ces Guirlandes | 59 |
Si quelque soin vous tient de vous rendre immortelle | 64 |
MARTIN (M.). | |
Je puis mettre entre les louanges | 32 |
Que j'ay de gloire à cette fois | 33 |
MONTAUSIER (M. le marquis de). | |
Recevez, ô Nymphe adorable | 3 |
Assise en majesté sur un Throsne d'épines | 11 |
Je consacre, Julie, un Narcisse à ta gloire | 14 |
Je suis ce Narcisse fameux | 15 |
Recevez mon service, adorable Julie | 19 |
Bien que dans l'Empire des Fleurs | 21 |
Cause de tant de feux, source de tant de pleurs | 23 |
Je m'offre à vous, belle Julie | 24 |
Le plus ardent de tous mes vœux | 29 |
Permettez-moy, belle Julie | 40 |
Dans la Fable ni dans l'Histoire | 41 |
Depuis mon changement tout l'Univers remarque | 43 |
A ce coup les Destins ont exaucé mes vœux | 45 |
Si l'on vous donne un Lys, un Œillet, une Rose | 46 |
Je viens m'offrir à vous pour parer vos cheveux | 58 |
Parmy toutes ces autres Fleurs | 60 |
MONTMOR-HABERT (M. de). | |
Fille du bel Astre du jour | 65 110 |
M. le M. de R. (marquis de Rambouillet). | |
Je n'ay plus de regret à ces armes fameuses | 42 |
RÉAUX-TALLEMANT (M. des). | |
Devant vous je pers la victoire | 31 |
SCUDÉRY (M. de). | |
Quelque diversité que le parterre étale | 8 |
Jadis les rigueurs du Soleil | 50 |
Accordez-moi le privilége | 68 |
Foibles Fleurs à qui le Destin | 69 |
Je vay finir pour Julie | 71 |
Pages | |
ADONIS (La Fleur d'), madrigal de M. de Malleville | 64 |
Si quelque soin vous tient de vous rendre immortelle. | |
---|---|
AMARANTE (L'), madrigal de M. de Gombaud | 18 |
Je suis la Fleur d'Amour qu'Amarante on appelle. | |
ANÉMONE (L'), madrigal de M. le marquis de Montausier | 24 |
Je m'offre à vous, belle Julie. | |
ANGÉLIQUE (L'), premier madrigal de M. le marquis de Montausier | 19 |
Recevez mon service, adorable Julie. 112 | |
Second madrigal de M. de Malleville | 20 |
Quand toutes les Fleurs prennent place. | |
ÉLIOTROPE (L'), madrigal de M. le marquis de Montausier | 45 |
A ce coup les Destins ont exaucé mes vœux. | |
FLAMBE (La), premier madrigal de M. de Malleville | 59 |
Je ne croy pas que ces Guirlandes. | |
Second madrigal de M. le marquis de Montausier | 60 |
Parmi toutes ces autres Fleurs. | |
GRENADE (La Fleur de), premier madrigal de M. C. (?) | 62 |
Dans l'Empire fameux de Flore et de Pomone. | |
Second madrigal de M. de Briotte | 63 |
D'un pinceau lumineux, l'Astre de la lumiere. | |
HYACINTHE (L'), premier madrigal de M. le marquis de R. (de Rambouillet) | 42 |
Je n'ai plus de regret à ces armes fameuses. | |
Second madrigal de M. le marquis de Montausier | 43 |
Depuis mon changement, tout l'Univers remarque. | |
Troisième madrigal de M. C. (?) | 44 |
D'un éternel bonheur ma disgrâce est suivie. | |
IMMORTELLE (L'), madrigal par M. de Scudéry | 69 |
Foibles Fleurs à qui le Destin. | |
IMMORTELLE BLANCHE (L'), madrigal de M. C. (Corneille) | 70 |
Donnez-moy vos couleurs, Tulipes, Anémones. | |
IMPÉRIALE (La Couronne), premier madrigal de M. Chapelain | 5 113 |
Je suis ce Prince glorieux. | |
Second madrigal de M. de Malleville | 7 |
Bien que de la Rose et du Lys. | |
Troisième madrigal de M. de Scudéry | 8 |
Quelque diversité que le parterre étale. | |
JASMIN (Le), madrigal de M. le marquis de Montausier | 23 |
Cause de tant de feux, source de tant de pleurs. | |
JONQUILLE (La), madrigal de M. le marquis de Montausier | 41 |
Dans la Fable ni dans l'Histoire. | |
LYS (Les), premier madrigal de M. d'Andilly | 27 |
Merveille de nos jours, dont les charmes vainqueurs. | |
Second madrigal de M. le marquis de Montausier | 29 |
Le plus ardent de tous mes vœux. | |
Troisième madrigal de M. de Malleville | 30 |
Reçois les Lys que je te donne. | |
Quatrième madrigal de M. des Réaux-Tallemant | 31 |
Devant vous je pers la victoire. | |
Cinquième madrigal de M. Martin | 32 |
Je puis mettre entre les louanges. | |
Sixième madrigal de M. Martin | 33 |
Que j'ay de gloire à cette fois. | |
Septième madrigal de M. C. (?) | 34 |
Un divin oracle autresfois. 114 | |
Huitième madrigal de M. Desmarestz | 35 |
Belle, ces Lys que je vous donne. | |
MÉLÉAGRE (La Fleur de), madrigal de M. de Scudéry | 71 |
Je vay finir pour Julie. | |
MUGUET (Le), madrigal de M. de Briotte | 61 |
J'abandonne les bois dont les feuillages sombres. | |
NARCISSE (Le), premier madrigal de M. le marquis de Montausier | 14 |
Je consacre, Julie, un Narcisse à ta gloire. | |
Second madrigal du même | 15 |
Je suis ce Narcisse fameux. | |
Troisième madrigal de M. Habert, commissaire de l'artillerie | 16 |
Épris de l'Amour de moy-même. | |
Quatrième madrigal de M. Habert, abbé de Cérisy | 17 |
Quand je voy vos beaux yeux si brillans et si doux. | |
ŒILLET (L'), madrigal de M. le marquis de Montausier | 21 |
Bien que dans l'empire des Fleurs. | |
ORANGE (La Fleur d'), madrigal de M. C. (Corneille). | 56 |
Du palais d'émeraude, où la riche Nature. | |
PAVOT (Le), madrigal de M. de Scudéry | 68 |
Accordez-moi le privilége. | |
PENSÉE (La), madrigal de M. Colletet | 54 |
Vous qui suivez l'Amour, dont le feu vous égare. | |
PERCE-NEIGE (La), premier madrigal de M. de Montmor Habert | 65 115 |
Fille du bel Astre du jour. | |
Second madrigal de M. de Briotte | 67 |
Sous un voile d'argent la Terre ensevelie. | |
ROSE (La), premier madrigal de M. Habert, abbé de Cérisy | 9 |
Alors que je me vois si belle et si brillante. | |
Second madrigal de M. de Malleville | 10 |
Devant ce teint d'un beau sang animé. | |
Troisième madrigal de M. le marquis de Montausier | 11 |
Assise en majesté sur un Throsne d'épines. | |
Quatrième madrigal de M. Colletet | 12 |
Si vous n'aviez banny l'ardeur démesurée. | |
Cinquième madrigal du même | 13 |
Quoique la Fable nous raconte. | |
SAFFRAN (Le), madrigal de M. le marquis de Montausier | 58 |
Je viens m'offrir à vous pour parer vos cheveux. | |
SOUCY (Le), premier madrigal de M. le marquis de Montausier | 46 |
Si l'on vous donne un Lys, un Œillet, une Rose. | |
Second madrigal de M. Habert, commissaire de l'artillerie | 47 |
Faut-il donc que la Rose ait sur moi l'avantage. 116 | |
Troisième madrigal du même | 48 |
Ne pouvant vous donner ni Sceptre ni Couronne. | |
Quatrième madrigal de M. Colletet | 49 |
Quoyque tu sois pourveu d'un éclat nompareil. | |
Cinquième madrigal de M. de Scudéry | 50 |
Jadis les rigueurs du Soleil. | |
Sixième madrigal de M. de Malleville | 51 |
Mortels, qu'on ne m'accuse pas. | |
Septième madrigal de M. d'Andilly le filz | 52 |
Je suis et l'Amante et l'image. | |
Ces deux derniers madrigaux sont intitulés: | |
Le Soucy sous le nom de Clytie. | |
SOUCYS ET LES PENSÉES (Les), madrigal de M. de Malleville | 55 |
Lorsque pressé de mon devoir. | |
THIN (La Fleur de), madrigal de M. d'Andilly le filz | 22 |
Sans beauté, sans grandeur, sans éclat et sans grace. | |
TULIPE (La), premier madrigal de M. Godeau | 36 |
Je fus un Berger autrefois. | |
Second madrigal de M. Arnaud de Corbeville | 38 |
Je suis le plus brillant ouvrage. | |
Troisième madrigal de M. C. (Corneille) | 39 |
Bel Astre à qui je dois mon estre et ma beauté. | |
TULIPE (La), nommée flamboyante, madrigal de M. le marquis de Montausier | 40 |
Permettez-moy, belle Julie. 117 | |
VIOLETTE (La), premier madrigal de M. Desmarestz | 25 |
Franche d'ambition, je me cache sous l'herbe. | |
Second madrigal de M. de Malleville | 26 |
De tant de Fleurs par qui la France. | |
ZÉPHIRE A JULIE, madrigal de M. le marquis de Montausier | 3 |
Recevez, ô Nymphe adorable. | |
Ce madrigal est sur le huitième des feuillets qui sont à la tête de ce manuscrit. |
ÉPITRE DÉDICATOIRE. |
NOTICE. |
MADRIGAUX DE LA GUIRLANDE DE JULIE. |
MADRIGAUX DESTINÉS à la Guirlande de Julie: |
1o Avertissement; |
2o Madrigaux inédits du manuscrit de Conrart; |
3o Pièces conservées dans les poésies de Malleville; |
4o Fleurs inédites de M. de Scudéry. |
NOTES ET VARIANTES. |
TABLE de la Guirlande de Julie, par ordre alphabétique des Auteurs, avec l'indication du premier vers de leurs Madrigaux. |
TABLE par ordre alphabétique des Fleurs. |
[1] La Princesse de Paphlagonie, petit roman de Mademoiselle, dont Segrais fut le correcteur. (Voyez Œuvres de Segrais, Amsterdam, 1723, t. II, p. 213.) On trouve une clef de cette histoire dans le même ouvrage (t. Ier, p. 159). Mme de Rambouillet y est peinte sous le nom symbolique de la Déesse d'Athènes, et Julie d'Angennes est représentée par la princesse Aminte.
[2] «Elle est, dit Mlle de Scudéry, la plus affectueuse du monde, ayant un charme si particulier dans la conversation, pour peu que les gens qui sont avec elle lui plaisent, qu'il suffiroit, pour devenir amoureux de Philonide, de passer une après-dînée à sa ruelle, quand même on y seroit sans la voir, et en un de ces jours d'été où les dames font une nuit artificielle dans leurs chambres pour éviter la grande chaleur.» (Le grand Cyrus, t. VII, livre Ier.)
[3] Nous ne prétendons pas parler ici du Païs de Tendre, introduit plus tard, par de fausses précieuses, dans le roman de Clélie, et dont la Mer dangereuse, le Lac d'indifférence, Orgueil, Tiédeur, Oubli, etc., formaient les redoutables Limites.
[4] Les éventails étaient ainsi nommés. Voy. le Dict. de Saumaize.
[5] Lettre écrite à Mlle Paulet, datée de Lisbonne, en octobre 1633.
[6] Oraison funèbre de Mme Julie-Lucine d'Angennes de Rambouillet, duchesse de Montausier, prononcée par Fléchier, en l'église de l'abbaye d'Hière, le 2 janvier 1672.
[7] Le plus jeune des fils de Mme de Rambouillet, né en 1624, et qui prit le titre de son père, celui de «vidame du Mans», fut atteint de la peste, à l'âge de sept ans. Cette épouvantable épidémie faisait fuir souvent parents et amis loin de ceux qui en étaient atteints. Julie d'Angennes ne quitta pas le chevet de son jeune frère, et elle l'assista jusqu'à son dernier soupir, ainsi que Mme Paulet.
[8] Charles de Sainte-Maure n'éleva ses prétentions à la main de Julie qu'après la mort de son frère aîné, qui aspirait lui-même à ce mariage. Il n'avait alors que vingt-cinq ans et ne comptait pas à son actif les charges honorables qui firent de lui, plus tard, un des plus beaux partis que pût rêver la fille d'une illustre maison. Tallemant, du reste, rapporte, dans ses Historiettes, que: M. de Salles (depuis M. de Montausier) ne se déclara point qu'il ne fût maréchal de camp et gouverneur de l'Alsace.
[9] Voyez la Vie de Montausier, par le Père Nicolas Petit, jésuite, citée plus loin, et l'Éloge de Charles de Sainte-Maure, duc de Montausier, par Garat, 1781.
[10] Cette correspondance fut si suivie qu'il en était résulté, au dire de Chapelain (lettres d'avril 1638), plus de lettres en prose et en vers qu'il n'en faudrait pour faire une Arcadie de Sannazar.
[11] Voyez 1° La Ghirlanda della Contessa Angela Bianca Beccaria, contesta di Madrigali de diversi autori dichiarati da Stefano Guazzo. Genova, pel Bartoli, 1595, in-4°;
—2° Ghirlanda di frondi, fiori e frutti, ed altre rime del signor Alcide infiammati per l'illustrissima Signora Zenobia Reina Beccaria Parona, gentildonna di Pavia. In Pavia, per gli credi di Girolamo Bartoli. 1596, in-12.
(Quadrio, Storia e ragione d'ogni poesia, en 47 vol., t. Ier, p. 263.)
Il existe également des livres de poésie française sous le titre de Couronne de fleurs, etc. Voy. au Catalogue imprimé des belles lettres de la Bibliothèque du Roy, p. 511, col. 1, lettre Y, no 4898.
[12] Cette Notice est insérée dans le Catalogue des livres rares et précieux de feu M. le duc de La Vallière, rédigé par Guillaume de Bure fils aîné (première partie, t. III, p. 57 du supplément de ce Catalogue, à Paris, chez Guillaume de Bure, 1783). Toutes les éditions de la Guirlande de Julie sont précédées de cette Notice.
[13] Nous avons groupé autour de cette Notice, sous la forme succincte d'annotations, toutes nos études sur la Guirlande et l'histoire de ses manuscrits; nous croyons apporter une certaine lumière sur plusieurs points assez obscurs jusqu'ici, et rendre par là même cette nouvelle édition aussi achevée que possible et plus complète qu'aucune autre.
[14] Huetiana (édition de Paris, in-12, 1722, p. 103). «Jamais, dit l'évêque d'Avranches, l'amour n'a inventé de galanterie plus ingénieuse, plus polie et plus nouvelle que la Guirlande de Julie, dont le duc de Montausier régala Julie d'Angennes, un premier jour de l'an, lorsqu'il la recherchoit en mariage.» Dans cet article, l'honorable M. Huet fixe le don de la Guirlande à l'année 1633 ou 1634. Il y a certainement erreur, car le manuscrit porte la date de 1641.
[15] Charles de Sainte-Maure, alors baron de Salles, est né le 6 octobre 1610. C'était le second fils de Léon de Sainte-Maure, baron de Montausier, et de Marguerite de Chateaubriant, tous deux issus des plus illustres maisons de la Bretagne et de la Touraine. Marquis en 1644, puis duc et pair en 1664, il reçut en l'année 1668 la charge de gouverneur du Dauphin. Molière, dans son Misanthrope, a taillé son portrait en plein marbre, sous les traits d'Alceste, dont il fut, paraît-il, l'original.
[16] Elle s'appelait Julie, du nom de sa grand'mère, Julia Savelli; celui de Lucine lui fut donné par une tradition très-ancienne dans la maison Savelli; on ajoutait toujours ce nom à celui que recevaient, en baptême, les filles issues de cette ancienne famille de Rome.
[17] Julie d'Angennes, née en 1607, était l'aînée des quatre filles de Charles d'Angennes, marquis de Rambouillet et de Pisani, et de Catherine de Vivonne-Savelli. Elle devint, par suite de son mariage avec M. de Montausier, gouvernante de monseigneur le Dauphin et dame d'honneur de la reine; et mourut à Paris, le 15 novembre 1671, dans la soixante-quatrième année de son âge. (Voyez le P. Anselme, Histoire généal., t. II, p. 427, et t. V, p. 20; et Fléchier, Oraison funèbre de madame la duchesse de Montausier.)
[18] Ce ne fut que quatre ans après la présentation de la Guirlande que M. de Montausier épousa Julie d'Angennes (le 13 juillet 1645). Elle avait alors trente-huit ans. «Elle s'étoit mariée (dit madame de Motteville dans ses Mémoires), n'étant plus jeune, au marquis de Montausier, qui l'avoit aimée quatorze ans, et en se donnant à lui, il lui sembla qu'elle étoit plus touchée des obligations qu'elle lui avoit et de son mérite que du désir de se marier.»
M. de Montausier, pour conclure ce mariage, abjura la religion protestante pour se faire catholique.
[19] Le 22 mai, jour de la Sainte-Julie. Nous serions plutôt tenté d'affirmer, avec M. Huet, que l'offre de la Guirlande eut lieu «un premier jour de l'an»; car, Mai, le mois du renouveau, produit certes assez de fleurs, même au gré des amants. Quant à l'année où Julie trouva ce chef-d'œuvre à son réveil, il est probable que ce fut le 1er janvier 1642, puisque le manuscrit est daté de 1641.
[20] Charles d'Orléans de Rothelin, abbé de Cormeilles et littérateur distingué, né à Paris, le 5 août 1691, mort le 17 juillet 1744. Il fut reçu à l'Académie française en 1728, et à celle des Inscriptions en 1732.
[21] Claude Gros de Boze, antiquaire, né à Lyon en 1680, mort à Paris, en 1753. Il remplaça Fénelon à l'Académie française et fut reçu à celle des Inscriptions, dont il devint secrétaire perpétuel en 1706.
[22] C'est-à-dire faisant face au spectateur. Dans cette position, la droite de Zéphire est à gauche du spectateur; il est représenté de trois quarts.
[23] Cette seconde guirlande, en forme de couronne, peut avoir deux pouces au plus de diamètre, tandis que la première occupe presque entièrement la page. Celle-là n'est pas la copie exacte de celle-ci, qu'elle ne rappelle que vaguement, et c'est plutôt dans la première que dans la seconde que les fleurs peuvent être comptées.
[24] Ces fleurs que souffle Zéphire ne sont pas aussi variées que celles de la première guirlande. (C'est d'après M. Ch.-L. Livet que nous donnons ces détails. Plus heureux que nous, M. Livet a pu visiter, chez le duc d'Uzès, le précieux manuscrit avant la publication de son édition. Voy. l'Appendice de Précieux et Précieuses. Paris, Didier, 1870, 2e édition.)
[25] Nous avons fait en sorte de rendre, dans notre réimpression, cette disposition du manuscrit original, en ne mettant qu'un fleuron par chaque sorte de fleurs. Les éditions précédentes n'avaient pas suivi, d'aussi près que nous l'avons fait, la reproduction de l'œuvre de Jarry.
[26] L'édition, à la suite de la Vie de Montausier par Nicolas Petit (Paris, 2 vol. in-12, Rollin et Genneau, 1729), a reproduit cette table.
[27] L'abbé Rive (Jean-Joseph), bibliographe, né le 19 janvier 1730, mort en 1792. La table dont il est question ici fut dressée par l'abbé à la suite de sa notice. Voyez Notices historiques et critiques de DEUX MANUSCRITS uniques et très-précieux de la bibliothèque de M. le duc de La Vallière, dont l'un a pour titre: La Guirlande de Julie, et l'autre: Recueil de fleurs et insectes peints par Daniel Rabel en 1624. Par l'abbé Rive. A Paris, de l'imprimerie de Didot l'aîné, 1779, in-4o de 20 pages. Cette plaquette est très-rare.
[28] Cette édition fut réimprimée à Paris, chez Rollin fils, en 1735, puis en 1736. Le même ouvrage parut anonyme à Rotterdam (ou Berlin), in-12, en 1731, sous le titre: Mémoires de M. le duc de Montausier.
[29] La récente réimpression dont parle Guillaume de Bure, au moment où il rédigeait son Catalogue, fut sans doute l'édition, alors sous presse, donnée par Didot en 1784, d'après l'in-4o manuscrit de la Guirlande, acheté par cet imprimeur à la vente Crozat de Tugny, en 1751. Mais cette édition parut isolée, et c'est par erreur qu'elle figure dans cette Notice comme ayant paru avec la Vie de Montausier.
[30] Tous les noms d'auteurs sont écrits par Jarry, dans l'angle gauche de chacune des pages où commencent leurs madrigaux. Les poëtes de la Guirlande ne signèrent donc pas de leur main, à la fin de chaque pièce. Le marquis de Montausier ne se cache nullement sous les initiales décrites ici. Excepté à la table et au madrigal Zéphire à Julie, son nom paraît toujours en toutes lettres.
[31] Rien ne fait supposer que le sixain signé M. le M. de R. soit du marquis de Racan; tout, au contraire, porte à croire qu'il a pour auteur le marquis de Rambouillet, père de Julie. (V. la Note 23, à la fin du présent volume.)
[32] Nous ne savons sur quelle autorité ont pu s'appuyer les auteurs de cette Notice pour attribuer à Valentin Conrart les madrigaux signés M. C. Conrart ne faisait pas de vers galants, et en eût-il fait, les six pièces signées de ces initiales ne seraient pas de lui. Trois de ces madrigaux sont assurément de Pierre Corneille; pour les trois autres, s'ils ne sont pas du même auteur, leur paternité est restée assez obscure pour qu'on puisse les attribuer à l'abbé Cotin ou à tout autre (non Colletet, ni Chapelain, qui signent dans le recueil) aussi bien qu'au Père de l'Académie françoise. (Voyez, à la fin de cette édition, les notes 18, 21, 24, 27, 29, 33.)
[33] La baronnie de Montausier fut érigée en marquisat, en 1644, par lettres patentes données à Paris, au mois de mai de la même année. Ce marquisat fut ensuite érigé en duché-pairie, en 1664. (Voyez le P. Anselme, Hist. généal., t. V, pp. 1 et 20.)
[34] Molière, dans les Précieuses, a ridiculisé les marquis sans marquisat, et l'on connaît cette pointe de Scarron, dans son Roman comique:
«... Enfin il se tint à la fille d'un marquis de je ne sais quel marquisat: car c'est la chose du monde dont je voudrois le moins jurer, dans un temps où tout le monde se marquise de soy-mesme, je veux dire de son chef.»
[35] C'est par erreur qu'on a donné cette date de 1633. Hector de Sainte-Maure, baron de Montausier, fut blessé d'un coup de pierre à la tête, devant Bornéo, et succomba le 20 juillet 1635. Sans cet accident, M. de Montausier, l'aîné, eût peut-être épousé Julie d'Angennes; c'est du moins ce que nous apprend Tallemant: «On avoit parlé autrefois, dit l'intéressant anecdotier, de marier madame de Montauzier à feu M. de Montauzier, aisné de celuy-ci.» A la mort de son frère, Montausier le jeune avait dejà commencé à préparer la Guirlande, dont les madrigaux devaient être presque tous rassemblés.
[36] Chapelain avait partagé son poëme en vingt-quatre chants, dont les douze premiers seuls parurent en 1656. Jusque-là sa renommée n'était fondée que sur des petits ouvrages de poésie: odes, sonnets, madrigaux, tous assez bons pour ne pas nuire à la haute idée d'un poëme, fruit de tant de veilles, et que la France entière semblait attendre impatiemment. (Voyez d'Olivet, Histoire de l'Académie françoise; Guizot, Corneille et son temps. Paris, Didier, nouvelle édition, 1866.)
[37] Voyez la note 2, aux Notes et Variantes.
[38] «Julie faisoit paroître une grande admiration pour la valeur de ce prince, dit également Huet (Huetiana, p. 105). Elle avoit son portrait dans sa ruelle et prenoit plaisir à dire qu'elle ne vouloit pas d'autre galant que lui. M. de Montausier étoit pourtant son galant fort ardent et fort déclaré.»
[39] (Œuvres de Voiture, lettre VII.) Cette lettre fut écrite, sous le nom du roi de Suède, à mademoiselle de Rambouillet, en mars 1632. Voiture, ayant fait travestir cinq à six hommes en Suédois, les envoya en carrosse à l'hôtel de Rambouillet où ils se présentèrent comme ambassadeurs de Gustave-Adolphe, en remettant à Julie d'Angennes, avec cette lettre, un portrait du grand conquérant.
[40] Robert, peintre et graveur à la pointe, né à Langres, vers 1610, mort en 1684. Il peignait en miniature pour Gaston de France, duc d'Orléans, et excellait dans la peinture des plantes, fleurs et insectes. Nous avons vu, au Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale, un fort intéressant recueil qui fait honneur à cet artiste: c'est un grand in-folio portant le no 1199, en 2 volumes, cotés J. C. 33, sous le titre de: Plantes dessinées à la sanguine, par Robert, tomes I et II. Les dessins sont délicats et d'une merveilleuse exécution, bien qu'un peu affaiblis par le temps.
[41] Nicolas Jarry, né à Paris, vers 1620, mort vers 1670. Tout ce qui est sorti de la main de cet inimitable artiste passe pour chef-d'œuvre. Son talent dans l'art calligraphique est au-dessus de tout éloge; il a effacé tous ceux qui l'ont précédé ou suivi dans la même carrière. (Dictionnaire de bibliologie, par Gabriel Peignot, 1802, t. II, p. 388.—Le Dictionnaire des artistes, de l'abbé de Fontenac, 1776, reste muet sur Jarry.)
Ce fameux calligraphe avait à peine vingt et un ans, lorsqu'il écrivit la Guirlande de Julie; six ans plus tard, il fit un autre chef-d'œuvre: les Heures de Notre-Dame, in-8° de 120 feuillets. Il reçut plus tard de Louis XIV le brevet de maître écrivain et de noteur de la musique du roy.
Le recueil manuscrit de Maurepas attribue même à Jarry le dessin et la peinture des fleurs de la Guirlande.
[42] Ce manuscrit est relié en maroquin rouge, avec filets, et recouvert d'un étui en peau de frangipane; le chiffre, imprimé en or, est semé sur le maroquin; il est formé des lettres J.-L. (Julie-Lucine), écrites à la fois de gauche à droite et de droite à gauche.
[43] Marie-Julie de Sainte-Maure, née vers 1646, mariée en 1664, à Emmanuel de Crussol, duc d'Uzès, morte le 14 avril 1695. Tallemant des Réaux, dans ses Historiettes, lui a réservé quelques lignes sous ce titre: «La petite Montauzier». Il y raconte très-agréablement les reparties précoces de la jeune et chère enfant de Julie d'Angennes. La Vie de Montausier que nous avons citée fut écrite par le P. Petit, jésuite, d'après les Mémoires de la duchesse d'Uzès.
[44] C'est du cabinet de M. de Gaignères, auteur principal de cette Notice, qu'il est question ici.
[45] C'est le second qu'il faudrait dire, car c'est du manuscrit in-4o que l'auteur veut parler. Il est annoncé comme imprimé dans le Catalogue de M. Crozat de Tugny (in-8o, à Paris, chez Thiboust, 1751), dont la vente fut faite au commencement d'août de cette même année. Il y fut adjugé au marquis de Courtanvaux, au prix surprenant de 3 francs. M. P. F. Didot jeune l'acheta, à la vente de ce dernier, pour la somme, non moins étonnante, de 3 fr. 75; et c'est d'après cet in-4o que l'édition de 1784 fut donnée par ce même imprimeur.
[46] Nous ne pouvons suivre au delà les changements de propriétaire que ce manuscrit a dû subir. Il n'est probablement pas resté dans la famille des Didot. En tous cas, le savant bibliophile M. Ambroise Firmin Didot ne le possède pas.
[47] C'est-à-dire le premier. La rédaction de cette Notice est fautive: la marche à suivre était de décrire à la suite l'in-folio, l'in-octavo, et, en dernier lieu, l'in-quarto. Nous ne sommes pas étonné des nombreuses erreurs qui se sont glissées dans les différentes bibliographies de la Guirlande, qui toutes ont pris cette Notice pour guide.
[48] Catalogus librorum viri nobilis D. equitis D. B*** (Bauche). Parisiis, 1726 (n° 785, p. 70.)
[49] Jules Robert de Cotte, mort en 1767, fils de Robert de Cotte, élève et beau-frère de Mansard. Ce fut lui qui disposa l'aménagement de la Bibliothèque du roi, dans le palais Mazarin.
[50] M. le duc de La Vallière le paya, à cette vente, 780 fr.
[51] Catalogue du feu duc de La Vallière, t. II, p. 382, no 3247. La notice de l'abbé Rive, citée plus haut (Didot, 1779), fut vendue, sous le no 3249, la somme de 15 fr., à cette même vente.
[52] M. Ch. Nodier, dans son édition, a reproduit ces lignes, sans annoncer que M. le duc d'Uzès était devenu possesseur de ce précieux volume. Après la vente La Vallière, il fut acquis par madame la duchesse de Châtillon, à la mort de laquelle il passa chez la duchesse d'Uzès, sa fille. Il appartient aujourd'hui à M. de Crussol, qui l'a reçu de son père, le duc d'Uzès. Il figurait à l'exposition organisée à Paris, au profit des Alsaciens-Lorrains, en 1874. On a offert plus de cent mille francs de cet admirable manuscrit au duc d'Uzès, qui s'est empressé de refuser.
Madame la duchesse de Châtillon se rendit sans doute propriétaire de ce chef-d'œuvre à Hambourg, en 1795, car nous trouvons, dans la Botanique littéraire de madame de Genlis (Paris, chez Maradan, libraire, 1810, p. 190), cette intéressante note touchant ce manuscrit: «Ce monument intéressant de la galanterie du XVIIe siècle, passé dans des mains étrangères (sans doute par les malheurs de la Révolution), se trouvoit transporté à Hambourg en 1795, et il étoit en vente... On ignore quelle est la personne qui en fit l'acquisition.» (Cette vente eut donc lieu onze ans après celle du duc de La Vallière.)
[53] Ce manuscrit, sur vélin in-8o, relié en maroquin rouge, vient de la bibliothèque de l'abbé de Rothelin, dont il porte les armes, gravées en taille-douce, collées sur l'intérieur du premier carton de la couverture. Le Catalogue de l'abbé de Rothelin n'en faisant pas mention, il est probable qu'il aura été donné, par celui-ci, à M. de Boze en même temps que l'in-folio. Le corps de ce manuscrit commence à la page 3, par le madrigal de Zéphire à Julie; il finit à la page 70, et il est suivi d'une table de 5 feuillets, dressée comme celle de l'in-folio. Notre édition se trouve donc presque en tout point conforme à ce manuscrit, sur lequel le recueil de Maurepas prit copie, et non sur l'in-folio, comme on semble généralement le supposer.
[54] Ce volume manuscrit a sans doute suivi le destin du superbe in-folio: les acquéreurs de l'un se seront faits adjudicataires de l'autre, et ils durent ainsi fraternellement arriver dans la bibliothèque du duc de La Vallière, à la vente duquel le sort des enchères les sépara.
[55] Brunet, dans le Manuel du libraire, annonce cet in-octavo vendu 406 francs à la vente La Vallière (no 3248, p. 384, t. II), 622 francs à la vente d'Hangard, 250 francs à la vente de Febvre, et enfin 2,900 francs à la vente du dernier de Bure, qui eut lieu en 1853. Il fut alors acquis par M. le marquis de Sainte-Maure, dans la famille duquel il a dû rester.
[56] Nous signalons l'analogie qui existe entre ce sonnet et celui de Voiture, qui débute ainsi:
Sous un habit de fleurs, la nymphe que j'adore, etc.
(Voyez l'édition de Voiture donnée par A. Ubicini. Paris, Charpentier, t. II, p. 309.)
[57] Recueil de chansons, vaudevilles, sonnets, épigrammes, épitaphes et autres vers satiriques et historiques, avec des remarques curieuses depuis 1389 jusqu'en 164... (Vol. 1er, p. 527.)
Bibliothèque nationale, département des manuscrits. FR. 12, 616.
[58] Mélanges de vers et de prose, petit in-folio; belles-lettres, 145 pp. 1087 et suivantes. (Voyez Madrigaux inédits, p. 79 de ce vol.) Bibliothèque de l'Arsenal, mss., B. L., n° 151.
[59] Poésies choisies de MM. Corneille, Benserade, de Scudéry, Bois-Robert, Cotin, etc., 5 vol. in-12. (Paris, Ch. de Sercy, 1657-1666, t. II, p. 237.) A part les trois madrigaux de Corneille, aucune pièce de la Guirlande n'est signée dans ce recueil.
[60] Vie de M. le duc de Montausier, gouverneur de Monseigneur le Dauphin, par N*** (Nicolas Petit), Paris, Rollin et Genneau, 1729, 2 vol. Les madrigaux se trouvent à la fin du tome II.
[61] M. Renouard, dans le Catalogue d'un amateur, prétend que cette édition de Didot (qu'on peut considérer comme édition princeps) fut tirée à 90 exemplaires, et Brunet affirme qu'elle le fut au moins à 250. De toutes manières, ce livre est devenu excessivement rare, et son prix est très-élevé dans les ventes où il figure.
[62] Cette édition, copie fidèle du texte de 1784, est sur papier vélin double satiné, et d'une forme carrée peu agréable. Bien que relativement rare, ce petit volume est orné de dessin-enluminés si médiocres d'exécution, qu'ils sembleraient destinés à un manuel de botanique plutôt qu'à la Guirlande de la belle Julie.—Il est douteux, comme le dit Nodier, que cette édition passe jamais du boudoir des dames dans le cabinet du bibliophile.
[63] La Guirlande de Julie expliquée par les annotations de M. Amoreux suit le texte des éditions précédentes; mais les éclaircissements et notes de l'éditeur portent peut-être trop sur la flore de chaque madrigal pour ne pas assez s'attacher au madrigal lui-même.—Cependant, bien que M. Amoreux se soit éloigné du but où il eût dû grouper ses notes, son édition est intéressante et digne d'être consultée.
[64] La collection des Petits Classiques françois, si recherchée aujourd'hui, a prêté sa charmante typographie à la Guirlande de Julie, qui en fait partie.—M. Ch. Nodier, associé de N. Delangle, s'est contenté de réimprimer élégamment l'édition de 1784, avec toutes ses erreurs, sans y joindre la moindre note.—C'est sous la forme d'un simple petit avertissement que le fin bibliophile a prouvé sa collaboration à cette nouvelle édition.
[65] La galanterie de M. de Montausier ne pouvait être mieux précédée que de la riche étude des mœurs littéraires du XVIIe siècle que M. Ch. L. Livet peint si habilement dans Précieux et Précieuses. M. Livet nous introduit à l'hôtel de Rambouillet, où rien ne nous échappe. Avec lui nous vivons la vie de tous les littérateurs connus de l'époque; leur langage imagé refleurit comme aux beaux jours, et nous voyons vigoureusement dessinées, défiler devant nous, les silhouettes de Scudéry, Boisrobert, René, Le Pays, l'abbé Cotin, l'abbé d'Aubignac et tant d'autres.—C'est pour terminer cette étonnante résurrection et placer dans son vrai milieu l'œuvre de Montausier que M. Livet donne la Guirlande de Julie à la fin de son volume.—Son édition est correcte, sérieuse, et revue avec le plus grand soin sur le manuscrit original que possède aujourd'hui M. le duc d'Uzès.
[66] Voyez l'Avertissement que nous donnons aux Madrigaux inédits.
[67] Tallemant des Réaux (Historiette de Montausier le cadet). Chapelain, dans une lettre écrite à Montausier, en Alsace (en avril 1640), confirme le bavardage de l'anecdotier; car, en parlant de Voiture, il l'appelle: la suffisance de votre aversion.
[68] Voiture fit son voyage d'Espagne vers 1633, juste à l'époque où fut faite en principe la Guirlande de Julie (d'après notre opinion), bien qu'elle n'ait été calligraphiée et offerte qu'en 1641.
[69] Ms. de Conrart, t. X, p. 604.
[70] Remarques préliminaires de l'édition donnée par Nodier et citée plus haut.
[71] Malleville avait une telle facilité à composer des sonnets qu'il en fit trois pour la Belle Matineuse.—L'abbé Ménage les cite dans une dissertation curieuse qu'il a faite sur tous les sonnets que produisit cette manière de concours. D'après lui, ce sont des imitations d'Annibal, célèbre poëte italien qui avait traité le même sujet.
[72] Voyez Poésies de Malleville, édition A. Courbé, Paris, 1649, in-4°. Tous les madrigaux y figurent.—Nous avons ajouté à la fin de notre édition les quatre pièces qui manquent au manuscrit.
[73] Voyez page 92: Fleurs inédites de M. de Scudery.
[74] Scudery, Poésies diverses, Courbé, 1649, in-4°.—Neptune à la nymphe de Seine pour Madame la marquise de Rambouillet, p. 257.
[75] Le Cabinet de M. de Scudery, etc., à Paris, chez A. Courbé, 1646, in-4°, p. 124.—Ce portrait, sans doute égaré ou détruit, malgré toutes les recherches faites pour le découvrir, est complétement inconnu aujourd'hui.
[76] Voyez l'Histoire de Pierre Corneille, par J. Taschereau, ainsi que les notes que nous donnons à la fin de notre édition sur les madrigaux signés C.
[77] La Bruyère, Caracteres, ch. XII; Vigneul de Marville, Mélanges d'histoire et de littérature, t. I, p. 167.
[78] Guillaume Colletet, académicien en 1634 et mort en 1659, paraît être un poëte du XVIe siècle égaré dans le XVIIe. Sa fécondité fut énorme et son talent trop peu goûté. Cet épicurien passa sa vie entre Apollon et Bacchus, sans s'embarrasser du lendemain; aussi, mourut-il pauvre, et Chapelain, dans ses Lettres, dit qu'il fallut quêter pour l'enterrer.—Voyez: Histoire de l'Académie françoise; Moreri, Dictionnaire, et les Grotesques, de Th. Gautier, qui a peint avec son coloris habituel ce bohème d'un autre âge.
[79] Philippe Habert, l'un des premiers de l'Académie française, en 1629, mourut dans l'année 1637. Comme la Guirlande de Julie ne fut écrite et offerte qu'en 1641, c'est donc une nouvelle preuve qui confirme notre opinion sur la date de 1632, où fut commencée la Guirlande de Julie.—Les poésies diverses de cet auteur se trouvent dans différents recueils, et, si l'on en croit Sorel dans sa Bibliothèque françoise, quelques-unes furent mises au jour en un volume.—Son principal ouvrage est le Temple de la mort, qui, selon Pellisson, est une des plus belles pièces de notre poésie française.
[80] Simon Arnauld de Pomponne, né en 1618, mort en 1699, est fils d'Arnauld d'Andilly et neveu du grand Arnauld. Il succéda à M. de Lionne aux affaires étrangères, et c'est sous son ministère que fut conclue la glorieuse paix de Nimègue. Voyez les Mémoires du marquis de Pomponne, publiés en 2 vol. in-8o, à Paris, en 1862. On trouve, dans le tome II du Recueil de poésies diverses, par M. de La Fontaine, pages 113 et 114, un fort beau sonnet pour le tombeau de M. le duc de Weymar, et une ode superbe sur la Sagesse, de la composition de M. de Pomponne.
[81] Jean Desmarests de Saint-Sorlin fut reçu à l'Académie française en 1634, et mourut à Paris en 1676, âgé de plus de 80 ans. Outre son poëme de Saint Louis, le plus connu, il en composa dix autres, plus ses pièces de théâtre: les Visionnaires, Roxane, Scipion, Mirame, et l'Europe. Quantité de pièces de vers de ce fécond auteur se trouvent à la fin de ses œuvres de théâtre et dans différents recueils de poésies. Voyez: Histoire de l'Académie française; Dictionnaires de Bayle et de Moréri; Baillet, Jugement des Sçavans sur les poëtes modernes, etc.
[82] Œuvres poétiques du père Le Moyne, in-f°, 1672, p. 446.—A l'exemple de Montausier, sans doute, le père Le Moyne offrit à Mlle d'Angenois une guirlande composée de fleurs du Parnasse cueillies par la main des Muses. Nous n'avons pu trouver le texte exact de cette nouvelle Guirlande, dont nous n'avons eu connaissance que par la lettre d'envoi (p. 330. Epître en vers). Dans ce même volume (p. 435), nous trouvons la douce épigramme suivante sur le portrait de Julie:
Sage et noble Julie, estoit-ce pas assez
Qu'avecque ton esprit, qu'avecque ton visage,
Aux illustres du temps et des âges passez
Ton heureuse naissance eust osté l'avantage,
Sans que ce beau portrait demeurât pour ternir
Celle des siècles à venir.
[83] Germain Habert, abbé de La Roche, abbé et comte de Cérisy, frère de Philippe Habert, commissaire de l'artillerie, cité plus haut.—L'abbé de Cérisy fut un des premiers de l'Académie. Il a donné: en prose, La vie du cardinal de Berulle, in-4°, Paris, 1646;—La métamorphose des yeux de Philis en Astres, in-4°, Paris, 1639.—Il fit beaucoup d'autres vers non imprimés.—Mort en 1654.—Voyez la Muse historique de Loret, Gazette du 6 juin 1654.
[84] Estienne Martin, sieur de Pinchesne, contrôleur ancien et vétéran de la maison du roy, né en 1616, mort en 1705.—Ce poëte, neveu de Voiture (dont il fit l'éloge en tête de ses œuvres), était fort jeune lorsqu'il composa ses madrigaux pour la Guirlande. Les poésies qu'il fit par la suite marquent un talent original et personnel, une imagination vive et colorée, une forme correcte et pure.—Boileau ayant dédaigné de le débarbouiller de son fiel, il est resté inconnu des chercheurs de nos jours. Voyez:
1° Poésies meslées du sieur de Pinchesne, dédiées à Monseigneur le duc de Montausier, in-4o, 1672;
2° Amours et poésies chrestiennes de M. de Pinchesne, in-4o, 1674;
3° Géorgiques de Virgile, traduites en vers françois par Martin de Pinchesne, in-8, Rouen, 1708.
[85] L'abbé Goujet, dans sa Bibliothèque françoise (tome XVII, p. 373), attribue à Chapelain, outre la Couronne Impériale, une pièce intitulée l'Aigle de l'Empire à la princesse Julie. Cette épistre de 96 vers environ, qui est insérée dans le Recueil de Sercy (tome V, p. 400), ne peut être de Chapelain, car elle se trouve signée des initiales D. M. (sans doute Desmarests). Dans le même Recueil se trouve une pièce qui est assurément de Chapelain, c'est un sonnet sur le mariage de M. le marquis de Montausier. Voyez, sur la Couronne Impériale, la note 2, aux Notes et Variantes.
[86] Antoine Godeau, évêque de Grasse et de Vence, de l'Académie française; né vers 1605, mort en 1672. Les ouvrages de Godeau sont tellement considérables que nous renvoyons au Catalogue académique, dressé par l'abbé d'Olivet.—M. de Grasse présida au mariage du marquis de Montausier et de Julie d'Angennes. «Ce fut à Rueil que les nopces se firent, dit Tallemant, et par une rencontre plaisante, celuy qu'on appeloit autrefois le Nain de la princesse Julie fut celuy-là même qui les espousa.»
[87] Robert Arnaud d'Andilly, né le 28 mai 1589, mort le 27 septembre 1674.—M. d'Andilly composa de nombreux ouvrages de poésies chrétiennes, qui (au dire d'un de ses contemporains) font autant d'honneur aux lettres qu'à la religion.—Voyez la piquante historiette de Tallemant des Réaux sur ce saint homme.
[88] Jean Ogier de Gombaud, de l'Académie françoise, né vers 1570, mort en 1666.—Voyez, sur ce curieux poëte, l'historiette de Tallemant, et le portrait si originalement étudié par Paul de Musset dans les Originaux du XVIIe siècle, Paris, Charpentier, 1848.
[89] Gédéon Tallemant, seigneur des Réaux, né en 1619, mort en 1692. MM. Monmerqué et Paulin-Paris ont écrit sur Tallemant une longue et savante étude, insérée dans les Historiettes, publiées chez Techener.
[90] Pierre-Arnauld de Corbeville, mestre de camp, général des carabiniers, de la grande famille des Arnauld, que Balzac appelait la famille éloquente: mort en 1651.—Voiture parle souvent de lui dans ses poésies et ses lettres, et c'étoit au moins, dit Tallemant, le Racan de Voiture en poésie burlesque.
[91] Henri-Louis Habert, sieur de Montmor, conseiller du roy en ses conseils, maître des requêtes, de l'Académie française, et cousin de Philippe et Germain Habert, cités plus haut.—Mort vers 1635.—Cet auteur fit peu de vers français; à part quelques épigrammes, on ne connaît de lui que des études latines.
[92] Charles d'Angennes, marquis de Rambouillet, né en 1577, mort en 1652.
[93] Voyez la note que nous donnons plus loin, aux Madrigaux de Scudéry, imprimés en 1636, avec un très-intéressant Advertissement.
M. Amédée Roux, dans son remarquable ouvrage Montausier, sa vie et son temps (Paris, Didier, 1860), relève une erreur du père Petit, jésuite, qui porte la présentation des deux Montausier à l'hôtel de Rambouillet en 1634. C'est dans l'hiver 1631-1632 que cette présentation eut lieu (affirme M. A. Roux). Or, par un curieux rapprochement qui vient fortifier notre assertion sur la date où fut conçue la Guirlande, Tallemant nous apprend que le baron de Sainte-Maure fut amoureux, dès qu'il la vit, de Julie d'Angennes, et que cette dernière dut s'en apercevoir, «car dès le temps du Roy de Suède il avoit commencé à travailler à la Guirlande». Le temps du Roi de Suède, n'est-ce pas l'époque des grandes guerres et de la mort du héros, c'est-à-dire 1631 et 1632? (Voyez Tallemant des Réaux, historiette de Montauzier.)
[94] Appendice à la savante étude des Précieux et Précieuses (Paris, Didier, 1870, 2e édition).
[95] Ces madrigaux inédits, destinés à la Guirlande de Julie nous sont fournis par une copie, d'ailleurs très-incomplète, qui se trouve dans un des volumes manuscrits de Conrart, indépendant des deux collections bien connues de l'Arsenal. (Manuscrit petit in-fo, Mélanges de vers et prose, Belles-lettres, 145, pages 1087 et suivantes.) Les madrigaux de ce manuscrit ne portaient pas primitivement de noms d'auteurs. M. J. B. A. Soulié a restitué sa paternité connue à chaque madrigal, et a dressé une nomenclature des pièces qui manquent à cette version manuscrite. Tous les madrigaux que nous donnons ici sont anonymes et ne figurent pas dans le manuscrit original.
Ce texte est scrupuleusement conforme à l'orthographe du manuscrit.
[96] P. 1097 du manuscrit.
[97] P. 1100 du manuscrit.
[98] P. 1102 du manuscrit.
[99] P. 1103 du manuscrit.
[100] P. 1104 du manuscrit.
[101] P. 1106 du manuscrit.
[102] Allusion à la sœur de Julie, Angélique-Claire d'Angennes (mariée à François-Adhémar de Monteil, comte de Grignan, morte le 22 décembre 1664).
[103] P. 1108 du manuscrit.
[104] P. 1108 du manuscrit.
[105] Les (?) Dieux.
[106] P. 1109 du manuscrit.
[107] Arthénice est l'anagramme célèbre que Malherbe composa pour Mme de Rambouillet (Catherine de Vivonne), mère de Julie.
[108] P. 1109 du manuscrit.
[109] Le titre de cette pièce a été écrit de la main même de Conrart, ainsi que le mot EN, qui paraît deux fois dans le dernier vers, comme correctif à
Je gaigne plus de toy que je ne perds de lui.
[110] Poésies de Malleville, in-4o, chez Augustin Courbé, Paris, 1649, p. 264. (Également dans l'in-12, à Paris, chez Nicolas Bessin, 1659.)
[111] Poésies, 1649, p. 268.
[112] Poésies, 1649, p. 268.
[113] Poésies, 1649, p. 269.
[114] Ce curieux avertissement et les madrigaux suivants se trouvent à la suite du Vassal généreux, poëme tragi-comique, dédié par M. de Scudéry à Mlle de Rambouillet (Paris, A. Courbé, 1636). Ce qui donne une grande valeur à ce document, c'est l'année même de sa publication, 1636. La Guirlande ayant été mise au jour en 1641, il en résulterait que les madrigaux étaient achevés depuis fort longtemps lorsque Jarry se mit à l'œuvre.
Scudéry fut présenté à l'hôtel de Rambouillet, vers 1631, par le poëte Chandeville, son ami, mort quelque temps après.
[115] Nous avons suivi textuellement, pour ces sept madrigaux, l'orthographe de l'édition de Courbé.
[116] Ce premier vers du Soucy vient corroborer notre opinion sur le tri que M. de Montausier dut opérer, avant que de livrer sa Guirlande au célèbre calligraphe Jarry.
[117] Nous donnons cette table d'après celle dressée par l'abbé Rive à la suite de sa Notice sur la Guirlande.—Pour plus de commodité, nous avons placé en premier lieu la table par ordre alphabétique des auteurs.
Achevé d'imprimer
LE DIX DÉCEMBRE MIL HUIT CENT SOIXANTE-QUINZE
Pour OCTAVE UZANNE
PAR D. JOUAUST
IMPRIMEUR BREVETÉ
338, Rue Saint-Honoré, 338
A PARIS