Title: L'Illustration, No. 3233, 11 Février 1905
Author: Various
Release date: September 10, 2010 [eBook #33699]
Language: French
Credits: Produced by Jeroen Hellingman and Rénald Lévesque
Supplément de ce numéro: LE MATIN DANS LA HÊTRAIE,
gravure hors texte
de double page.
LES FEMMES DE NOS MINISTRES.
--Mme Rouvier dans son salon
au ministère des Finances.
Photographie prise spécialement pour
l'Illustration par M. Paul Boyer.--Voir l'article, page 84.
Nous commencerons la semaine prochaine la publication d'une oeuvre nouvelle de Daniel Lesueur: LA FORCE DU PASSÉ
Les abonnés fidèles de l'Illustration seront heureux de retrouver dans leur journal la signature de l'auteur de Passion slave, de Haine d'amour, de Justice de femme, de A force d'aimer, quatre des romans les plus appréciés que contient notre collection.
Les lecteurs du Marquis de Valcor, qui a obtenu, l'an dernier, auprès du public et de la critique, un si retentissant succès, auront dans l'ILLUSTRATION la primeur d'un roman de la plus haute valeur littéraire et qui ne le cédera en rien comme intérêt à l'oeuvre précédente de DANIEL LESUEUR.
La semaine prochaine également nous publierons: LA MASSIÈRE, l'émouvante et délicieuse comédie de M. JULES LEMAITRE, jouée à la Renaissance par Mme Brandès et Judic et par M. Guitry.
Paraîtront ensuite successivement:
LA RETRAITE, de BEYERLEIN, l'oeuvre la plus célèbre du théâtre allemand contemporain, traduite par MM. Rémon et Valentin, et que va représenter le théâtre du Vaudeville;
L'ARMATURE, par M. BRIEUX, d'après le roman de M. PAUL HERVIEU (Vaudeville);
LES VENTRUS DORÉS, par M. ÉMILE FABRE (Odéon);
LE DUEL, par M. HENRI LAVEDAN (Comédie-Française);
MONSIEUR PIÉGOIS, par M. ALFRED CAPUS (Renaissance);
LE GOÛT DU VICE, par M. HENRI LAVEDAN (Gymnase); etc., etc.
Nous nous connaissons à peine et nous sommes devenus deux amis. A Paris, ces rencontres ne sont pas rares. Je le vois, et je m'arrête auprès de lui deux ou trois fois par semaine en gagnant, à travers les Tuileries, les boulevards, à l'heure du déjeuner. Je le retrouve toujours à la même place, exactement; sur la lisière du jardin, tout près du pavillon de Flore. Derrière nous, la grosse horloge de la gare d'Orsay, de l'autre côté de l'eau, marque onze heures. Devant nous, dans l'échancrure que dessine à cet endroit la rue de Rivoli, l'image dorée de Jeanne d'Arc à cheval étincelle sous le soleil. De grands carrés de gazon ras, sans couleur, au centre desquels s'érigent deux vases volumineux en marbre blanc, bordent l'allée où il s'est arrêté et où, tout de suite, une trentaine de moineaux l'ont rejoint. Il a posé à terre une grosse serviette en toile cirée et, ayant dit bonjour à ses petits amis, il cherche au fond de ses poches de la mie de pain, qu'il leur distribue. C'est son travail du matin et c'est peut-être tout son métier.
Il l'exerce avec une application qui est touchante.
Sa mise n'est pas celle d'un pauvre homme. Il est chaussé de gros souliers bien cirés, vêtu d'un pardessus qu'ornent des manchettes et un collet de faux astrakan, coiffé d'un chapeau noir, en feutre mou; la cravate est bien nouée, sur un faux col d'immaculée blancheur. Face énergique et malicieuse, proprement rasée, un peu rougie par l'air frais du matin; moustache épaisse et grisonnante de vieux soldat; binocle de bureaucrate, qu'un gros cordon retient autour du cou. Des badauds l'entourent; il est une «figure parisienne», et il le sait; aussi s'est-il fait photographier dans les postures diverses où nous le retrouvons chaque matin, occupé à nourrir ses moineaux en les haranguant; et cela forme un petit jeu de cartes postales illustrées, qu'il tire de temps en temps de sa serviette et vend à ceux que ses discours font rire. Un jour, je lui en ai acheté quelques-unes; notre amitié date de ce matin-là. A présent il me reconnaît dès que je m'arrête au milieu du groupe qui l'écoute, et bonimente en me souriant. Il a de la fantaisie et cette verve familière qu'on ne voit qu'aux camelots de ce pays-ci. Sur chacun de ces petits oiseaux il sait une histoire, qu'il raconte tout en pulvérisant la mie de pain au fond de ses poches et en projetant d'un geste mécanique les boulettes minuscules qu'un petit bec, chaque fois, cueille au vol. Son geste, cependant, n'est pas toujours le même et varie suivant le caractère et les moyens physiques de chacun. Il nous les présente: il y a les timides, les débiles, les éclopés qui guettent d'en bas, en sautillant, le pain qu'on leur jette; il y a les familiers, les effrontés qui volettent autour de sa poche et viennent happer la pâture au bout de ses doigts; il y a les paresseux qui attendent, pour se déranger, qu'on les appelle; il y a les «sportifs» qui préfèrent à la boulette tombée à terre, celle que la main lance en plein ciel et qu'il faut poursuivre et rattraper. Il leur donne des prénoms ou des sobriquets. «Ces deux-ci, dit-il, sont tellement pareils qu'il m'arrive de les confondre.»
J'aime ce philosophe qui a voué sa vie à l'unique joie de donner à manger aux petits oiseaux. Le reste lui est bien égal. Il ignore, j'en suis sûre, la conférence de Hall, qui se tient à cent mètres de lui; et que, sous le drapeau du pavillon de Flore, qu'il montrait tout à l'heure à ses moineaux, un ministre qui s'appelait Doumergue est, depuis quinze jours, remplacé par un autre ministre qui s'appelle Clémentel; il n'ira point voir à l'«Oeuvre» les pièces de M. d'Annunzio; il n'a pas assisté, cette semaine, au vernissage de l'Épatant; c'est à peine s'il a entendu dire qu'il est question d'élire M. Coquelin cadet sénateur.
Indifférence coupable--ou sagesse?...
L'année 1905 a bien commencé pour les femmes. Elles viennent d'ouvrir leur troisième salon d'art (trois salons en cinq semaines); une exposition d'industries et de travail féminins s'est organisée aux Champs-Élysées sous leurs auspices; un journal a groupé vingt et une d'entre elles en académie et libéralement mis à la disposition de cette académie un prix qu'une femme a remporté. M. Léon Frapié, lauréat de l'académie Goncourt, rencontre en Mme Myriam Harry une émule qu'en un jour le vote des «vingt et une» a rendue célèbre. Et, comme je félicitais tout à l'heure l'une d'elles, romancière presque illustre, de ce succès féminin, elle eut un haussement d'épaules mélancolique:
«Gagnées par l'un ou l'autre sexe, me dit-elle, ces sortes de victoires sont tristes, parce qu'elles montrent bien en quel état de délaissement la littérature est tombée. Il est glorieux, sans doute, de gagner au concours une somme d'argent, que ce soit l'Académie française qui la décerne, ou la Société des Gens de lettres, ou les «Goncouristes», ou nous-mêmes; mais il est navrant de penser que ces récompenses-là sont devenues nécessaires...
»Remarquez, en effet, que la littérature est la seule branche d'art où abondent ainsi les prix d'argent... On laisse se tirer d'affaire les peintres, les graveurs, les sculpteurs, les architectes; à peine, de temps en temps, l'Institut distribue-t-il aux plus jeunes d'entre eux quelque encouragement monnayé; ce qu'ils recherchent, dans les expositions et les concours, ce sont des médailles, --et du ruban. L'argent, c'est à l'acheteur qu'ils le demandent, car il y a une clientèle pour les oeuvres d'art. Il n'y en a plus pour les livres. Jamais il ne s'en est autant publié qu'à présent; et jamais l'on n'en a moins lu. Vous donnez aux journaux le peu de loisirs que la vie vous laisse; et le métier d'homme ou de femme de lettres est devenu le dernier de tous. C'est bien ce qu'indique la libéralité des académies qui nous couronnent et des sociétés qui nous «priment». Nous sommes des marchands malheureux à qui l'on paye de temps en temps, par charité, le prix d'une marchandise--reconnue de bonne qualité--qu'ils ne vendent point... Sentez-vous ce qu'il y a d'un peu amer dans ces succès-là?»
Il paraît que mon compatriote Tolstoï est menacé d'avoir sa statue dans une rue de Paris. Cela m'inquiète...
Je me souviens de l'impression d'effarement que je reçus, il y a deux ans, de la vue de plusieurs statues de grands hommes dont Paris a orné ses jardins et ses carrefours. J'en avais rencontré d'innombrables, à l'étranger, au cours de mes voyages, et presque toujours je les avais trouvées un peu bouffonnes; à Christiania, c'étaient Ibsen et Bjornson, en redingote, juchés sur d'étroits socles cylindriques, coupés de cannelures horizontales, qui font penser à des fromages de Gruyère empilés; à Gênes, c'est Rubatlino méditant au seuil du port, la main gauche appuyée sur une petite table de boudoir dont le tapis s'orne de franges consciencieusement sculptées; c'est, à Glasgow, sur la place Saint-George, toute une foule de parlementaires, de poètes et de savants, figés en des poses de pantomime et qui encombrent de leurs gestes muets la voie publique... Il n'y a presque pas de ville à laquelle ne se rattache, dans mon souvenir, la vision de quelque grand homme un peu drôlement statufié. Et je me figurais que Paris, qui donne au monde de si jolies leçons d'élégance et de goût, n'avait pas dû subir la contagion de cette mode-là. Je m'étais trompée. Cette ville délicieuse est peuplée de statues qui font rire. Les plus grands de ses sculpteurs--aussi bien que les Génois, les Norvégiens, les Écossais et tous les autres--ont l'air de ne pas comprendre que, dans le tapage de la rue, parmi l'agitation de piétons qui se bousculent et de voitures qui s'accrochent, sous la rafale qui souffle ou la pluie qui tombe, un monsieur en redingote ou en robe de chambre, tête nue, et qui tient à la main les papiers ou le porte-plume emblématique où les oiseaux viennent se poser, a bien de la peine à n'être pas comique.
Il est juste qu'il le soit. Si le philosophe Fourier, de son vivant, s'était avisé d'aller s'asseoir, à cinquante centimètres au-dessus du niveau du sol, entre deux lignes de tramway, pour observer, de son fauteuil, les gens qui passent sur le boulevard de Clichy, la police lui eût fait respectueusement observer que ce n'était là la place ni d'un fauteuil, ni d'un philosophe en méditation, et la foule aurait pensé: «Cet homme est fou.» Et sans doute la même réflexion lui fût-elle venue à la vue de Balzac, accroupi, tout seul, en pantoufles, sur un banc, dans le courant d'air de l'avenue Friedland;--et de combien d'autres! Alors, pourquoi infliger à nos yeux la vision de ces choses improbables? Et n'est-il pas curieux que, dans le dessein de faire vrai, tant de sculpteurs s'obstinent à fixer le souvenir des grands morts en des images ainsi composées et situées qu'elles semblent un défi à la vérité même?
Il serait si facile d'immortaliser les gens plus simplement et d'une
façon qui honorait plus dignement leur mémoire! Je me souviens que, la
dernière fois que j'allai visiter Rouen (une des villes de France que je
voudrais habiter, si Paris n'existait pas), un joli spectacle me frappa.
C'était au coin d'une rue paisible, à l'endroit où s'élève la
bibliothèque de la ville. Dans l'épaisseur du mur, une niche a été
creusée au-dessus d'une vasque de marbre où chante le clapotis d'un
petit jet d'eau et, dans cette niche, il y a le buste d'un poète: Louis
Bouilhet. C'est tout le monument. Les Rouennais n'ont pas pensé qu'il
fût nécessaire, pour glorifier Bouilhet, de fournir à la postérité
l'image--en marbre--de la redingote de l'écrivain, de ses bottines, de
son fauteuil et de sa chaîne de montre. Et je pensais, en regardant
cette oeuvre toute simple, que, fussé-je le plus grand des écrivains de
mon temps, je ne souhaiterais point d'autre «commémoration» que
celle-ci: un buste, au seuil d'une bibliothèque; un nom gravé; une date;
et sous cette date, un petit bassin plein d'eau fraîche, où viennent
boire, en passant, les oiseaux et les gamins.
Sonia.
30 janvier.--Au Sénat, clôture de la discussion générale du projet de loi sur le service militaire de deux ans.
1er février.--Grève des ouvriers électriciens attachés aux usines de la Compagnie Edison fournissant la lumière électrique à plusieurs quartiers de Paris.
3.--Le Sénat, poursuivant la discussion de la loi militaire, réduit à un an, contrairement au vote de la Chambre et à l'avis du ministre, la durée du service dans le rang imposé aux élèves des grandes écoles de l'État avant leur entrée dans ces écoles.
5.--Premiers voyages ministériels des membres du nouveau-cabinet: M. Ruau, ministre de l'agriculture, et M. Dubief, à l'occasion du concours de race bovine de Charolles, assistent à un banquet démocratique, où ils prononcent des discours politiques.
30 janvier.--Le tsar approuve d'importantes mesures proposées, en conséquence de l'ukase du 25 décembre dernier, par le comité des ministres: les pouvoirs ministériels sont limités et la responsabilité ministérielle est créée par l'extension des pouvoirs du Sénat dirigeant, qui est chargé de maintenir les lois et d'empêcher qu'une ordonnance ministérielle leur soit contraire; le Sénat, rendu indépendant des ministres, reçoit le droit d'initiative en matière de législation.--La situation reste très grave à Varsovie, où 160 personnes ont été tuées ou blessées dans l'émeute de la veille; la circulation est complètement interrompue; tous les magasins, toutes les maisons, sont fermés par ordre de la police.
31.--Fin des élections législatives en Autriche-Hongrie: la défaite du cabinet est encore aggravée (160 députés libéraux, au lieu des 328 de la dernière Chambre); le parti Kossuth, qui comptait 85 députés, en a 163, 14 ballottages.--
M. François Kossuth, chef de
l'opposition hongroise.
Phot. Brod.
Succès des partisans du sultan du Maroc sur ceux du prétendant, dans la plaine de Trifa, près de la frontière algérienne. 1er février.--Le tsar reçoit, à Tsarskoïé-Sélo, une députation de 34 ouvriers des usines et fabriques de Saint-Pétersbourg, présentée par le ministre des finances et le général Trepov, gouverneur général; dans son allocution, qui a été répandue dans tous les milieux populaires, il reproche aux ouvriers de s'être «laissés séduire et tromper par des traîtres ennemis de leur patrie», et il promet d'assurer aux ouvriers les voies légales, afin d'examiner leurs demandes.--Le prince Sviatopolsk-Mirsky, ministre de l'intérieur, est remplacé par M. Bouliguine et obtient un congé de onze mois pour voyager à l'étranger. M. Mouraviev, ministre de la justice, est nommé ambassadeur à Rome et remplacé par M. Manoukhine, qui était son adjoint.--A Saint-Pétersbourg, adresse de 342 membres des académies et professeurs, déclarant que l'enseignement n'est possible qu'avec une constitution.
2.--Mariage, à Darmstadt, du grand-duc de Hesse avec la princesse de Solms-Lich.--A Saint-Pétersbourg, un pont s'écroule au moment du passage d'une troupe de cavalerie; 40 dragons sont blessés.--A Batoum (Transcaucasie), la grève est devenue générale: les agences de transports et de navigation à vapeur ont suspendu tout travail.
3.--Le comte Tisza remet la démission du cabinet hongrois à l'empereur-roi François-Joseph.--Le tsar reçoit à Tsarskoïé-Sélo 5 ouvriers délégués par la fabrique de papier de l'État.--A Lodz, en Pologne, les troupes tirent sur les grévistes.
4.--Réception officielle, à Fez, de l'ambassade extraordinaire française par le sultan du Maroc.--Insurrection dans la République Argentine, contre le président Quintana. A Buenos-Ayres, le général Godoy, ministre de la guerre, devance les insurgés à l'arsenal et rétablit l'ordre. Des tentatives insurrectionnelles sont signalées dans les provinces de Santa-Fé, Cordoba et Mendoça. L'état de siège est proclamé pour trente jours sur tout le territoire de la République.
Les opérations effectuées dans les derniers jours de janvier par l'armée russe de droite, commandée par le général Grippenberg, ont été très importantes. Nous nous en occupons plus loin (page 96) en publiant un croquis montrant les positions russes et japonaises avant et après la bataille.
A l'occasion de ces opérations, de graves dissentiments se sont produits entre le général Kouropatkine et le général Grippenberg. Celui-ci revient à Saint-Pétersbourg et est remplacé à la tête de la 2e armée par le général Mylov.
Une collation servie pour le pape et les prélats, au
Vatican, après la cérémonie de consécration d'un évêque.
Selon le
protocole, une petite table isolée est dressée pour le pontife,--Phot.
Vetici.
A la date où paraîtra ce numéro de l'Illustration, le gouvernement aura probablement déposé sur le bureau de la Chambre son projet de loi destiné à réaliser la séparation des Églises et de l'État, une des principales réformes inscrites au programme du nouveau cabinet, comme elle l'était au programme du cabinet Combes. C'est là une question brûlante: depuis plusieurs mois déjà, la rupture diplomatique entre la France et le Saint-Siège est un fait consommé, la dénonciation du Concordat paraît imminente; mais l'éventualité plus ou moins prochaine de cet événement considérable n'est pas pour détourner du Vatican l'attention de notre pays; il semble, au contraire, qu'en raison même des circonstances elle se porte plus que jamais vers les choses de Rome, de cette Rome papale, où, malgré toutes les tempêtes, la tradition de l'Église catholique demeure immuable.
Là, dominant les soucis de la politique, le souverain pontife continue d'exercer son ministère avec sérénité. Ces jours derniers, il procédait à la consécration d'un prélat italien, l'évêque de Bergame. Pie X officia en personne à l'autel de la chapelle Sixtine; puis, après l'accomplissement de la cérémonie suivant les rites solennels, il prit part à la collation d'usage. Ces agapes offrent une particularité caractéristique: le pape ne s'assoit pas, ainsi que Jésus, à la même table que ses disciples; il a son couvert mis sur une petite table séparée, d'où il préside au repas. Peut être, in petto, regrette-t-il son isolement et trouve-t-il bien rigoureuse cette prescription du protocole sacré, dont les inflexibles gardiens considèrent la stricte observation comme une des conditions nécessaires de la hiérarchie ecclésiastique.
M. Henri Germain, d'après son portrait
par Bonnat.--Ph. Braun, Clément et Cie.
M. Henri Germain, président du conseil d'administration du Crédit Lyonnais, qui vient de s'éteindre à l'âge de quatre-vingts ans, était né à Lyon le 19 février 1824. C'est dans cette ville qu'il avait jeté, en 1863, les premiers fondements de l'établissement de crédit destiné à prendre, sous sa haute direction, un développement et une importance si considérables.
Financier remarquable, très expert en affaires de banque, il s'adonnait en outre à l'étude des questions économiques, envisagées surtout dans leurs rapports avec sa spécialité; aussi ses ouvrages et ses discours lui ouvrirent-ils en 1886 les portes de l'institut, section des sciences morales et politiques.
M. Germain eut, d'ailleurs, plus d'une occasion d'exposer ses idées à la tribune du parlement. Député de l'Ain au Corps législatif en 1869, il avait ensuite représenté ce département à l'Assemblée nationale, puis à la Chambre, siégeant du côté de la gauche modérée. Depuis une douzaine d'années, il avait renoncé à la vie politique pour consacrer jusqu'à la fin son activité à l'oeuvre dont il était le fondateur. La succession de M. Henri Germain à la présidence du Crédit Lyonnais est échue à M. Mazerat, en vertu d'une élection statutaire faite à l'unanimité.
Phot. Anthony's. Mme Chaumié. (Justice.) |
Phot. Pirou, rue Royale. Mme Berteaux. (Guerre.) |
Phot. Ogerau. Mme Delcasse. (Affaires étrangères.) |
Phot. du Louvre.Mme Bienvenu-Martin. (Instruction publique et Cultes.) |
Mme Dubief. (Commerce.) |
Phot. Waléry.Mme Ruau. (Agriculture.) |
Phot, Anthony's. Mme Bérard. (Postes et Télégraphes.) |
Phot. Stebbing. Mme Gauthier. (Travaux publics.) |
En 1902, lors de l'avènement du ministère qui vient de terminer sa carrière, l'Illustration, après avoir, comme il convenait, publié les portraits de MM. les ministres, donnait, pour la première fois, ceux de MMmes les «ministresses». L'innovation fut goûtée et l'on nous sut gré de faire cesser l'inégalité de traitement, vraiment injuste, qui, depuis trop longtemps, réservant la pleine lumière de l'avant-scène aux seuls chefs d'emploi munis du portefeuille, laissait leurs distinguées compagnes dans l'ombre de la coulisse.
«La femme d'un ministre, écrivions-nous à ce propos, est-elle une simple «particulière»? Ne partage-t-elle pas la fortune politique de son mari? N'est-elle pas pour lui, sinon une Égérie, du moins une précieuse collaboratrice, en donnant réceptions et dîners, aidant le maître de la maison à gouverner ces importantes sections de son ministère: les salons et la salle à manger? N'a-t-elle pas, elle aussi, sa «vie publique», qui consiste surtout à organiser et à présider des fêtes de bienfaisance? Enfin, tout comme l'homme en place, n'est-elle pas à l'honneur et à la peine?»
On nous pardonnera cette répétition, puisque, aussi bien, l'inauguration d'un nouveau cabinet, où figurent d'ailleurs quatre membres du précédent,--M. Rouvier, président du conseil, en tête,--nous fournit l'occasion d'une récidive justifiée par les mêmes raisons d'équité.
Ajoutons qu'elle est encouragée par la faveur du public, toujours très désireux de connaître, au moins en effigie, nos «ministresses», personnes de marque, sans caractère officiel, il est vrai, mais non sans influence, chargées d'un rôle parfois délicat, où s'exerce à merveille la diplomatie féminine, et d'autant plus dignes de nos hommages qu'elles représentent, au premier plan, ces deux choses difficiles à réaliser en politique: la grâce et l'élégance.
S. S. Pie X. Mgr Radini Tedeschi.
CONSÉCRATION DE Mgr
RADINI TEDESCHI, ÉVÊQUE DE BERGAME, DANS LA CHAPELLE SIXTINE, AU VATICAN.
Photographie G. Felici.
LE CARDINAL RICHARD, ARCHEVÊQUE DE PARIS, QUI VA CÉLÉBRER SES «NOCES DE DIAMANT.»
Photographie De Jongh, Frion succ.
Le vénérable archevêque de Paris, le cardinal Richard, âgé de quatre-vingt-six ans, et qui est à la fois le doyen de création des cardinaux français et le doyen d'âge de l'épiscopat de France, va fêter l'anniversaire qu'il est convenu d'appeler, pour les prêtres comme pour les époux, «noces de diamant», autrement dit le soixantième anniversaire de son ordination sacerdotale.
Né à Nantes en 1819, issu de l'ancienne et noble famille de Lavergne, Mgr Richard fut élevé dans le château de ce nom, puis fit ses études au séminaire de Saint-Sulpice, à Paris. Ordonné prêtre en 1845, il fut vicaire général de Nantes durant vingt années. En 1871, il devint évêque de Belley; en 1875, coadjuteur de l'archevêque de Paris, avec future succession. A la mort du cardinal Guibert, en 1886, Mgr Richard prit possession de son siège et en 1889 le pape Léon XIII lui donna le chapeau de cardinal.
LA DÉLÉGATION DES OUVRIERS DE SAINT-PÉTERSBOURG A
TSARSKOÏE-SELO.
Après leur réception par le tsar au palais Alexandre, le
1er février, les ouvriers délégués des usines et des fabriques de
Saint-Pétersbourg ont été reconduits à la gare dans les voitures de la
cour. Le palais Alexandre est la résidence particulière du tsar à
Tsarskoïé-Sélo; il est situé à peu de distance du grand palais Catherine
où fut reçu M. Loubet en 1902.
D'après un croquis de notre envoyé
spécial.
Le salon de lecture de l'Hôtel de France, à
Saint-Pétersbourg: tous les journaux sont passés
au "caviar".
Dessin d'après nature de M. Paul Thiriat.
Saint-Pétersbourg est maintenant rentré complètement dans l'ordre. La grande masse des ouvriers a repris le travail, attendant, désormais confiante, la réalisation des promesses que l'empereur a faites, de sa bouche, à ceux de leurs camarades qu'il a reçus au palais Alexandre, à Tsarskoïé-Sélo. Et l'on a replâtré et repeint, aux murs des palais impériaux ou grands-ducaux, les marques laissées par les balles. Le cauchemar est fini, il faut du moins le souhaiter. Et, si les voyageurs s'empressent, à l'arrivée du courrier, dans les salons de lecture des grands hôtels et se jettent sur les journaux étrangers à demi couverts de caviar, de cette terrible encre grasse, indélébile, dont la censure russe recouvre impitoyablement, dans ces feuilles, tout «ce qui ne doit pas être lu», pouvaient percer les mystérieux, les impénétrables placards noirs qui s'interposent entre le verbe imprimé et leurs yeux déçus, les détails qu'ils liraient leur apparaîtraient presque, déjà, comme de l'histoire ancienne. Car, sans doute, en Russie comme en France, quinze jours font-ils d'un fait récent une vieille nouvelle.
Pourtant, si l'écho de ces convulsions suprêmes de l'émeute ne vient pas toujours jusqu'à Saint-Pétersbourg, grâce au caviar de la censure vigilante, il s'en faut que le calme ait été tout d'un coup rétabli dans l'étendue entière de l'empire.
En Pologne, notamment, où les haines de races demeurent, quelques efforts qu'on ait tentés pour les éteindre, toujours vivaces, des troubles extrêmement graves se sont produits et même ne sont pas complètement éteints à l'heure où nous écrivons. Ils ont été comme la répercussion des événements de Saint-Pétersbourg.
Varsovie a été le théâtre des scènes les plus tragiques, dont les détails sont encore mal connus. La ville a été soumise, par des grévistes dont on évalue le nombre à une quinzaine de mille, à un pillage en règle. Dans les rues centrales de la ville, la rue Moniuszki, la rue Marshalkovskaïa, où sont les plus beaux magasins de Varsovie, ceux-ci ont été envahis et razziés.
Dès le premier moment où se produisirent ces désordres, les habitants avaient été inflexiblement consignés dans leurs maisons, et c'est dans des rues désertes que la cavalerie, au concours de laquelle on avait fait appel pour réprimer l'émeute, arrivait à toute bride vers les lieux menacés, arrachait les pillards des maisons où ils opéraient et les obligeait à se dessaisir des produits de leurs vols.
Certains des volés même se sont fait personnellement justice, et l'on dit que, dans beaucoup de cas, rencontrant un des fauteurs emportant un objet qu'ils reconnaissaient, ils le tuèrent de leur propre main.
Tandis que se déroulaient, à Varsovie, ces tristes événements, une catastrophe venait de nouveau attrister Saint-Pétersbourg. L'un des ponts pittoresques de la capitale, le pont Égyptien, du type à suspension métallique, jeté sur le canal de la Fontanka, s'écroulait, le 2 février, au passage d'un escadron, et les cavaliers, les chevaux, avec un certain nombre de passants qui traversaient le pont, venaient s'abattre, parmi les débris du tablier, dans une mêlée effroyable, sur la glace du canal. Le sauvetage fut rapidement organisé, et l'accident, en somme, ne fit que peu de victimes.
SAINT-PETERSBOURG.--L'accident du pont Égyptien, sur la
Fontanka,--
Phot. C.-O. Bulla.
LES TROUBLES EN POLOGNE RUSSE: PILLAGE DES MAGASINS A
VARSOVIE
Une patrouille de hussards disperse les grévistes qui
dévalisaient le magasin de chaussures de la "Société anonyme de
Saint-Pétersbourg".--A la devanture close du magasin voisin est fixée
une image sainte destinée à le protéger contre le
pillage.
--Photographie prise dans la rue Moniuszki, le dimanche 29
janvier, à 11 heures et demie du matin.
L'ambassade française, escortée par les cavaliers des
tribus, sur la route de Fez.
Le transport des cadeaux du gouvernement français
à S. M.
Abd-el-Aziz.
(Photographies de notre envoyé spécial, M. Du Taillis)
L'ambassade présidée par M. Saint-René-Taillandier et envoyée par le gouvernement de la République auprès du sultan du Maroc vient de faire son entrée à Fez, où elle est arrivée le 26 janvier: elle était partie de Larache le 17.
Ce voyage à travers un pays vierge de tout chemin de fer, privé même de routes: cette longue chevauchée d'une caravane nombreuse le long de pistes en plein désert, sous la pluie presque toujours, tantôt au milieu de prairies fleuries de blancs asphodèles, tantôt de plaines de glaise, détrempées, sordides, devait être forcément très pittoresque, sinon toujours confortable.
Le gouvernement chérifien en avait assuré de son mieux tous les préparatifs. Il y a déployé une sollicitude dont les envoyés de la France ont été profondément touchés.
AU MAROC.--Le voyage de l'ambassade française de Larache
à Fez: le passage du Sebou.
Une diffa offerte à l'ambassade par le caïd d'El-Abassi.
Le caïd Rha, chargé par le
sultan de veiller sur
l'ambassadefrançaise.
A Larache, à la côte, où le débarquement de la mission, nous l'avons déjà dit, s'était effectué à bord d'une des barcasses du sultan, il envoyait pour chercher le bachadour--vous reconnaissez ici la déformation du mot ambassadeur--une escorte qu'on fit aussi imposante que possible, commandée par un personnage important du Maghzen, le caïd Rha, un homme d'une admirable prestance, d'une imposante noblesse d'attitudes sous son burnous flottant. Et le rouge pavillon impérial allait protéger tout le long du chemin les hôtes du sultan, flottant en avant de cette petite troupe de cavaliers et de fantassins aux costumes voyants. Tout un petit monde de muletiers, de chameliers, de serviteurs, suivait la caravane, s'occupant des bagages, plantant, repliant, emportant les soixante tentes indispensables pour le logement des voyageurs, véritable village de toile qui s'érigeait chaque soir en un site nouveau, sous l'ondée, ou, plus rarement, sous le ciel étoilé, et s'occupant, avec le plus grand soin, surtout, des cadeaux que la République française, suivant l'usage immémorial, a chargé son ambassadeur de remettre au souverain ami et aux personnages importants de sa cour: on ne saurait se concilier trop de bonnes grâces.
Ces cadeaux constituent un bagage inévitable, sans doute, mais terriblement encombrant. Ils sont enfermés dans une caisse énorme, un véritable monument, qu'on a suspendue à deux robustes poutres. Deux dromadaires sont affectés à son transport, un à chaque extrémité de ce brancard improvisé.
Le pont sur l'oued Mekkez.
L'un des principaux, des plus redoutables obstacles qui aient entravé la marche de la mission et de son long convoi a été le fleuve Sebou. Les pluies l'avaient grossi, changé en un torrent fangeux. Un moment on put craindre que M. Saint-René-Taillandier, sa suite, son escorte, ne fussent retenus, pendant plusieurs jours peut-être, sur ses berges argileuses. Là encore, les bons soins du Maghzen, les précautions prises à l'avance pour assurer le voyage de la mission s'accusèrent heureusement: des bacs attendaient l'arrivée des envoyés français et, sans trop de vicissitudes, les transportèrent d'une rive à l'autre.
Un peu plus loin, en approchant de Fez, la mission devait traverser une autre rivière, l'oued Mekkez. Celle-là est célèbre par son pont, un des trois ponts qu'on connaisse au Maroc et qui fut construit, paraît-il, par un chrétien converti à l'islamisme. Le problème de la traversée à gué ou en bateau encore ne se posait donc pas. Pourtant, comme la pluie tombait, il y avait presque autant d'eau entre les parapets du pont que sous ses arches. La caravane y pataugea effroyablement, toujours précédée de l'étendard écarlate du sultan.
Mais, ces menus ennuis d'une pareille expédition, on a fait tout ce qu'on pouvait pour les atténuer. Aux étapes, les caïds se sont efforcés, par la cordialité de leur accueil, de les faire oublier aux voyageurs fourbus et trempés. On s'est remis de tant d'émotions, dans des banquets copieux, des diffas abondantes, où les convives mangeaient, accroupis sur des tapis bariolés, dans des plats de bois, le mouton rôti sur un lit de couscoussou. L'une de nos photographies représente un de ces banquets, la diffa offerte au ministre de France par le caïd d'El-Abassi. On y remarquera la présence de Mme Saint-René-Taillandier, femme du ministre de France, qui, pour accompagner la mission, a adopté un costume arabe.
Enfin, on arriva au terme du voyage. La nouveauté, l'imprévu du spectacle qu'allait offrir aux Français l'entrée dans Fez devaient les consoler et les dédommager amplement des fatigues et des incommodités subies. Rarement la plupart d'entre eux eurent une vision pareille.
Aux portes de la capitale, enclose de vénérables remparts crénelés, cuits, dorés au soleil par une radieuse matinée, le ministre de la guerre du sultan, Si Guebbas, et l'introducteur des ambassadeurs (caïd mechouar) attendaient l'ambassadeur et sa suite pour leur souhaiter, au nom de leur souverain, une affectueuse bienvenue. Des troupes, jusqu'à plus d'une heure de chemin, faisaient la haie sur le passage de nos envoyés, maintenant, aux approches de la ville, une foule pressée. Des étendards de soie frissonnaient sur un ciel d'un bleu resplendissant.
La prochaine série de photographies de notre envoyé spécial donnera à nos lecteurs un tableau fidèle de ce spectacle impressionnant.
AU MAROC.--Les murs de Fez.
ERNEST BARRIAS
Le sculpteur Louis-Ernest Barrias, membre de l'Académie des beaux-arts, vient de succomber à une attaque d'influenza, le 4 février, à Paris, où il était né. Il avait seulement soixante-trois ans. Mais une vie de labeur sans trêve l'avait épuisé. Depuis longtemps très fatigué et continuant pourtant à travailler, à produire, il était une proie toute marquée pour la redoutable maladie. Il a été emporté en peu de jours.
Fils d'un peintre sur porcelaine, frère du peintre Félix Barrias, de près de vingt ans son aîné, il semblait qu'il ne put échapper au destin d'être lui-même peintre. De fait, le grand frère lui mit de bonne heure le crayon, puis le pinceau en main, lui apprit les premiers éléments du métier et, l'ayant ainsi préparé, le fit entrer chez Léon Cogniet, qui avait été son propre maître. L'enfant n'avait guère qu'une quinzaine d'années.
Ce fut un élève appliqué et docile. Pourtant il semblait que la peinture ne satisfit pas complètement son rêve et bientôt on le vit, entre deux séances devant la toile, s'amuser, en manière de récréation, à pétrir la glaise, à modeler des figurines. Une vocation de sculpteur, enfin, se révélait en lui, que l'on n'essaya pas de contrarier. Il franchit la cloison et passa de l'atelier de Léon Cogniet dans celui de Cavelier. Jouffroy devait parfaire son éducation sculpturale. Qui sait si ce ne fut pas à l'école de l'élégant statuaire de la Jeune Fille confiant son secret à Vénus que l'élève puisa le secret de cette grâce qu'il devait imprimer, plus tard, à certaines de ses productions: la Jeune Fille de Mégare, le Mozart enfant, pour ne citer que deux de ses oeuvres les plus connues?
La Nature se dévoilant.
Statue polychrome en
marbres de couleur.
--Phot. E. F.
En 1863, Barrias, grand prix de sculpture, partit pour Rome. Mais déjà il avait figuré au Salon avec des bustes que des critiques, des artistes avaient remarqués: celui de son père, celui du peintre Jazet, celui de Jules Favre, de son maître Cavelier. Il devait y réapparaître avec la Jeune Fille de Mégare qui fut son premier franc succès et lui valut la première de ses médailles. Cette figure de marbre, sans parler des mérites de son exécution, possède un charme juvénile, une joliesse naturelle qui justifient, certes, l'accueil très chaleureux qu'elle reçut. Deux ans après, en 1872, avec le Serment de Spartacus, qui décore l'un des socles des Tuileries, Barrias devait donner une note toute différente et montrer une vigueur mâle que bien peu de ses oeuvres ont accusée, par la suite, à un degré égal et avec autant de bonheur.
Mais ce fut son envoi de 1878 qui l'amena tout à coup au premier plan et lui conquit la gloire. C'était le plâtre des Premières Funérailles, qu'il allait tailler dans le marbre un peu plus tard et qu'on revit sous ce nouvel aspect au Salon de 1878, sans la moindre déception,--fortune qui n'échoit qu'aux oeuvres fortes.
Les deux exemplaires des Premières Funérailles appartiennent à la Ville de Paris: le plâtre original a remplacé, maintenant, à l'Hôtel de Ville, le marbre confié au Petit Palais des Champs-Élysées. C'est, bien évidemment, un morceau qui gardera sa place dans l'histoire de la sculpture contemporaine que ce groupe très noble, d'un arrangement irréprochable, d'une émotion contenue, tempérée par ce qu'on pourrait appeler la pudeur académique, par cette convention d'école qui interdit les désespoirs trop véhéments et jusqu'aux larmes, et qui se manifeste encore jusque dans le choix des types, toujours beaux, sans tares corporelles.
Mozart enfant.
--Phot. Goupil.
En 1881, avec le monument de la Défense de Paris, érigé au rond-point de Courbevoie, Barrias se mesurait avec la sculpture monumentale. L'année suivante, il donnait la Défense de Saint-Quentin. Plus récemment, avec le Monument de Victor Hugo, inauguré en 1902, il revenait à ses périlleuses amours, un moment oubliées et qui ne lui avaient pas donné tous les sourires qu'il eût pu désirer.
Nous avons publié, lorsque l'actualité y était, ces divers monuments. Barrias y demeure un artiste sûr de sa main, ingénieux dans ses inventions; il y montre d'heureuses trouvailles. Il manque à ces grandes machines quelque chose pour forcer l'admiration.
Le Mozart enfant, dont le plâtre figura au Salon de 1883, est sans doute la plus populaire de ses figures. Elle semble résumer à merveille et complètement les qualités de son talent, une incomparable souplesse de facture, une imagination affinée, inclinée vers le gracieux, vers l'aimable. Le mouvement de cette figure enfantine et déjà grave, déjà inspirée, déjà géniale par la pensée que reflète la physionomie, est d'une justesse, d'un naturel charmants. C'est d'un art séduisant comme certaines statues du dix-huitième siècle, presque des bibelots par l'élégance et le fini.
Les Premières Funérailles. (Salon de 1878.)
Cette heureuse veine, Barrias la retrouva avec la Nature qui se dévoile, l'une de ses dernières créations que le Luxembourg a recueillie. Ici encore, comme dans le Mozart enfant, le geste est d'une spontanéité, d'une vérité, qui de prime abord séduisent. Ce n'est point,--on en a du moins l'impression, comme dans toutes les oeuvres d'art bien venues, où jamais n'est visible l'effort créateur,--ce n'est point le résultat de longues recherches, de tâtonnements inquiets à l'atelier, devant la planche à modèle, mais le fruit de quelque heureuse rencontre, de quelque coudoiement providentiel, au milieu de la vie; un de ces hasards favorables qui enfantent les chefs-d'oeuvre quand ils se révèlent au génie.
Barrias aura occupé dans l'art contemporain une place considérable,
conquise dans l'effort continuel, sans brigue et sans machinations, car
nul plus que ce sincère artiste ne fut un excellent, un galant homme,
simple, modeste, affectueux.
G. B.
LES OBUS MONSTRES EMPLOYÉS PAR LES JAPONAIS A PORT-ARTHUR
Après la reddition de Port-Arthur, l'état-major de la garnison a déclaré
que la situation était surtout devenue intenable depuis que les obusiers
de 28 centimètres des Japonais avaient pu être mis en batterie et
envoyer leurs énormes projectiles au coeur des défenses de la place. La
curieuse photographie que nous reproduisons donne une idée exacte des
dimensions de ces monstrueux engins de destruction, pesant chacun plus
de deux cents kilos.
Phot. J. Ricalton.--Copyright 1905 by Underwood
and Underwood.
LE 20e CONGRÈS NATIONAL INDIEN A BOMBAY.
--Arrivée des
congressistes au "pandal" édifié pour les réunions du congrès.
On n'apprendra pas sans surprise, peut-être, qu'après leur long sommeil les populations de l'Inde secouent leur léthargie et paraissent s'éveiller à une vie nouvelle. On voit, sur tous les points de cette immense colonie, les indices de ce réveil éclater.
Ces trois cents millions d'êtres humains, las de leur misère, fatigués d'être soumis à un joug oppresseur, sans aucun moyen de faire entendre, efficacement, leur voix dans les conseils où s'élaborent leurs destinées, réclament résolument leur part dans le gouvernement de leur pays. Un mouvement de cette nature ne saurait nous laisser indifférents, en France, pays colonisateur, surtout au moment où les Japonais occupent une partie de la scène asiatique d'une manière si dramatique et si inattendue.
Ce n'est pas qu'il y ait rien à attendre de pareil des Hindous, gens timides pour la plupart, divisés en mille castes, désarmés et manquant de la suprême énergie des Nippons. Ce n'est pas, non plus, que la puissance anglaise s'exerce avec toute la tyrannie que l'on prétend; il faut être juste avant tout. Ce qu'on peut reprocher aux Anglais avec le plus de vérité, c'est leur esprit d'exclusivisme, leur morgue invincible et une indéniable oppression financière. Mais, en revanche, on doit reconnaître qu'ils ont donné au pays le bienfait de la paix, qu'ils l'ont doté d'une justice impartiale telle qu'il n'en avait jamais connu et l'ont couvert d'admirables travaux publics. Pourtant, on est en présence d'un fait indéniable, qui doit avoir ses causes: c'est que l'opposition des indigènes prend corps et s'affirme de plus en plus.
Depuis 1885, un congrès national indien, organe de cette opposition naissante, se tient, chaque année, dans une ville nouvelle de l'Inde, pour consigner ses revendications dans des cahiers curieux à consulter.
Celui de 1904 s'est tenu à Bombay, du 26 au 29 décembre: par le nombre et l'importance de ses délégués, il a eu une portée exceptionnelle. La séance d'ouverture s'est tenue dans un élégant pandal, fait de bambous, de nattes et de mousselines légères. Dix mille personnes y étaient réunies. On eût dit les états généraux de l'Inde s'établissant de leur propre mouvement. On sentait, dans cette vaste audience, comme un courant fait d'aspirations vagues, d'émotions contenues, de désir de lutte, avec un souffle d'orage, précurseur des tempêtes futures.
La réunion de tant de types divers et de tous ces costumes chatoyants et variés offrait à l'oeil un tableau d'un pittoresque extrême; mais tout désir de s'y arrêter disparaissait devant l'espèce d'oppression et de nervosisme auxquels les assistants semblaient en proie, ainsi que devant l'expression grave, je dirais même solennelle de ces visages, à l'ordinaire reposés et souriants. Ce qui donnait, d'ailleurs, à ce congrès une importance toute spéciale, c'est qu'un Anglais du parti libéral, sir Henry Cotton, était venu exprès de Londres pour le présider. Or, sir Cotton n'est pas le premier venu: c'est un ancien membre du Civil Service de l'Inde, retraité, dernièrement, étant haut commissaire de la province d'Assam.
Que sortira-t-il, allez-vous demander, de ce 20e congrès? Rien, sans doute, ou peu de chose, pas plus que des 19 autres qui l'ont précédé. L'Inde n'est pas le pays des changements précipités. Mais, dans l'état troublé des choses sur la planète, il est impossible de ne pas s'intéresser à un mouvement qui met en un pareil émoi le cinquième de la race humaine: il est certainement gros de conséquences pour l'avenir.
Tous les lecteurs qui ont bien voulu répondre à notre appel, en ce qui concerne le gui du chêne, confirment que la présence du gui sur le chêne est une véritable rareté. Aussi la Touraine peut-elle éprouver quelque orgueil à posséder deux chênes à gui qui nous sont signalés par un de nos correspondants, au Breuil, près de Cinq-Mars et de Langeais. Voilà le Midi battu par le Centre. D'autre part nous voyons, par le Bulletin de la Société forestière de Franche-Comté et Belfort pour 1903, qu'un beau chêne porte-gui a été signalé par M. E. Gilardoni, conservateur des eaux et forêts à Dijon. M. Gilardoni a publié une bonne photographie de ce chêne, qui se trouve dans les forêts de Villy-le-Brûlé (canton de Nuits-Saint-Georges (Côte-d'Or), près de l'ancienne voie romaine de Lyon à Langres). Ce chêne a 3m,40 de circonférence à hauteur d'homme, et il est littéralement couvert de gui, ce qui, du reste, lui sera fatal, car il dépérit manifestement. Il y a deux autres chênes porte-gui dans la Côte-d'Or, à la connaissance de M. E. Gilardoni: l'un, chêne pédonculé, dans la forêt de Lonchamp, près du village de Premières, arbre vieux et dépérissant; l'autre, dans la forêt de Grange-Neuve, canton de Nuits. Mais ces deux chênes ne portent que quelques touffes de gui, au lieu que celui de Villy-le-Brûlé en est couvert. M. Gilardoni a encore rencontré un chêne porte-gui dans la forêt de Chaux (Jura); et il n'y avait qu'un seul chêne de ce genre dans toute la forêt qui couvre pourtant 20.000 hectares. D'après la Flore forestière de Mathieu, c'est dans les forêts de la France centrale, aux environs de Blois, notamment, que les chênes porte-gui seraient le moins rares et, d'après le Bulletin de la Société forestière de Franche-Comté, un chêne de ce genre existait il y a quelques années aux environs de Troyes.
Toutes les personnes qui ont bu du lait de chèvre savent que ce liquide, précieux parce qu'il n'est jamais suspect de tuberculose, possède un goût et une odeur auxquels beaucoup d'entre elles ne peuvent s'habituer.
Ces qualités fâcheuses ne sont d'ailleurs pas inévitables, et le lait de certains animaux et surtout de certaines races en est exempt.
Mais il est un autre moyen que la sélection pour éviter ce désagrément. Deux médecins roumains, MM. Oceanu et Babès, viennent en effet de faire connaître que les chèvres auxquelles on a pratiqué l'ovariotomie, donnent un lait toujours privé de mauvais goût et d'odeur hircine.
Cette opération est moins coûteuse que la sélection. Elle posséderait en outre l'avantage d'activer la sécrétion lactée et d'en augmenter la durée.
Le comte de Colleville.
Une personnalité fort connue dans la haute société parisienne et aussi à Rome, le comte de Colleville, chambellan intime de Sa Sainteté Pie X, s'est éteint dans sa quatre-vingt-sixième année, à Houilles, où il s'était retiré.
Le comte de Colleville, qui était le doyen des camériers de cape et d'épée français, avait servi trois souverains pontifes avec le même dévouement. Il était commandeur de Saint-Grégoire-le-Grand.
Il appartenait à l'une des plus anciennes familles normandes. Le nom de Colleville est inscrit, en effet, parmi les compagnons de Guillaume le Conquérant et au livre de la pairie anglaise.
Le comte de Colleville laisse un volume de Mémoires, qui sera publié par son fils, le vicomte de Colleville, l'auteur de Pie X intime.
Le vice-amiral Touchard.
Phot. Pirou, rue Royale.
Le vice-amiral Touchard, nommé récemment chef d'état-major général de la marine, est né en 1844 et compte plus de quarante ans de service. Il a, comme capitaine de frégate, commandé l'aviso Hugon, pendant la campagne du Tonkin; comme capitaine de vaisseau, le cuirassé Marengo et l'Iphigénie, croiseur-école des aspirants.
Contre-amiral, le 6 juin 1894, il occupa deux fois les fonctions de sous-chef d'état-major général, puis prit, en 1898, le commandement d'une division de l'escadre du Nord. Entré au comité consultatif, il recevait, en avril 1902, la troisième étoile et, le mois suivant, était appelé à la préfecture maritime de Cherbourg, qu'il vient de quitter. Il est grand officier de la Légion d'honneur.
Le commandant Desmarest
La ville de Melun vient de fêter le centième anniversaire d'un de ses notables habitants, M. Emmanuel-Auguste Desmarest, commandant en retraite, officier de la Légion d'honneur, né à Huningue (Alsace), le 8 février 1805.
Toute localité ayant le rare privilège de posséder un centenaire en tire quelque vanité, d'ailleurs bien légitime: chez notre fragile espèce, savoir pratiquer l'art difficile de vivre un siècle n'est point un mince mérite, et il est naturel que le prestige qu'il confère au vainqueur du temps excite la fierté de ses proches concitoyens. Melun devait donc un public hommage à son centenaire; d'autant plus que le cas de M. Desmarest est particulièrement extraordinaire.
En effet, cet homme prédestiné à une exceptionnelle longévité a traversé les vicissitudes les plus propres à abréger son existence. Il exerce d'abord la profession paisible de graveur sur métaux, puis, épargné par la conscription, il s'oriente vers l'industrie, où, s'il n'est pas assuré de faire fortune, il a du moins chance de cheminer sans trop de risques jusqu'à la halte finale que son bon tempérament lui permet d'espérer lointaine. Mais soudain, à l'âge de vingt-sept ans, il se souvient qu'il est fils et petit-fils de soldats, l'atavisme éveille en lui une vocation tardive, il s'engage, en 1832, dans l'infanterie: le voilà embrassant la carrière militaire périlleuse entre toutes.
Au bout de huit ans, le conscrit volontaire a conquis l'épaulette; en 1848, il est capitaine adjudant-major au 11e léger, après avoir guerroyé en Kabylie. En 1850, il tient garnison à Angers, au moment de la fameuse catastrophe du pont suspendu, dont la rupture précipite dans la Maine trois compagnies de son régiment. Deux cents hommes périssent engloutis; lui, échappe à la noyade et accomplit plusieurs sauvetages qui lui valent la croix. En Crimée, il prend part aux batailles de l'Alma, d'Inkermann, de Traktir, au siège de Sébastopol; à Malakof, une poudrière, en sautant, l'ensevelit sous ses décombres; il se relève assez valide pour recevoir sa promotion de chef de bataillon. Et, en 1859, on retrouve le commandant Desmarest en Italie, où, avec le 52e de ligne, il se signale par sa bravoure, le soir de Magenta. A la fin de 1862, il quitte l'armée, comptant trente ans de service, douze campagnes, huit blessures; mais la guerre de 1870 ravive l'ardeur belliqueuse du vaillant retraité de soixante-cinq ans: il organise un corps de francs-tireurs et reçoit une neuvième blessure,--dont il guérit...
N'est-elle pas vraiment curieuse, l'histoire de ce centenaire qui a gagné haut la main la gageure qu'il semblait avoir faite avec la mort?
Citoyen de Melun depuis trente-trois ans, M. Desmarest y a tout doucement atteint sa «centième», entouré par une gouvernante dévouée, Mlle Marie Brunet, d'une sollicitude quasi filiale.
Il n'a pas de descendance, car il est resté célibataire: en biographe
consciencieux, nous constatons simplement le fait, sans y entendre
malice; il serait d'ailleurs aussi téméraire que peu galant de le
rattacher à la psychologie de la longévité.
E. F.
La Victoire à Sedan, par Alfred Duquel (Albin Michel, 3 fr. 50).--Mémoires de Mme Roland, nouvelle édition critique, par Cl. Perroud (Plon, 2 vol., à 5 fr. chacun).--Le Pape et l'Empereur, par Henri Welschinger (8 fr.). --Sur la pierre blanche, par Anatole France (Calmann-Lévy, 3 fr. 50).
Le 1er septembre 1870, le commandement du maréchal de Mac-Mahon était remis, vers huit heures, au général Ducrot. La retraite sur Mézières était-elle praticable? Peut-être le 31 août aurait-on pu y songer, mais, le lendemain, la route était complètement fermée par les forces allemandes; tous les canons de la quatrième armée prussienne étaient installés le long du bois de la Félizette et de chaque côté de la ligne de Mézières. Comment faire passer sous leur feu une cohue démoralisée? Mais y avait-il un endroit par où l'on pouvait sortir de cet entonnoir de Sedan où l'armée française avait été conduite? Oui, et c'était Bazeilles-Carignan, affirme M. Duquet, avec le général de Wimpfen, le général Chanzy et M. Jules Claretie. Là, le général Lebrun était vainqueur des Bavarois, qu'il avait décimés. En continuant de garnir les hauteurs de Saint-Menges et en jetant de bonne heure, le 1er septembre, les troupes sur ce point, au lieu de les diriger vers l'ouest, il était même possible de changer la déroute en triomphe. «Pour le moment, disait M. Wimpfen à M. Ducrot, Lebrun a l'avantage; il faut en profiter. Ce n'est pas une retraite qu'il nous faut, c'est une victoire.»
Au début de la guerre, les fautes de tactique du commandement prussien furent innombrables; à Spickeren, à Saint-Privat, la victoire vint, à plusieurs reprises, se poser jusque dans nos mains sans qu'on ait su la retenir. A Sedan même, un véritable homme de guerre, dès le commencement de la lutte et au dernier moment même, le 1er septembre, eût culbuté l'ennemi, de telle sorte qu'au lieu de la capitulation nous eussions eu la victoire de Sedan.
M. Alfred Duquet, dont l'oeuvre militaire est si considérable et le patriotisme si éclairé, nous raconte nos désastres et montre comment on aurait pu les éviter.
Elle les écrivit dans sa prison, à l'Abbaye et à Sainte-Pélagie, du 1er juin 1793 au 8 novembre de la même année, jour de son jugement et de son exécution. Ils comprennent les cahiers où elle raconte son enfance et sa jeunesse, d'autres où, sous les titres de: Notices historiques, Portraits et Anecdotes, Premier Ministère, Second Ministère, etc., elle justifie les actes politiques de son mari ou les siens. A Bosc, puis à Mentelle, elle faisait passer, de sa prison, ce qu'elle écrivait. Le premier donna, en 1795, une édition, mais non complète, des Mémoires. D'après un manuscrit autographe, légué par la fille des Roland à la Bibliothèque Nationale et dont celle-ci prit possession le 13 novembre 1858, MM. Dauban et Feugère publièrent, presque simultanément, en 1864, un texte plus exact et plus étendu de l'oeuvre de Mme Roland. Deux cahiers, entrés en 1892 dans notre grande Bibliothèque, manquaient aux éditions de M. Dauban et se lisent dans la nouvelle publication de M. Perroud, enrichie de notes savantes, mise en un ordre strict et précédée d'une notice substantielle. Des lettres inédites, des appendices, des récit de la mort par Sophie Granchamp, ont été joints aux cahiers par M. Perroud et donnent à ses deux volumes une valeur toute nouvelle. Née en 1754, Marie-Anne Philipon épousa, le 4 février 1780, Roland de la Platière, inspecteur des manufactures. De 1784 à 1789, les Roland vécurent soit à Villefranche-en-Beaujolais, soit à deux lieues de là, au Clos. Élu officier municipal de Lyon en février 1791, il est chargé de plaider à Paris, auprès de l'Assemblée nationale, les intérêts financiers de la ville. Toute pénétrée de Plutarque et de Rousseau, républicaine et stoïcienne, sa femme l'accompagnait; elle ouvrit chez elle le salon de la Révolution, où l'on voyait, mêlé à Brissot, à Pétion, à Buzot, Robespierre dont le silence ne se rompait que rarement.
Ne fait-il pas songer au tigre dans la bergerie? Sous la Législative, Roland fut ministre de l'intérieur de mars 1792 au 13 juin de la même année. Congédié, ainsi que ses collègues, par Louis XVI, il revient au pouvoir après le 10 août et l'abolition de la royauté. Danton était ministre de la justice. Quel portrait en trace Mme Roland, qui le prit en horreur, surtout après les massacres de septembre, et qui nous entretient de lui longuement dans des pages en partie inédites jusqu'à M. Perroud. «Je regardais cette figure repoussante et atroce,... je ne pouvais appliquer l'idée d'un homme de bien sur ce visage.» La mort de Marat remplit Mme Roland d'enthousiasme pour Charlotte Corday. Jugeant inefficace sa lutte contre la Commune de Paris, contre les arrestations et les exécutions arbitraires, Roland donna, dans une lettre rédigée par sa femme, sa démission de ministre de l'intérieur. Je ne sais rien de plus instructif et qui nous montre mieux le sain jugement de Mme Roland que ces pages, inexactement connues avant la publication de M. Perroud. Revenant en arrière dans le morceau intitulé Brissot, elle exprime son opinion sur les hommes marquants de la Constituante, qu'elle a seulement aperçus. «J'entendis, mais trop peu, l'étonnant Mirabeau, le seul homme dans la Révolution dont le génie pût diriger des hommes et impulser une assemblée... Il fallait le contrepoids d'un homme de cette force pour s'opposer à l'action d'une foule de roquets et nous préserver de la domination des bandits.» Dans sa prison, elle se plaisait en ses souvenirs et à noter les hommes de la Révolution. Elle n'est pas flatteuse pour Necker, «qui faisait toujours du pathos en politique comme dans son style, homme médiocre, dont on eut bonne opinion parce qu'il en avait une très grande de lui-même». Pas une figure de la terrible époque qui ne paraisse dans ces cahiers de Mme Roland. Elle alla, le 8 novembre, au milieu d'une foule immense, de la Conciergerie à l'échafaud, dressé sur la place de la Révolution. Elle passa par ce Pont-Neuf au bord duquel se dressait la maison de son enfance, souriant à Sophie Granchamp qu'elle distingua au poste convenu. Son seul crime, c'était d'avoir correspondu avec les girondins poursuivis et d'être la femme de Roland. Celui ci, en apprenant cet assassinat, se donna la mort près de Rouen; Buzot, qu'elle avait aimé d'un amour aussi pur que fort, ne tarda pas à suivre le conseil que l'amie lui avait donné dans une lettre: «Si l'infortune opiniâtre attache à tes pas quelque ennemi, ne souffre point qu'une main mercenaire se lève sur toi, meurs libre comme tu sus vivre». Il se porta lui-même le coup mortel, aux environs de Saint-Emilion, entre le 19 et le 26 juin 1794. Grâce à cette édition aussi complète que possible des oeuvres de Mme Roland, nous pouvons connaître mieux les hommes de la grande tragédie révolutionnaire.
Dans la lutte entre Pie VII et Napoléon, M. Henri Welschinger n'hésite pas à prendre parti pour le pape. Comment l'empereur, sacré par le pape à Notre-Dame, ne lui fût-il pas reconnaissant de son long voyage? La veille de la cérémonie, averti par Joséphine qu'il n'y avait pas union religieuse entre elle et l'empereur, Pie VII avait exigé qu'on y pourvût sur-le-champ. Or, Napoléon songeait déjà au divorce. Jérôme Bonaparte s'étant lié légitimement avec une jeune Américaine, Mlle Patterson, Napoléon exigea que le pape brisât cette union. Pie VII refusa de se soumettre à cette volonté impériale. Une autre résistance du pontife fit déborder la coupe: il persista, malgré les ordres de Napoléon, à ne pas fermer ses ports aux Anglais et à conserver les étrangers dans ses États. D'Allemagne, le 17 mai 1809, l'empereur, par décret, déclara les possessions pontificales réunies à l'empire et, à l'excommunication affichée contre lui et ses conseillers, répondit par l'enlèvement de Pie VII qui fut conduit à Savone.
Dans ces circonstances, le pape refusa aux évêques choisis par Napoléon l'institution canonique. En 1811, l'empereur convoqua un concile national, lui demandant, en particulier, d'affirmer que le métropolitain ou le plus ancien évêque de la province ecclésiastique, en cas de vacance de plus d'un an, avait le droit de conférer l'institution canonique. Irrité contre le concile, qui ne montre pas assez de souplesse, Napoléon le dissout, mais en groupe un autre qui peut passer pour sa continuation. C'est à cette querelle théologique de l'institution que s'acharne le maître de l'Europe. A Fontainebleau, où il fait transporter le pape, il essaye de lui faire signer le Concordat de Fontainebleau (janvier 1813); après avoir mis son seing à des articles de concession assez marquée, le pape, malade, débilité, se ressaisit. On connaît la suite: l'invasion, le retour à Rome du souverain pontife. Au fond, la pensée de Napoléon nous est révélée dans ses Mémoires, dictés de Sainte-Hélène: installer le pape et les cardinaux dans l'île Saint-Louis, avec Notre-Dame remplaçant Saint-Pierre.
Personne, mieux que M. Welschinger, coutumier des bonnes études historiques, écrivain et savant, ne pouvait nous peindre cette longue bataille du pape et de l'empereur.
Le livre de M. Anatole France parait au moment où je corrige les
épreuves de cet article. Le charmant et subtil écrivain nous y présente
plusieurs jeunes gens discutant de toutes choses, dans la ville de Rome.
L'empire romain, le christianisme, la guerre entre la Russie et le
Japon, les idées socialistes, les songes d'avenir, se succèdent
rapidement dans leurs vives conversations. Au fond, l'auteur, sorti de
son dilettantisme, jeté en pleine lutte, a répandu, sur la Pierre
blanche, toute sa pensée philosophique, religieuse et sociale.
E. Ledrain.
Histoire.--Le Réveil de la nation arabe dans l'Asie turque, par Négib Azoury. In-18, Plon, 3 fr. 50;--Mme Récamier et ses amis, d'après des documents inédits, par Édouard Herriot. 2 vol. in-8°, dº, 15 fr.--Mémoires du comte de Rambuteau, publiés par son petit-fils, avec une introduction et des notes, par G. Lequin. In-8°, illustré, Calmann-Lévy, 7 fr. 50.--Joachim Murat (1767-1815), par Jules Chavanon et Georges Saint-Yves. In-18, Hachette, 3 fr. 50 --Une chouannerie flamande au temps de l'Empire (1813-1814), Louis Fruchart, dit Louis XVII, par Paul Fauchille. In-8°, Pedone, 7 fr. 50.--Les Origines de la Réforme, par P. Imbart de La Tour. I. La France moderne, in-8º, Hachette, 7 fr. 50.
Divers.--Les Fléaux de la peinture, par E. Dinet, préface de Georges Lafenestre. In-18, Rey, 1 fr. 50.--Jean Petitot et Jacques Bordier, deux artistes huguenots du dix-septième siècle, par Ernest Stroehlin. In-8°, avec 21 planches, Kündig, Genève, 10 fr.--Études économiques sur l'antiquité, par Paul Guiraud. In-18, Hachette, 3 fr. 50.--Les Joueurs d'épée à travers les siècles, par Gabriel Letainturier-Fradin. In-8°, illustré, Flammarion, 7 fr. 50.--L'Escrime du sabre, par Luigi Barbasotti, traduction française. In-18, illustré, Rothschild, 10 francs.
CROQUIS DU COMBAT DE SAN-DE-POU
La 2e armée russe
occupait, d'après les dernières dépêches, la position que lui attribue
notre croquis sur la rive droite du Houn-Ho.
Si le combat de San-De-Pou est resté localisé sur une partie de l'immense front (100 kil.) des armées russes et japonaises, il n'en a pas moins été acharné et meurtrier comme les batailles de septembre et d'octobre. Les Japonais avouent 7.000 hommes de pertes. On en attribue 10.000 aux Russes.
On a dit que cette opération n'avait eu d'autre but que de détourner l'attention des mauvaises nouvelles de Saint-Pétersbourg. Les tacticiens ont vu plutôt en elle une reconnaissance offensive destinée à préparer une prochaine action générale. Enfin, le retour en Russie du général Grippenberg, qui l'a dirigée, semblerait indiquer que le commandant de la 2e armée a agi, soit dans l'initiative, soit dans l'exécution, contrairement aux ordres de Kouropatkine.
Quoi qu'il en soit, le combat de San-De-Pou mérite, à tous égards, une attention spéciale.
Dans la nuit du 24 au 25 janvier, l'armée de Grippenberg exécutait, par la rive droite du Houn-Ho, un mouvement tournant, qui surprenait complètement l'adversaire. Dès le 25, elle franchissait la rivière, enlevait Kaïlatosa, Tchi-Taï-Tsé, Namaki, Kheigoutaya, Souma-Pou, etc.
La région est absolument plate, riche, très populeuse et semée de villages entourés de murs. Les Japonais les avaient tous transformés en véritables forts.
Le 26, l'offensive vigoureuse se continuait jusqu'à San-De-Pou. Cette localité importante avait été formidablement organisée par les défenseurs. Les Russes parvenaient bien à enlever, au prix de grosses pertes, les lignes extérieures et à pénétrer dans le village, mais ils ne pouvaient emporter le réduit entouré d'une triple enceinte d'obstacles artificiels que leur artillerie n'avait pas su ou pas pu entamer.
Le. 27, renforcés à leur aile gauche, les Japonais parviennent à repousser leurs adversaires des abords immédiats de San-De-Pou et de quelques villages avoisinants. L'offensive russe était arrêtée.
En même temps, Oyama lançait des forces assez importantes contre le centre de Kouropatkine, du côté de Cha-Ho-Pou. Cette diversion, d'ailleurs, échoua complètement; mais il se peut qu'elle ait empêché les Russes de prendre de ce côté une offensive qui eût favorisé les opérations de Grippenberg.
La lutte acharnée qui s'est livrée autour de San-De-Pou semble terminée depuis la fin de janvier. Elle est seulement prolongée par des escarmouches locales presque incessantes, telles que la prise successive, deux ou trois fois par chacun des partis, du village de Kekeoutaï et l'attaque dirigée sans succès, dans la nuit du 3 février, par un régiment japonais, sur Tchang-Tan.
De graves dissentiments, nous l'avons dit plus haut, paraissent s'être élevés entre le généralissime Kouropatkine et le commandant de la 2e armée Grippenberg, qui se plaindrait de n'avoir pas été soutenu par une offensive du centre. Il est difficile d'émettre sur ce point un jugement quelque peu certain, à la distance où nous sommes du théâtre des opérations, dans l'ignorance absolue où nous nous trouvons des intentions du commandement, des moyens exacts dont il dispose et de mille circonstances ambiantes qui nous échappent.
Ces dissentiments sont-ils la seule cause de l'arrêt de l'offensive russe? La rigueur exceptionnelle de la température, descendue à 20 et 25 degrés de froid au milieu d'affreuses tourmentes de neige, les habiles dispositions défensives des Japonais, l'arrivée à temps de leurs renforts soigneusement échelonnés, la diversion de Nodzu à Cha-Ho-Pou, ne sont-elles pas les véritables motifs de cet arrêt? Nul ne saurait aujourd'hui le discerner avec certitude.
En tout cas, si les opérations de San-De-Pou n'ont pas procuré les résultats décisifs qu'elles eussent pu donner, il est évident qu'elles ont, du moins, mis l'aile droite russe dans une position avantageuse qui, malgré le léger recul des 27 et 28 janvier, ne laisse pas de constituer pour la gauche japonaise un sérieux danger.
Les Russes, d'ailleurs, ne restent pas inactifs: un jour, ils reprennent un village qui consolide leur position sur le Houn-Ho; un autre, c'est la cavalerie cosaque qui pénètre jusqu'à Labataï, au milieu des convois japonais, ou bien un détachement qui détériore la voie ferrée au sud de Liao-Yang.
Les Japonais n'ont pas pu refouler les Russes de la position menaçante qu'ils occupent depuis quelques jours. On peut donc penser maintenant que les progrès accomplis de ce côté ont un caractère définitif. En ce cas, si une bataille générale s'engage d'ici peu, la position prise par la 2e armée russe peut avoir sur les événements une influence capitale. L. de Saint-Fégor.
M. Bouliguine, nouveau
ministre de l'intérieur
de Russie.
L'un des événements importants de la semaine politique, en Russie, a été la nomination de M. Bouliguine au ministère de l'intérieur que laissait vacant la démission du prince Sviatopolsk-Mirski.
M. Bouliguine aurait, dit-on, manifesté peu d'enthousiasme à accepter cette nouvelle et difficile fonction. On le représente comme un administrateur habile et un fort honnête homme, sans desseins politiques bien arrêtés.
Il a été pendant dix ans gouverneur de Moscou, puis adjoint, comme sous-gouverneur général, au grand-duc Serge. Ce poste ayant été supprimé, M. Bouliguine avait été appelé au conseil de l'empire et son arrivée au ministère, après la nomination du général Trepov comme gouverneur de Saint-Pétersbourg, semble démontrer que l'influence du grand-duc Serge est toujours dominante. On en arrive donc à craindre ou bien une réaction, ou un piétinement sur place.
L'«ILLUSTRATION» AU-DEVANT DU GÉNÉRAL STOESSEL
Le général Stoessel, Mme Stoessel et un grand nombre d'officiers russes, ramenés en Europe par l'Australien, de la Compagnie des Messageries maritimes, vont arriver incessamment à Aden.
C'est là que nous avons envoyé, au-devant des héros de Port-Arthur, notre collaborateur L. Sabattier.
Habile reporter et à l'occasion photographe, en même temps que dessinateur de grand talent, M. L. Sabattier, qui prendra passage sur l'Australien, y recueillera tous les éléments d'un supplément sensationnel que nous espérons pouvoir offrir à nos lecteurs dans notre premier numéro de mars.
LA REPRISE D'«ANGELO» AU THEATRE SARAH-BERNHARDT
Mme
Sarah Bernhardt (la Tisbé) et M. de Max (Homodeï).
Phot. Manuel.]
La reprise d'Angelo, drame en cinq actes de Victor Hugo, a été l'occasion d'un succès personnel considérable pour Mme Sarah Bernhardt, organisatrice et principale interprète de l'oeuvre, et pour ses partenaires, Mlle Dufrène, MM. de Max, Desjardins et Deneubourg. La mise en scène et les costumes sont superbes: c'est en somme un très beau spectacle. Quant à dire que cette reprise ajoutera quelque chose à la gloire du poète, ce serait évidemment aller à l'encontre du sentiment général. Le romantisme a vécu: le public ne «coupe plus» à ses tirades emphatiques, et les horreurs où il se complaît ne provoquent plus que le sourire.
Le nouveau spectacle du théâtre Antoine ne présente qu'un intérêt moyen. L'Amourette, de M. Pierre Veber, amusante à suivre avec son enlèvement en auto, qui est tout à fait dans la note du moment, ne va pas sans engendrer une certaine lassitude à cause de ses longueurs; et puis ce vaudeville est joué sans conviction. Les Manigances, de M. Athys, mettent en scène avec esprit une tentative de rupture entre deux amants; le rôle de la femme, tout de sentiment et de bonne grâce, est très bien tenu par Mlle Jeanne Lion. Enfin une pièce «juridique» à la Courteline: les Experts, par M. Benière, a beaucoup plu; elle démontre une fois de plus que, si l'on a à réclamer une indemnité, il vaut mieux s'entendre à l'amiable: les frais de justice mangent tout. (Voir l'Huître et les Plaideurs.)
Dans la Fille de Jorio, tragédie pastorale en trois actes, donnée au Nouveau-Théâtre, M. G. d'Annunzio développe avec une vive ardeur mystique une histoire analogue à celle du Succube, si bien contée par Balzac en vieux français:
Une pauvre fille de la campagne, innocente et pure, est cruellement sacrifiée par des paysans qui veulent voir l'oeuvre du démon en sa grâce ensorceleuse. Ce rôle, admirablement interprété par Mlle Suzanne Desprès, a conquis à l'oeuvre toutes les sympathies du public.
Il est superflu d'ajouter que la traduction de M. G. Hérelle est de tous points remarquable.
(Tous les articles publiés sous cette rubrique sont entièrement gratuits.)
La fragilité des pièces collées sur chambres à air et bandages de pneumatiques est bien connue de tout le monde; elle est due à ce que le caoutchouc servant d'adhésif n'est pas du caoutchouc vulcanisé, solide et peu altérable, mais bien du caoutchouc naturel, poisseux et peu résistant. D'autre part, la vulcanisation, ou sulfuration, est une opération peu à la portée de tout le monde.
M. Sans a créé des nécessaires vulcanisateurs-express, permettant de donner aux pièces de caoutchouc, et cela d'une façon instantanée, toute la solidité voulue. L'expérience suivante prouve bien d'ailleurs l'évidence du phénomène.
Si l'on applique quelques couches de dissolution sur une plaque de verre, il reste une pellicule de caoutchouc naturel sur la plaque ainsi traitée; étendons sur une moitié de cette pellicule une couche de liquide vulcanisateur et passons ensuite sur l'ensemble un pinceau imbibé de sulfure de carbone, la moitié non vulcanisée se trouve presque instantanément dissoute, la moitié vulcanisée résiste et se détache sous forme de caoutchouc solide, plus apte à tous usages que la partie n'ayant subi aucun traitement.
Le nécessaire Sans comporte deux flacons; le premier est une solution de caoutchouc; le deuxième, un liquide vulcanisateur, une râpe et une brosse sont jointes à l'appareil. Un nettoyage parfait est nécessaire pour assurer le succès de tout raccommodage. Il se fait à l'aide de la râpe dont le côté rond est taillé à grains fins.
Ce côté de la râpe doit servir à bien gratter les parties à coller, de façon à enlever les matières étrangères ou saletés qui s'y trouvent adhérentes.--En un mot, on doit bien mettre le caoutchouc à vif.
L'autre côté de la râpe, qui est plat et dont les grains sont plus gros, doit servir à écorcher le caoutchouc pour permettre à la dissolution de bien pénétrer dans les pores de cette substance. Après cette opération, on doit épousseter soigneusement avec la petite brosse pour enlever les pulpes.
Il suffit ensuite d'appliquer, comme d'habitude, deux ou trois couches de dissolution sur les deux parties à réunir; dès que la dissolution est sèche, on passe une couche de liquide vulcanisateur et l'on applique fortement. Il est aisé de reconnaître que le caoutchouc est vulcanisé, car les bords des pièces ne sont pas poisseux comme d'habitude. Les recollages ainsi obtenus sont très solides et ne craignent pas la chaleur.
--Pour tous renseignements concernant cet appareil, s'adresser à M, J.-B. Sans, 15, rue Vanderkinderen, Bruxelles.
Pour, toutes insertions concernant les nouvelles inventions, écrire au service des Nouvelles Inventions à l'Illustration, 13, rue Saint-Georges, Paris.
[Note du transcripteur: Les suppléments ont, pour la plupart, été perdus; ils ne sont d'ailleurs pas contenus dans les éditions reliées de 26 numéros.]